Alluvions de la vallée de la Sarre article1 sur 3: son lit mineur, son lit majeur et ses bras-morts
Publié le 6 Octobre 2018
Sur sa marge ouest, l'Alsace Bossue est traversée par la Sarre dont la vallée va s'élargissant vers l'aval. Ainsi entre Schopperten et Herbitzheim s'étend un fond de vallée plane, la Honau, large de 2 km, qui tranche avec le cadre habituel de collines et vallons.
L'objet de ces pages est d'offrir un aperçu sur la structure des reliefs de la vallée, de proposer un scénario de mise en place des formations alluviales qu'on y trouve.
Le fond de vallée: lit mineur, lit majeur et bras-morts (1/3)
A) Aspects topographiques et milieu naturel
Vue sur Herbitzheim depuis l'amont, en rive gauche de la Sarre. Une étendue prairiale parfaitement plane, en apparence, occupe le fond de vallée. La rivière et son lit mineur permanent se trouvent à l'emplacement du rideau d'arbres au pied du village. On devine des sillons (au premier plan et à l'arrière) qui sont la marque d'anciens cours.
Le site de Herbitzheim lors d'une crue hivernale. Le fond de vallée à présent occupé par les eaux de la Sarre en crue constitue le lit majeur. Les eaux chargées en limons laissent sur les végétaux une pellicule de poussières que les pluies ramèneront au sol.
Vestiges d'un bras-mort à proximité de la Sarre actuelle. Cette dépression longiligne de 1 à 2 mètres de profondeur marque l'emplacement d'un ancien cours au sein du lit majeur. Dans ces chenaux, les eaux de crue subsistent pendant la saison froide et attirent souvent une avifaune variée.
Zone d'étalement des crues en hiver, la Honau est assimilable à un ried avec ses dépressions humides occupées par des roselières et cariçaies et ses fossés qui drainent les affluents secondaires de la Sarre. Les bords comportent parfois encore des rangées de saules têtards, véritables monuments d'un autre temps.
Bras-mort dans le lit mineur. A l'opposé des lits anciens situés dans la prairie, des dépressions remplies d'eau en permanence se situent dans le lit mineur de la rivière actuelle. Il peut s'agir de chenaux séparés du cours principal (ce dernier se devine ici dans le fond à droite) par un banc de graviers ou dans d'autres cas de bras-morts issus de méandres abandonnés par recoupement. La végétation arbustive y est riche en saules (ripisylve à bois tendre)
Coupes de deux berges situées à 700 mètres de distance sur le cours de la Sarre entre Sarralbe et Herbitzheim. (hauteur approximative 3 m).
Coupes de deux berges situées à 700 mètres de distance sur le cours de la Sarre entre Sarralbe et Herbitzheim. (hauteur approximative 3 m). L'érosion active lors des crues sape la berge sur le bord concave des méandres et offre une vue directe sur les matériaux constitutifs du fond de vallée. La comparaison des deux coupes offre de grandes similitudes. On distingue depuis le bas, au ras de l'eau (étiage en fin d'été), un premier niveau de graviers partiellement indurés à galets blancs centimétriques, disposés en lits plus ou moins obliques. Ceux-ci passent progressivement à des sables roux à roses. Enfin le sommet de la coupe est constitué d'un ensemble de limons argileux bruns à disposition horizontale sur lequel est installé la prairie. Cette succession est typique d'un remplissage alluvionnaire.
Le soubassement (bedrock) formé dans ce secteur par des marnes bariolées du Keuper inférieur (- 230MA) n'est pas visible dans le lit de la rivière où apparaissent régulièrement des bancs de graviers remaniés. Diverses observations nous apprennent qu'il est affecté de zones de surcreusement -ou selon certains auteurs, de dépressions locales dues à la dissolution de lentilles de sel en profondeur (?)- de sorte que l'épaisseur de la nappe alluvionnaire peut varier entre 3 et 10 mètres. Il affleure à l'Auberg à + 212 m et se trouve à + 203 m au forage de Saltzbronn distant de 1,2 km. Le fond de vallée aurait été creusé lors de la dégradation climatique à l'aube d'une phase glaciaire.
Les sédiments situés à la base témoignent en faveur d'un régime des eaux puissant. Les graviers et sables issus de l'érosion des grès du massif vosgien (secteur du Donon) se déposent en vrac dans un réseau de chenaux en tresses. Progressivement s'installe un chenal unique à méandres qui déborde en déposant des limons d'origine plus locale (Muschelkalk). Ce type d'évolution, analysé en d'autres sites, situe le phénomène en fin de période froide (glaciation) et lors du retour vers un climat plus tempéré (interglaciaire). Vu sa position dans la vallée, cet épisode est à relier à la dernière glaciation (Würm : – 70000 à – 10000 ans).
Schéma illustrant la formation d'un fond de vallée et d'une terrasse attenante. Le premier plan en couleur constitue le plan de coupe. Stade initial (en haut), sous climat tempéré, un fond de vallée alluviale est drainé par un cours d'eau. La présence de végétation limite l'érosion. Stade suivant : le climat se dégrade, la température baisse, le manteau végétal diminue d'abord en altitude alors que les précipitations augmentent, l'érosion devient très active et entame les sédiments meubles ainsi que le soubassement. Stade final, pendant la période froide (glaciation) et lors de la déglaciation, les masses d'eau libérées érodent les débris rocheux fragmentés par le gel. Ils se déposent dans la vallée en contrebas des précédents qui forment une terrasse.
Texte, photos (sauf mention) et bibliographie Etienne Feuchter (Anab)
Liens vers les 2 articles précédents du sujet alluvions de la Sarre
Alluvions de la vallée de la Sarre article1 sur 3: son lit mineur, son lit majeur et ses bras-morts |
Alluvions de la Sarre (3/3) : Histoire de la formation de la vallée de la Sarre
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Bibliographie à paraitre chap 3/3
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