Permis de polluer
Publié le 4 Mars 2016
L’encre de la COP 21 et la petite larme de Laurent Fabius ne sont pas encore sèches que le gouvernement s’est déjà essuyé les pieds sur l’esprit de la conférence de Paris. Celle qui devait, on s’en souvient, changer notre vision du monde et notre rapport à la planète.
Histoire sans doute de fêter joyeusement le retour des ministres écologistes au sein de l’équipe de Manuel Valls, l’exécutif a ainsi déposé hier matin un amendement au projet de loi sur la biodiversité qui exonérerait les industriels en cas de préjudice écologique causé. En clair, si cet amendement était adopté, il reviendrait désormais à l’État, et donc au contribuable, de réparer les dégâts et d’indemniser les victimes après une catastrophe environnementale. L’entreprise fautive serait quant à elle exemptée de tout dédommagement pour peu qu’elle bénéficie d’une autorisation administrative justifiant son activité. Avec ce texte, Total n’aurait jamais été condamné après le naufrage de l’Erika.
C’est Libération qui a soulevé le (gros) lièvre sur son site internet ce mardi, à quelques heures de l’examen de la motion à l’Assemblée nationale.
Sous couvert d’un légalisme implacable et d’un symbole réconfortant (l’inscription dans le Code civil), cet amendement n’est en fait rien d’autre qu’un blanc-seing accordé aux grosses multinationales et aux entreprises les moins scrupuleuses. Un permis de polluer validé et garantit par l’État.
Le message est bien évidemment terrible d’un strict point de vue environnemental et même politique, mais sur ce dernier point le gouvernement n’est plus à ça près c’est vrai. Il dit surtout la puissance des lobbies industriels qui font pression depuis des années sur les pouvoirs publics pour faire passer sournoisement ce genre de mesure dévastatrice. Dont les effets ne sont visibles qu’avec le temps.
Une fois qu’il est trop tard.
DNA-02/03/2016