Pourquoi le Parc Régional des Vosges du Nord valide un projet qui détruit des plantes protégées ? 2
Publié le 19 Septembre 2018
A la rédaction de mon article précédent sur ce sujet je n’avais pas toutes les réponses que je me posais et c’est pourquoi j’ai noté plusieurs points d’interrogation.
Le Parc m’a répondu via Sébastien Morelle. Le texte intégral dans son jus est lisible en fin du premier article (cliquer)
Cependant il me manque encore des réponses et démonstrations concrètes.
Si tu arrives, Sébastien, en professionnel compétent que tu es, à me convaincre du bon choix de ton projet d’effacement d’étang, je suis prêt à présenter mes excuses au Parc et aux lecteurs de ce blog d’ avoir écrit cet article.
La forme n’a pas plu mais c’est ma liberté de m’exprimer ainsi et c’était aussi, je le reconnais, une petite provocation pour avoir enfin des réponses. Le temps presse il ne reste que deux mois pour s’opposer administrativement à ce projet.
Ci-dessous l’intégralité du courrier de Sébastien Morelle (Parc Régional des Vosges du Nord ) avec mes réponses et questions à Sébastien sont en jaune
Roland
« Bonjour Roland,
Le mieux quand on ne comprend pas un projet et que l'on a pas suffisamment d'informations pour se faire une idée détaillée et de se renseigner au maximum avant de faire un article.
Quelques remarques suite à ce papier d'une objectivité absolue:
Nous avons essayé d’avoir des renseignements au Parc. Alban votre chargé de mission rivières ne connaissait pas ce projet et quand Alsace Nature vous a téléphonés elle n’a reçu aucun élément factuel pour mieux comprendre ce dossier.
- le parc ne prétend pas travailler au profit de la continuité, il le fait depuis plus de 10 ans...un cinquantaine d'ouvrages hydrauliques (buses, pont, étangs...) ont été réaménagés ou supprimés grâce à son intervention car sans usages et impactant. Nous accompagnons d'ailleurs techniquement les communautés de communes du territoire dans des programmes de travaux ambitieux en matière de restauration des cours d'eau avec des rachats d'étangs et de la mise en œuvre de travaux d'effacement sur de nombreux étangs privés "hors la loi";
C’est très bien d’avoir réalisé tout cela. J’aimerais toutefois remettre ces 50 réalisations en perspective avec l’ampleur du sujet
- nombre d’étangs illégaux sur le territoire du Parc à ce jour
- nombre d’étangs légaux et illégaux sur ce territoire créés depuis la création du Parc en 1975
Vous devez avoir ces chiffres puisque vous faites de la continuité des cours d’eau un cheval de bataille.
- le parc ne porte pas l'opération, il est en conseil auprès du propriétaire privé sur demande de la direction départementale des territoires et de l'agence française pour la biodiversité.
Quand tu dis que le Parc ne porte pas le projet tu joues sur les mots puisque le Parc est conseil du projet et que le bureau d’études a sans doute puisé son inspiration chez vous et prend bien soin de reprendre la ligne du Docob/Natura2000 gérée par le Parc
Il y a sur le site un litige ancien entre le propriétaire est les services de l'état. L'effacement de l'ouvrage a été proposé par le propriétaire pour sortir d'une situation administrative complexe et se mettre en sécurité par rapport à sa responsabilité en cas de crue (ouvrage de vidange plus fonctionnel, digue vieillissante...);
J’ai entendu parler d’une situation administrative complexe et de litige et tu reprends cette explication. Pourquoi ne l’exposes-tu pas à nos lecteurs ? Ils sont majeurs et en âge de comprendre et au moins ce serait du concret. Ils pourraient se faire une idée du bien fondé de la décision d’effacement.
Si le propriétaire n’entretient pas le système de crues ou autres il ne respecte pas les lois en vigueur sur les étangs et cours d’eau.
Ce n’est pas au Parc de lui chercher des subventions pour payer ce que lui doit normalement payer comme propriétaire.
Si les arbres de ma propriété débordent sur la voirie, la mairie ne va pas me proposer des subventions pour tailler mes arbres.
Il s’agit alors d’utilisation abusive de subventions.
- La théorie du complot est amusante, j'aimerais effectivement que tu m'expliques a qui profite l'opération selon toi ;
Je n’ai pas pensé à un complot. J’ai écrit que les avantages financiers obtenus pour les communes ne me paraissaient pas essentiels dans la décision de ce projet et que j’en cherchais les vraies raisons. Oui, à qui profite cette opération car elle ne profite pas l’environnement ni à la biodiversité ?
