Russule rose et l’internet chez les champignons
Publié le 9 Septembre 2017
Nom scientifique : Russula velutipes Velenovsky
Une russule a deux caractéristiques. L’une est d’avoir un pied renflé vers la base et l’autre, la possibilité de pouvoir peler facilement la cuticule. La Russule rose n'est pas très courante. Elle se développe généralement en petites troupes de quelques individus et peu être confondue avec d'autres russules dont la teinte dominante est le rose
Date de l’observation: 4 juillet à Oermingen
Division des Basidiomycota, Famille des russulacées
Chair : ferme et blanche
Sporée : blanche
Habitat: mycorhiziens sous couverts de feuillus ou conifères, à partir du milieu de l'été et jusqu'au milieu de l'automne
Consommation: non comestible
Les russules sont typiquement des champignons dits mycorhiziens. Les mycorhizes sont des associations qui s’instaurent entre les racines de plantes et certains champignons du sol. Elles concernent plus de 95% des plantes terrestres. Développées par les plantes depuis plusieurs millions d’années, les associations mycorhiziennes donnent un meilleur accès aux éléments nutritifs du sol et aide les plantes à mieux résister aux stress environnementaux (sécheresse, salinité, attaque par des agents pathogènes...). Les mycorhizes assurent donc la nutrition minérale mais aussi la protection racinaire des plantes. Le mycélium protège également mécaniquement et chimiquement (via la synthèse d’antibiotiques) les racines.
Il existe différentes types de mycorhizes :
- les ectomycorhizes : le mycelium forme un manchon autour des racines et va jusqu’à s’insinuer entre les cellules du parenchyme cortical des racines (ce qu’on appelle le réseau de Hartig). C’est une mycorhize classique chez les arbres.
- les endomycorhizes (à vésicules et arbuscules) : le mycélium ne forme pas de manteau autour des arbres mais s’insinue entre les cellules et surtout dans les cellules racinaires en formant une sorte de buisson dans les cellules (ce qu’on appelle un haustorium). C’est une mycorhize que l’on rencontre chez toutes les plantes à l’exception des brassicacées, géraniacées et scrophulariacées. Cette mycorhize est facultative chez les cypéracées, poacées et chenopadiacées.
- les ectendomycorhizes qui ont les deux caractéristiques et spécifiques aux éricacées (myrtilles, bruyère, etc.) et monotropacées (monotrope, pyrole, etc.)
- les endomycorhizes spécifiques aux éricacées et aux orchidacées
Connaissez vous l’édaphon ?
L'édaphon est l'ensemble des organismes vivant dans le sol. Ces êtres vivants, participant à la biologie ou à l'écologie du sol, peuvent être des animaux, des végétaux, des champignons, des bactéries. L'édaphon correspond à la biocénose du sol considéré en tant que milieu de vie ou biotope. La mycorhize est une composante majeure de l'édaphon. Ces associations permettent ainsi la constitution d'un sol résistant mieux aux intempéries, stockant mieux l'eau, tout en améliorant la résistance des plantes au stress hydrique et au froid.
Contrairement à une idée répandue, la relation mycorhizienne n'est pas exclusivement symbiotique car les transferts de substances du champignon à la plante n'augmentent pas toujours la valeur sélective et ne sont pas toujours à bénéfices réciproques. Par exemple, dans le cas de l’endomycorhize orchidoïde, le champignon fournit des substances organiques et minérales à une orchidée sans que cette dernière ne fournisse en retour quelque chose au champignon. C’est l’exemple de l’orchidée neottie nid d’oiseau (Neottia nidus-avis) qu’on peut trouver en forêt et qui est incapable de réaliser la photosynthèse.
Des centaines de champignons différents peuvent être associés à une même espèce. Le hêtre, par exemple, détient un « record » avec plus de 200 associations mychoriziennes. Un champignon peut être associé avec plusieurs arbres (le cèpe de Bordeaux Boletus edulis par exemple) mais certains champignons ne sont spécifiques qu’à un seul arbre. C’est pour cela que lorsqu’on détermine un champignon mycorhizien, il est essentiel de savoir quels arbres poussent à proximité. Un bon mycologue n’a pas que le nez collé au sol mais également en l’air.
Comment dialogue les champignons et les plantes ?
Question très difficile pour laquelle on manque encore de connaissances. Des chercheurs ont découvert récemment des molécules de type strigolactones secrétées par les racines, qui pourraient permettre aux hyphes de certains champignons de reconnaître leur hôte.
Les signaux émis par le champignon qui lui permettent d'être reconnu par la plante sont mal connus. Par analogie avec les facteurs Nod qui permettent la reconnaissance entre les racines de fabacées et les bactéries fixatrices d’azote, on appelle ces facteurs fongiques « facteurs Myc ».
La voie de signalisation activée par les facteurs myc présente des étapes communes avec la voie Nod présente chez les légumineuses. Les récepteurs des facteurs Myc ne sont pas connus, mais différentes protéines sont nécessaires. Comme pour la symbiose rhizobienne, le contact avec un champignon arbusculaire induit des oscillations calciques. Les endomycorhizes arbusculaires étant apparues avant les endosymbioses fixatrices d’azote, les chercheurs émettent l’hypothèse que la voie de transduction du signal mycorhizien a été recrutée par les bactéries fixatrices d’azote.
On sait également que le mycélium, via les mycorhizes, permet le transfert de substances d’un arbre à l’autre. Certains chercheurs utilisent la métaphore de réseau Internet souterrain.
En conclusion, sous nos pieds s’offre un monde fascinant de biodiversité et d’ingéniosité. Le sol est une structure vivante et les champignons jouent un rôle essentiel dans son fonctionnement.
Source : http://mycorance.free.fr/valchamp/champi175.htm
Texte, photos, et bibliographie : Gilles Weiskircher (Anab