Le Petit monarque et les migrations du Grand monarque
Publié le 18 Septembre 2019
Petit Monarque (Le) (Danaus chrysippus) Photos Hans Jürgen Blum (Anab) et sa répartition sur la france métropolitaine
Son cousin, le Grand Monarque, est beaucoup plus célèbre pour ses migrations outre-Atlantique. Il est présent dans huit départements de métropole en particulier dans 4 départements côtiers de l’Atlantique, du Morbihan à la Charente mais aussi dans les départements des Antilles et la Nouvelle Calédonie.
Roland
Nom scientifique : Danaus chrysippus (Linnaeus, 1758)
Nom allemand : Kleinermonarch
Origine du nom : viendrait du grec «danaos » le roi d’Argos de l’Antiquité qui régnait sur la Lybie et eut (de plusieurs femmes), cinquante filles les danaïdes
et son nom d’espèce, de « chrysippus» , sans doute le nom de l’une de ces cinquante filles ou le nom de l’un des cinquante fils d’Aegyptos, frère de Danaos et qui a donné son nom au pays Egypte..
Son nom commun en français « monarque », viendrait du nom donné par un américain à ce papillon. Le nom
ferait référence aux princes d’Orange en raison de sa couleur
Voir à ce sujet, aussi l’article très détaillé sur le blog de JY Cordier, et très intéressant en général sur l’origine des noms d’animaux.
Observation : le 6 juin à Nice
Classification : fait partie de la famille des Nymphalidae qui comprend , le Paon du jour que tout le monde connait ainsi que le Vulcain, les nacrés, ces grands papillons oranges de forêt.
Cette famille compte tout de même 5000 espèces différentes de par le monde dont seulement 70 vivent en Europe !
Points communs : ces papillons de jour sont de taille moyenne et ont des couleurs très vives.
Ils ont la particularité de ne marcher que sur 4 pattes, les deux premières étant trop petites.
Dimensions: envergure 70 à 110 mm. Poids 0.5 gramme.
Description: ce papillon se caractérise par des nervures noires très apparentes sur un fond orangé vif variable. La face interne des ailes est identique mais en moins intense.
Le corps et même la tête du papillon sont noirs mouchetés de blanc ce qui est tout à fait unique chez les papillons présents en France.
A noter que les mâles sont plus colorés que les femelles, plus grands et possèdent comme d’autres papillons une tache androconiale sur la nervure centrale au milieu des ailes postérieures.
Cette tache contient des écailles odoriférantes qui émettent des substances attractives pour les femelles.
Période d’observation mai à octobre chez nous ou toute l’année dans certains pays africains et aux Canaries
Reproduction:
La femelle pond des œufs de 1.5 mm de manière isolée, sous les feuilles de sa plante hôte préférée, en France la Scammonée de Montpeller (Cynanchum acutum) de la famille des asclépiadacées regroupées depuis peu avec les apocynacées (pervenche). Nous avons une plante de cette famille un peu partout en métropole, le Dompte venin, pour ceux qui la connaissent.
La survie des œufs est faible : 84% sont perdus via la prédation par des coccinelles, fourmis, araignées, blattes..
Nourriture des larves: Les chenilles issues des œufs sont voraces et dévorent toute la plante, feuilles, fleurs, tiges et fruits ! Cette plante et ses congénères contiennent des substances toxiques de type alcaloïdes sans effet sur le monarque
Les chenilles grossissent et la taille finale atteint 7cm..
Sa couleur est contrastée un peu à la manière du Machaon : jaune annelé de noir avec deux filaments noirs aux extrémités. Elle attire l’attention des prédateurs pour leur rappeler qu’elle est toxique, grâce à tous les alcaloïdes et dérivés provenant de sa plante hôte. Les éventuels prédateurs évitent de l’avaler même par accident. Ce phénomène d’avertissement, ou aposématisme, est valable aussi pour d’autres espèces animales que les insectes, comme la salamandre, le Sonneur à ventre jaune et d’autres…
Quelques prédateurs sont immunisés contre les poisons contenus dans les monarques, leurs chenilles et leurs adultes imagos, comme le Grosbec, les guêpes et quelques autres. En fin de cycle et après 6 mues successives, la chenille se transforme en chrysalide jaune-clair brillant laquelle se transforme en papillon après 10 jours.
Biologique et activité
La durée de vie adulte est de 2 à 3 semaines mais toute l’année dans les pays tropicaux où il réside comme aux Canaries.
Le Petit monarque est actif toute la journée. Il vol au ras du sol de manière lente pour se faire identifier et avertir les prédateurs de sa toxicité.
Il effectue de petites migrations dans les pays chauds pour mieux suivre ses végétations préférées.
Nourriture des adultes : au contraire de leurs chenilles les papillons ne sont pas inféodés à une espèce et butinent différentes fleurs et boivent leur nectar
Il semblerait aussi qu’il affectionne les sénéçons dont le Sénéçon du Cap, Senecio inaequidens, plante invasive en France. Cette plante est riche en alcaloïdes de la pyrrolizine, hépatotoxiques et cancérigènes connus.
Ces différentes substances, des asclépiades et sénécons, transformés en cardénolides, substances cardiotoxiques seraient les précurseurs des hormones sexuelles, pheromones, libérées par le mâle pour attirer les femelles. …
Habitat: biotopes divers avec asclépiades et quelques autres plantes, lieux broussailleux et arides à proximité des jardins.
Prédateurs: chauve souris, oiseaux
La prédation des œufs (84%) et des larves (97%!) est énorme.
Protection et dangers :
Ce papillon n’est pas protégé par la législation française à ce jour.
Difficile de parler du Petit Monarque sans parler du Grand Monarque et de sa migration. La biologie et l'aspect du Grand monarque sont voisins de celle du Petit monarque.