- Le financement du projet n'est pas à ce jour validé...il ne s'agit en aucun cas d'un contrat natura 2000 et le parc ne finance rien...c'est l'agence de l'eau qui a été sollicité pour le moment;
Natura 2000 a des moyens limités ainsi que le Parc ? Pas étonnant que l’Agence de Bassin soit mise à contribution. Faut-il encore que ce soit légitime.
- Nous avons conseillé au propriétaire de faire une dérogation espèce protégée (passage au CSRPN) et n'avons rien caché de la sensibilité de la station de calla des marais dans la déclaration de travaux...nous avons d'ailleurs prévenu le conservatoire des sites alsaciens très à l'amont du dossier (l'information met visiblement beaucoup de temps à remonter);
Dans le document ne figure aucune trace qu’une demande de dérogation de destruction d’espèces protégée ait été faite
- Restaurer des milieux naturels c'est toujours faire des choix, l’étang en question est une discontinuité majeur sur le cours d'eau (rupture sédimentaires, introduction d'espèces, infranchissabilité piscicole) même s'il est ancien. Tu opposes des objectifs de restauration de la fonctionnalité des cours d'eau (qui sont largement documentés sur le plan scientifique) à la préservation d'une espèce protégée présente en plusieurs point du cours d'eau (et des Vosges du Nord) et cela sans réels éléments objectifs pour prouver que celle-ci risque effectivement de disparaitre. Le calla des marais est une espèce qui se disperse facilement pas détachement du rhizome...plusieurs stations dans les Vosges du Nord sont d'ailleurs d'une spontanéité douteuse.
Cet écosystème fonctionne si bien que le Calla des marais se développe. Les théories de restauration de la continuité écologique reste des théories.
Pourquoi n’appliquez-vous pas en priorité votre théorie aux petits cours d’eau parsemés d’étangs illégaux et dont la biodiversité est gravement menacée par des plantes envahissantes.
Nous sommes soucieux de ne pas mettre en péril l'espèce localement (malgré le procès que tu nous fais) mais ne faire aucun choix n'est pas la solution...un jour ou l'autre la question de la pérennité de l'ouvrage se posera et il faudra de toute manière y injecter de l'argent. Nous allons bien évidemment étudier l'évolution du milieu suite aux travaux, en lien avec la répartition de l'espèce. Les aspects de translocation que tu évoques ne visent pas à sauver l'espèce qui se maintiendra de toute manière dans les zones marécageuses à l'amont et à l'aval mais a éviter l'éventuel dessèchement de certains rizhomes les plus proches de la zone de travaux (approche individu mais pas population). Personnellement je pense que la biodiversité n'a pas besoin du maintien de l’artificialisation des milieux pour se maintenir et que cette conception de la protection de la nature "jardinatoire" a vécu mais il peut y avoir un débat sur cette question.
Au-delà des critiques faciles, nous sommes preneur de propositions concrètes pour limiter l'effet du projet sur le Calla. Nous avons encore le temps d'en discuter rien ne se fera avant l'été prochain. Mais il faudra bosser un peu ton dossier car s'il est assez facile d'attaquer gratuitement l'état, le parc, les établissements publiques sur un blog, il est beaucoup plus compliqué d'argumenter en présence de gens qui ont une assez bonne expérience des suivis écologiques et des travaux de restauration.
Sébastien MORELLE »
Oui c’est d’accord la critique est facile. Alors, stp, fais un travail de pédagogie plus précis.
Tes réponses sont restées vagues et je continue à me faire du souci pour cette station de Calla et cet étang. Pendant ce temps là et pour 2019 notre Région Grand Est a fixé comme objectif de sensibilisation à l’environnement pour le Grand Public, la protection et préservation des zones humides.
Cet étang paysager agrémente la vallée depuis des générations et alimentait un moulin. Il figure sur les cartes très anciennes et personne ne comprend pourquoi c’est devenu pour le Parc, une priorité de le supprimer avec comme conséquence la destruction de plantes protégées.
C’est cela l’essentiel de la question et tu n’y as pas répondu.
Autre sujet important :
Il faudrait aussi parler du devenir de cet étang asséché. Les trois chevaux du propriétaire actuel manquent d’herbe. Ils sont en train de brouter les feuilles des arbres jusque sous la route proche.
Il est certain que le propriétaire de l’étang en perdant l’étang va vouloir récupérer le maximum de surface de pâture pour ses chevaux La queue de l’étang, zone à Calla va être réduite à presque rien et cela tu n’en parles pas du tout ni le dossier.
Je ne doute pas que tu ais bossé le dossier mais dans ta réponse , tu n'as pas apporté d’élément convaincant pour justifier ce projet et me faire changer d'avis .
Liste des espèces de la Znieff disponible sur le site INPN malheureusement date un peu (2004)