Lichens, champignons en interaction épisode 4 : la stratégie mycorhizienne (et Cladonia digitata)

Publié le 1 Décembre 2018

Cladonia digitata  Photo Gilles Weiskircher (Anab)

Cladonia digitata Photo Gilles Weiskircher (Anab)

Nom scientifique : Cladonia digitata (L.) Hoffm.

 

Date de l’observation: 11 juillet 2018 à Herbitzheim


Classification: Division des Ascomycota, famille des Cladoniaceae

 

Biotope : sur souches pourrissantes, base de troncs de conifères, parfois sur sol ou rocher acide. Espèce commune

 

Etymologie:  Cladonia vient du grec klados « rameau », allusion aux ramifications du thalle secondaire de certaines espèces.

Caractères généraux : c’est  un genre de champignons lichénisés comportant de très nombreuses espèces. Il s'agit toujours de formes dressées et essentiellement terricoles, c'est-à-dire se développant sur un sol.

 

Voir l’article de l’association consacré à ce genre : http://naturealsacebossue.over-blog.com/2015/12/les-lichens-cladonia.html

 


 

Cladonia digitata  Photos Gilles Weiskircher (Anab)
Cladonia digitata  Photos Gilles Weiskircher (Anab)

Cladonia digitata Photos Gilles Weiskircher (Anab)

La mycorhize, une stratégie adaptative et parcimonieuse

 

Dans le sol, on peut compter jusqu’à 1 km d’hyphes par mètres de racine. Un filament de champignon coûte 100 x moins cher à produire qu’une longueur équivalente en racine. De plus, le filament permet d’explorer davantage de volume de sol. Par conséquent, la mycorhize est physiologiquement moins chère à mettre en place et permet d’aller partout. Par exemple, on trouve des hyphes de champignons ectomycorhiziens dans les granits des podzols, capable de dissoudre les minéraux de la roche. Les hyphes permettent ainsi à la plante de profiter de ressources inaccessibles aux racines seules. Enfin, les hyphes des ectomycorhizes arrivent aussi à puiser des minéraux dans la matière organique du sol.

Dans les régions tempérées, les périodes hivernales ne permettent pas une dissolution naturelle efficace des roches. L’ectomycorhize est donc une adaptation des régions tempérées.

 

La mycorhize, une stratégie ancienne pour prendre pied sur le sol.

 

Il y a près de 500 millions d’années les plantes s’aventurent sur le milieu terrestre. Pour coloniser la surface de la Terre, les premières plantes ont acquis des structures leur permettant de survivre hors de l’eau. Elles ont mis en place une cuticule ou revêtement cireux étanche, des éléments de conduction et des spores pour leur dispersion. Pour obtenir les éléments minéraux dont elles avaient besoin et qui ne se trouvaient pas à l’état dissous dans le sol, on pense qu’elles se sont associées à des champignons.  À cette époque les plantes n’ont pas de racines mais on trouve déjà des champignons qui nourrissent ces plantes. Les 1eres ectomycorhizes apparaissent il y a 50 millions d’années.

La mycorhize serait ainsi à l’origine de la colonisation de la terre par les plantes aquatiques.

 

Des études récentes montrent que les plantes peuvent discriminer entre différents champignons et permettent le transfert de plus de carbohydrates vers les champignons qui fournissent le plus de sels minéraux et réciproquement le champignon transfère plus de sels minéraux vers les plantes qui lui fournissent le plus de sucres ! Ce cycle vertueux permet donc que l’association mutualiste se perpétue sans que l’un des deux partenaires ne finisse par être mis en esclavage par l’autre.

 

Comment se met en place la mycorhize ?

 

La mise en place de l’organe mixte fait intervenir des messagers moléculaires. Dans le cas des endomycorhizes, cas où les hyphes pénètrent dans les tissus des végétaux, les racines secrètent des molécules, les strigonolactones reconnues par les champignons. Ces derniers émettent en réponse des « facteurs myc » (constitués de morceaux de chitine), reconnus par la plante. Toutes les plantes terrestres possèdent des gènes permettant la reconnaissance des « facteurs myc »», ce qui suggère que l’ancêtre des plantes possédait également ces gènes. Pour les ectomycorhizes, on ne connaît pas encore le mécanisme de mise en place.

Le plus surprenant aussi est que ces « facteurs myc » sont ressemblants aux « facteurs nod », nod comme nodulation, utilisés chez les fabacées pour la mise en place des nodules racinaires de fixation de l’azote. On pense donc que ces gènes sont dans un premier temps intervenus pour le contrôle des mycorhizes et par la suite ont été utilisés par les légumineuses pour le contrôle de la formation des nodules de fixation de l'azote.



Texte, photos, et bibliographie : Gilles Weiskircher (Anab)



 

Source:

https://www.youtube.com/watch?v=pmjWysrPyJI

https://www.afl-lichenologie.fr/Photos_AFL/Photos_AFL_C/Textes_C/Cladonia_digitata.htm


Facteurs myc et nod :
https://www6.inra.fr/asirpa/content/download/4712/46476/version/1/file/Fac%20Nod%208p%20FR.pdf

Rédigé par ANAB

Publié dans #champignons

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R
Merci Gilles de ce beau tour très pédagogique des incroyables liens entre les plantes et les champignons. Curieux d'en découvrir encore plus.
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