L’EPR ou la chronique d’un fiasco industriel

Publié le 10 Février 2018

Le chantier EPR de Flamanville accuse huit ans de retard et un budget multiplié par trois.

Le chantier EPR de Flamanville accuse huit ans de retard et un budget multiplié par trois.


Publié dans les DNA le 5/2/2018



Décidément, il est bien compliqué de savoir quand sera mis en service l’EPR de Flamanville (Manche). L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) s’est montrée prudente la semaine dernière sur le calendrier. EDF prévoit de démarrer le réacteur nucléaire de troisième génération fin 2018 pour une mise en service commerciale en 2019. Mais Pierre-Franck Chevet, président de l’ASN, a jugé que « ça sera tendu » et que « ça sera le calendrier de sûreté qui s’imposera ». Le feu vert de l’ASN est en effet indispensable.

L’EPR finlandais a dix ans de retard

Un retard éventuel de plus pour ce chantier qui a multiplié les déboires depuis son lancement en 2007. Contrefaçons sur le béton, deux accidents mortels, un partenaire italien qui jette l’éponge, Bouygues condamné pour travail dissimulé, anomalie de la cuve et du couvercle du réacteur… Résultat : huit ans de retard et une facture qui s’est envolée de 3,3 milliards à 10,5 milliards d’euros.

De quoi s’interroger sur la pertinence économique de cette technologie. D’autant qu’à l’étranger, l’EPR français connaît les mêmes problèmes, voire pire. En Finlande, le projet accuse dix ans de retard et le réacteur ne devrait pas être opérationnel avant mai 2019 pour un budget qui a, là aussi, explosé à 10 milliards d’euros. Le chantier des deux réacteurs EPR d’Hinkley Point en Grande-Bretagne commence à peine que des délais (plus d’un an) et des surcoûts (1,5 milliard) sont déjà annoncés pour une mise en service fin 2025 et un investissement désormais évalué à 22,3 milliards d’euros. La signature de ce contrat en 2016 avait provoqué le départ fracassant du directeur financier d’EDF opposé à ce programme pharaonique.

Malgré ses quatre ans de retard, le premier EPR opérationnel sera finalement celui de Taishan en Chine où EDF est engagé à 30 % dans le programme (7 milliards d’euros) : le démarrage du premier réacteur est prévu dans six mois et celui du second dans un an.

DNA/F.M. 05/02/2018

Des fissures dans le modèle français

« Aujourd’hui, la question n’est plus de savoir si un accident grave est possible en France, mais quand il aura lieu. » Cette phrase pour le moins inquiétante est issue du livre Nucléaire, danger immédiat (Ed. Flammarion enquête) à paraître mercredi, fruit de l’enquête des deux journalistes Thierry Gadault et Hugues Demeude. Le Journal du Dimanche en a publié des extraits dans son édition d’hier. Ils alertent sur l’état de plusieurs cuves qui abritent les réacteurs nucléaires. « Selon EDF, dix cuves en exploitation ont des fissures qui datent de leur fabrication. En général, ces fissures ont été provoquées lors de l’opération de soudure du revêtement en inox qui protège la face interne de la cuve », précisent-ils. Des fissures surveillées de près par EDF car si elles grandissent, elles risquent de percer la cuve. Sauf que d’autres fissures sont apparues ces dernières années, notamment à la centrale de Tricastin (Drôme), « la pire centrale du pays », selon les auteurs puisqu’elle cumule tous les problèmes. En cas de séisme, la centrale, située en contrebas d’un canal, risque l’inondation. « On pourrait aller vers une situation avec quatre réacteurs simultanément en fusion, qui ressemble potentiellement à un accident du type Fukushima », reconnaît l’Autorité de sûreté nucléaire.

Le parc nucléaire français

Il est composé de 19 centrales abritant 58 réacteurs. 48 d’entre eux ont plus de 30 ans. La durée de vie prévue d’une centrale est de 40 ans, mais EDF souhaite la prolonger jusqu’à 50 ou 60 ans dans le cadre de la rénovation du parc baptisée « grand carénage ».

La loi limite déjà la production nucléaire

La loi de transition énergétique plafonne la capacité du parc nucléaire français à 63,2 GW. Cela signifie que la mise en service de l’EPR de Flamanville devra s’accompagner de la fermeture de réacteurs de puissance équivalente : les deux réacteurs de Fessenheim.

Production nucléaire dans le monde

En 2016, la production mondiale d’électricité a progressé de 16 % pour l’éolien et de 30 % pour le solaire, contre 1,4 % pour le nucléaire. Entre 1977 et le 1er  juillet 2017, ce sont au minimum 91 réacteurs (un sur huit) dans 17 pays dont la construction a été suspendue ou abandonnée à différents stades d’avancement. (Source : World nuclear industry status report 2017 ).

 

Rédigé par ANAB

Publié dans #Energies

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