Migration du Grand Monarque (Danaus plexippus) :
Le Grand Monarque est présent dans toute l’Amérique du Nord jusqu’au Canada ;
Il hiverne dans les réserves de sapins sacrés de l'état du Michoacán au Mexique soit à plus de 3 et 4000 km du Canada ;
Ceci implique qu’il se reproduit au cours de ses migrations quand il remonte vers le Nord après l’hivernage.
En Australie et Californie où il est présent, le monarque fait aussi des migrations mais nettement moins importantes, quelques centaines de km pour profiter de la végétation toute l’année..Ses possibilités de migration améliorent ainsi sa reproduction et son implantation.
La durée de vie adulte est de 5 à 8 semaines mais plus de 7 mois quand il entame sa migration.
Dans cette phase, le développement sexuel est stoppé et le papillon consacre toute son énergie à la migration.
.
Performances de la migration
Les population de monarques de toute l’Amérique du Nord convergent au seuil de l’hiver vers la zone de refuge. Celles de l’est passent tous par le Texas.
C’est grâce à un vol plané beaucoup moins énergivore (20 fois moins) qu’un vol battu que le monarque arrive à préserver ses ailes, son énergie et ses graisses d’hiver. Il parcourt ainsi à une moyenne de 18 km/h d’énormes distances porté par les courants ascendants jusqu’à plus de 1200 m d’altitude et se laissant planer sur des km en cas d’absence.
Des chercheurs ont montré que le monarque est capable d’évaluer les journées de vent favorable à sa migration. Soit il stoppe sa migration par exemple pour traverser l’énorme lac Erié de la zone des Grands Lacs, soit il la continue au ras du sol ou plus étonnant encore il se charge en eau pour contre balancer la direction du vent si elle est défavorable.
Arrivé dans ses lieux d’hivernage au Mexique il y est inactif et des millions d’individus recouvrent complètement certains arbres. (voir photo)
Quand la température redevient favorable, les vols vers le nord reprennent avec des nuages de papillons.
Orientation :
comment fait le Grand monarque pour retrouver à 4000 km de distance une petite zone d’hivernage de moins de 100 km carrés ?
Le plus probable est qu’il utilise le soleil comme le font les abeilles grâce à la lumière polarisée donc même à travers les nuages. Il semblerait qu’il utiliserait aussi d’autres techniques comme le positionnement grâce aux astres, le géomagnétisme ou l’odorat. Pour le géomagnétisme, c’est grâce à des particules de fer aimantées dans le cerveau que certains insectes sont capables de s’orienter sur les variations de champ magnétique terrestre.
Le monarque utilise sans doute une combinaison de ces "techniques " et un apprentissage inscrit dans son ADN.
Des recherches ont montré qu’il possède aussi une horloge dans ses antennes qui rythme les jours et améliore ainsi son guidage et sa trajectoire..
Ce papillon est protégé au niveau mondial car en danger.
L’alerte a été donnée sur la survie du Grand monarque quand ses populations se sont drastiquement effondrées en 2013-2014, soit des effectifs divisés par 20 et 30.
Protection des lieux de migration
Différents organismes dont le wwf se sont alors préoccupés de la sauvegarde de cette espèce emblématique. Une des premières actions a été d’intervenir auprès du Mexique pour qu’il protège les précieuses réserves de" bois sacrés" au Mexique, où il hiberne et contre la déforestation et le tourisme.
Le monarque est menacé par l’agriculture intensive qui détruit les plantes sauvages et par les pesticides. Ses plantes hôtes se sont raréfiées. Il a été démontré en plus que le maïs transgénique type bt est toxique pour les chenilles du Monarque.
D'autres recherches scientifiques ont été entreprises pour mieux connaitre sa biologie et intervenir sur sa survie.
Origine des papillons, comment la trouver?
L’une des recherches pour mieux le protéger a été de savoir d’où viennent les différents monarques du Mexique et ceux trouvés ici ou là tout au long de leur migration en Amérique du Nord.
L’idée a été d’utiliser les isotopes de l’eau et en particulier ceux de l’hydrogène. Les isotopes sont des atomes d'un élément qui ont le même nombre de protons mais un nombre de neutrons différents de l'élément de référence. Ils sont rares et se différencient par leur poids et quelquefois des propriétés physiques différentes. L'eau lourde bien connue utilisée dans les réacteurs nucléaires est une eau riche en hydrogène à deux neutrons.
Cette technique isotopique est utilisée avec succès pour localiser avec une très grande précision l’origine des plantes, à quelques centaines de km près ou encore ou moins.
Les isotopes varient selon le lieu et en particulier selon la température, le sol et l’évaporation. Le rapport (ratio) des différents isotopes de l’hydrogène et ceux de l’oxygène sont caractéristiques et uniques pour un lieu donné.
Comme le papillon mange une plante hôte qui contient de l’eau d’un lieu précis, cette eau est une véritable " empreinte digitale" du lieu avec ses quantités d' isotopes d’hydrogène et oxygène.
Il est donc possible de dire d’où vient un papillon en analysant le contenu de l’eau qui a servi à fabriquer ses tissus du moment qu’il existe une base de donnée isotopiques de référence sur les isotopes de l’eau de différents lieux.
Photos : Hans Jürgen Blum (Anab)
Texte, bibliographie Roland Gissinger (Anab)
Webographie
https://papiliorama.ch/fr/encyclopedie/danaus-chrysippus-2/
https://de.wikipedia.org/wiki/Kleiner_Monarch
La très intéressante migration des Grands monarques sur insectes.org
Tout sur le Grand Monarque mais en anglais monarchwatch
Programme du wwf surle Grand monarque