Lichens et champignons en interaction épisode 7bis : voyager (et Graphis scripta)
Publié le 22 Décembre 2018
Nom scientifique : Graphis scripta (L.) Ach
Date de l’observation: 26 mars 2018 à Keskastel
Classification : Division des Ascomycota, famille des Graphidaceae
Description :
Un lichen très commun sur les arbres à écorce lisse. Il se remarque par ses fructifications ressemblant à des hiéroglyphes éparpillés. Ces fructifications sont plus ou moins grandes, pouvant mesurer de 2 à 7 mm de longueur. Elles n'excédent généralement pas une largeur de 3/10èmes de millimètre. Elles peuvent parfois se présenter comme de simples traits non ramifiés (surtout sur les bouleaux) mais sont le plus souvent formées de plusieurs "lirelles" (apothécies) jointives, irrégulières généralement pointues aux extrémités. Dans cette dernière forme, c'est surtout sur le bois de hêtre que ce lichen peut être observé. C’est un genre assez difficile nécessitant le microscope pour l’identification.
Pour le champignon qui vit sous forme de fins filaments dans le sol, se pose d’emblée la problématique de pouvoir disséminer ses spores ou son mycélium ailleurs. Pour y répondre, les champignons ont élaboré plusieurs stratégies. Certains fabriquent une structure aérienne, le carpophore, (le champignon des dessins animés) pour s’affranchir du sol et disséminer les spores à l’air libre. D’autres fabriquent leur carpophore dans le sol et attirent les animaux par des odeurs pour être mangés et ainsi disperser les spores via les animaux. C’est le cas des truffes. Dans ce domaine, les champignons ne manquent pas d’imagination. Dans cet épisode, nous allons voir comment le champignon se sert d’un oiseau pour voyager.
De nombreux animaux ont besoin de cavités dans les arbres pour nidifier, se nourrir, se protéger des prédateurs ou se réfugier pendant la nuit. Ces anfractuosités abritent des mammifères comme les écureuils ou les chauve-souris, mais aussi des reptiles, des oiseaux, ainsi que de multiples invertébrés. En revanche, seuls certains de ces animaux sont capables de fabriquer ces cavités. Les autres sont opportunistes : ils utilisent des trous naturels, ou ceux fabriqués par les membres d'une autre espèce. De ce fait, des écosystèmes entiers dépendent de ces cavités.
Les oiseaux excavateurs, comme les pics, s'attaquent à des arbres morts, plus faciles à creuser. Le trou est terminé en quelques semaines et sert durant une année. Le pic à face blanche (Picoides borealis), par contre, adopte une autre stratégie. Dans les forêts de pins des marais du sud-est des États-Unis, il creuse des arbres vivants. L'excavation du nid dans un arbre peut être facilitée par la présence, sur la zone à creuser, de champignons parasites. Du fait de la présence de ce champignon, le tronc de l'arbre pourrit, le bois devient donc plus tendre.
L'association entre le pic et les champignons était observée depuis longtemps, mais son explication demeurait floue. Deux hypothèses s’affrontaient : soit les pics choisissaient les arbres à creuser selon la présence de champignons parasites, soit ils propageaient eux-mêmes l'infection fongique. Cette deuxième hypothèse a été confirmée dans une étude américaine publiée en mars 2016. Il existe donc bien une association symbiotique complexe entre l'oiseau et plusieurs groupes de champignons.
Une belle manière aérienne utilisée par le champignon pour se propager d’un arbre à l’autre et une aide non négligeable pour l’oiseau afin de construire ses cavités.
Texte, photos, et bibliographie : Gilles Weiskircher (Anab)
Source:
https://www.sciencesetavenir.fr/animaux/oiseaux/le-pic-creuse-plus-vite-un-tronc-d-arbre-grace-a-un-champignon_102971
https://www.afl-lichenologie.fr/Photos_AFL/Photos_AFL_G/Graphis_scripta.htm