Changement de Gouvernement mais pas de méthode : la France tue de plus en plus de loups au lieu d'organiser la cohabitation

Publié le 24 Juillet 2017

D'ici la fin du mois de juin 2018, le gouvernement a autorisé l'abattage de 40 loups, un nombre égal à la période précédente, tout en annonçant vouloir réévaluer l'efficacité de ces mesures sur la protection des troupeaux, critiquées par les ONG. Un nouveau plan pluriannuel de gestion du loup (2018-2022) a été promis pour janvier prochain, alors que, depuis des années, les pouvoirs publics échouent à concilier les demandes des éleveurs et les attentes des associations pro-loup. « Dans la perspective d'un nouveau plan loup 2018-2022 », une concertation aura lieu à la rentrée et une étude a été lancée pour mesurer l'efficacité des tirs sur la prédation de l'animal vis-à-vis des troupeaux, ont indiqué Nicolas Hulot et Stéphane Travert, respectivement ministres de la Transition écologique et de l'Agriculture, cosignataires de l'arrêté sur les abattages. Le suivi des mesures de protection va aussi être « renforcé ».

Entre le 1er juillet 2017 et le 30 juin 2018, des dérogations pour tirer sur cette espèce protégée pourront être délivrées dans des zones où des attaques sur des troupeaux ont eu lieu. Une fois que le plafond de 32 loups aura été atteint, les huit derniers abattages ne pourront avoir lieu que dans le cadre de tirs de défense, c'est-à-dire par des éleveurs pour repousser une attaque en cours ou imminente sur un troupeau. « Nous devons collectivement relever le défi de la préservation de cette espèce protégée [...] et assurer des conditions d'élevage, en particulier du pastoralisme, sécurisées pour les éleveurs », a déclaré dans un communiqué Nicolas Hulot.

Changement de Gouvernement mais pas de méthode : la France tue de plus en plus de loups au lieu d'organiser la cohabitation
Tirs d'effarouchement

Pour le ministre, grand défenseur des espèces menacées, ce dossier est particulièrement épineux. « Quand on vient d'une ONG qui a à cœur de défendre la biodiversité, signer un arrêté qui donne le droit d'abattre deux loups, c'est un crève-cœur », confiait-il à Ouest France dimanche dernier. Mais, ajoutait-il, « en tant que ministre, je ne peux ignorer la détresse des éleveurs qui, un matin, trouvent quarante brebis tuées dans leur troupeau ». Stéphane Travert a, lui, dit « faire confiance à la concertation et à la dynamique collective pour construire un nouveau dispositif qui satisfasse les ONG et les éleveurs ».

La tâche sera ardue. Ce chiffre de 40 abattages autorisés a été vivement critiqué par plusieurs organisations de protection de l'environnement, qui remettent en cause la pertinence de cette méthode pour diminuer les dégâts sur les troupeaux. Elles préconisent de se limiter à des tirs d'effarouchement. « L'arrêté poursuit la gestion calamiteuse de ce dossier engagée par le précédent gouvernement », ont estimé France Nature Environnement, Humanité et Biodiversité, la Ligue de protection des oiseaux et le WWF. « Le gouvernement a loupé la première occasion de reprendre ce dossier par le bon bout », ajoutent ces organisations, en demandant que le prochain plan de gestion « permette au loup, espèce protégée, d'avoir des perspectives de présence pérenne dans notre pays ».

360 loups en France

Un abattage de 40 loups représente un peu moins de 10 % de la population en France, qui augmente régulièrement et qui est désormais estimée à quelque 360 individus. Revenu en France au début des années 90 par l'Italie, le loup est désormais présent dans une trentaine de départements, en particulier dans le Sud-Est. Ces dernières années, le nombre d'abattages autorisés a progressivement augmenté : en 2013 et 2014, pour 24 autorisations, il y avait eu respectivement trois et huit abattages déclarés. Mais les dégâts sur les troupeaux, qui ont triplé depuis 2009, restent importants. Sur la période 2016-2017, plus de 8 000 bêtes – des ovins essentiellement – ont été tuées, surtout dans le quart sud-est du pays.

Les éleveurs estiment que les mesures de protection (barrières électriques, chiens de garde, etc.), pour lesquelles ils reçoivent des aides, sont contraignantes (regroupement des troupeaux, présence physique jour et nuit) et ne permettent pas d'éviter toutes les attaques. Ils demandent des abattages plus nombreux et, pour certains, le déclassement comme espèce protégée. Ils se sont encore mobilisés à plusieurs reprises ces dernières semaines pour faire entendre leur voix : rassemblements à Digne et à Gap le 9 juin, barrage filtrant le 8 juillet dans l'Isère et le 13 juillet dans l'Aveyron sur l'A75.

Changement de Gouvernement mais pas de méthode : la France tue de plus en plus de loups au lieu d'organiser la cohabitation

Communiqué de France Nature Environnement
du 20 juillet 2017


Les experts confirment les risques d’atteinte au bon état de conservation de cette espèce protégée ; les études les plus récentes confirment que les tirs indifférenciés sur des loups, partout en France y compris où il n’y a pas d’élevage extensif, ne permettent pas de diminuer les attaques sur les troupeaux en particulier lorsque ceux-ci ne font pas l’objet de mesures de protection adéquates. Peu importe, plutôt que d’organiser enfin la cohabitation, le nouveau gouvernement poursuit, sous les pressions de lobbies agricoles, la politique à courte vue de son prédécesseur.

Nos organisations dénoncent ce non choix :

  • Qui outrepasse le taux maximum de 10 % de la population estimée présente, soit 360 individus, alors que l’expertise collective rendue, à la demande du précédent gouvernement, par le Muséum National d’Histoire Naturelle et l’ONCFS en début d’année établit que « les prélèvements légaux ne devraient pas, s’ils sont purement additionnels aux autres causes de mortalité, dépasser 10 % de l’effectif estimé pour que la population présente un bilan numérique au moins stable »
  • Qui est fait alors que l’Etat n’a établi aucun bilan des destructions importantes des 3 années précédentes, que ce soit en matière d’efficacité sur la prévention des dommages ou d’impact sur la dynamique de cette espèce protégée
  • Qui n’encadre toujours pas plus rigoureusement les autorisations de tir alors qu’il est établi que nombre d’attaques ont lieu sur des troupeaux non ou insuffisamment protégés
  • Qui privilégie la destruction massive d’individus d’une espèce protégée, au-delà des possibilités dérogatoires, et ne l’équilibre d’aucune disposition de progression de la protection des troupeaux ou d’expérimentations de nature à améliorer les dispositifs de protection.
  • Qui fait fi de l’approche scientifique et est pris sous des considérations politiciennes de court terme, qui ne permettent nullement de créer les conditions d’une co-existence pérenne.

Nos associations demandent que le prochain « Plan loup » 2018-2022 permette enfin au loup, espèce protégée aux niveaux international, européen et français, d’avoir des perspectives de présence pérenne dans notre pays. Et pour cela, il doit donner les moyens aux modes d’élevages qui s’étaient développés hors présence de prédateurs, de s’adapter à nouveau à cette réalité.

Contre toute attente, alors que des changements radicaux avaient été promis, le nouveau gouvernement a loupé la première occasion qui lui été offerte de reprendre ce dossier par le bon bout. Nos organisations continueront à faire des propositions dans ce sens, convaincues que la co-existence entre les prédateurs et un pastoralisme durable est la seule voie d’avenir.

Rédigé par ANAB

Publié dans #Protection animale

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R
Merci Christian de cette information.<br /> <br /> Sur la protection du loup on peu aussi citer :<br /> CAPLOUP<br /> http://www.cap-loup.fr/Citons aussi:<br /> FERUS<br /> http://www.ferus.fr/loup/le-loup-conservation-et-protection<br /> ASPAS<br /> http://www.aspas-nature.org/campagnes/protection/connaissance-et-protection-des-loups/
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C
Je signale l'existence d'un site intéressant sur le loup:<br /> <br /> franceloups.fr
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