Les plantes souffrent aussi ?
Publié le 24 Février 2020
Les commentaires du blog sont à nouveaux OUVERTS
Paru sur Echosciencesgrenoble le 16/4/2019
Longtemps les plantes ont été considérées comme une forme de vie statique et passive, mais les découvertes scientifiques de ces dernières années bouleversent notre imaginaire collectif sur celles-ci. Les plantes ne sont certainement pas des êtres vivants qui réagiraient uniquement de façon stéréotypée. Je vous propose dans les prochains paragraphes, d’effleurer le sujet des compétences des plantes ainsi que leur manière d’évaluer leur environnement.
Qui sont les plantes ?
Elles sont tout d’abord des êtres de lumière, façonnées pour percevoir l’énergie lumineuse. À titre comparatif, on compte 14 types différents de photorécepteurs chez la plante alors que nous en possédons seulement 4 (Chamowitz, 2012). Les plantes sont aussi sensibles aux odeurs, elles peuvent émettre des substances chimiques volatiles lors d’une attaque par des insectes, ce qui a une répercussion sur les plantes environnantes. Cette perception de substances volatiles permet même à certaines plantes d’orienter leur croissance. L'émission de composés volatils joue aussi un rôle crucial dans l’interaction des plantes à fleurs avec des pollinisateurs, notamment pour les attirer et augmenter ainsi leurs chances de disperser leur pollen (Labandeira Kvacek & Mostovski, 2007). Le son est également perçu par les végétaux. Mais attention, ce n'est pas le style de musique écoutée qui leur fait de l’effet mais les fréquences sonores dont la musique est formée. Ces fréquences peuvent favoriser la germination de leurs graines, leur croissance, ou l'allongement de leurs racines, mais aussi avoir des effets inhibiteurs (Hassanien et al., 2004). Pour les plantes le son n'a qu'une dimension vibratoire.
En tout, il a été démontré que les plantes peuvent percevoir au moins 20 paramètres physiques et chimiques dont, entre autres, le taux d'humidité, les champs électromagnétiques, des gradients électriques, des gradients chimiques, la pesanteur (Morot-Gaudry & Prat, 2012). On pourrait dire que ce qu’elles perdent en mobilité à ne pas avoir de jambes ou de pattes, elles le gagnent en souplesse génétique. En d’autres termes, puisqu’elles sont des organismes sessiles, c’est-à-dire des organismes fixés au sol, elles doivent percevoir les signaux environnants avec une sensibilité et discrimination accrues en comparaison avec les animaux (Trewavas, 2009).
Les incroyables capacités des plantes
Les plantes se défendent de leurs prédateurs grâce à des stratégies sophistiquées qui impliquent souvent l'intervention d'autres espèces. Elles savent chasser ou séduire des animaux. Poelman et al., (2012) ont montré que des guêpes trouvent leurs victimes, dans ce cas-là des chenilles, grâce aux substances volatiles émises par le chou en réponse à une attaque de ces dernières. Les guêpes pondent leurs larves dans le corps des chenilles. Quand les larves éclosent, elles dévorent les chenilles de l’intérieur. Désormais, il n’y a plus grand monde pour attaquer le chou. Mais la séduction peut prendre d’autres formes bien différentes. Un des exemples le plus frappant est celui de l’orchidée Ophrys bombyliflora. Elle produit un gros pétale qui mime un bourdon et elle produit également des molécules équivalentes à des phéromones, afin d’attirer des vrais bourdons. Trompés, ils vont essayer de s’accoupler avec le pétale et au passage, transporter le pollen de la fleur. Cela ne marche pas bien pour la reproduction du bourdon mais très bien pour la reproduction de l’orchidée (Francisco & Ascensão, 2013).
Certaines plantes sont également capables de se camoufler dans le paysage. C’est le cas de Boquilia trifoliolata, une vigne grimpante des forêts tropicales tempérées, qui imite les feuilles de ses hôtes de support en termes, par exemple, de taille, forme, couleur, orientation, longueur du pétiole, réduisant ainsi ses chances de se faire manger (Trewavas, 2016).
D’autres découvertes fascinantes ont été faites par la chercheuse Monica Gagliano. En 2014, elle et ses collègues ont montré que la plante Mimosa pudica peut se désensibiliser à des fausses agressions.
Une autre étude en 2016, a montré un comportement surprenant des petits pois. Un courant d’air envoyé par un ventilateur qui prédisait l’emplacement d’une source de lumière, dirigeait la croissance du petit pois dans la bonne direction. Un comportement qui pourrait être qualifié d’apprentissage associatif. s.
Les plantes se comportent différemment des animaux et c’est là que réside leur beauté.
Des mouvements d'ions calcium appelés « des ondes de calcium » apparaissent chez tous les êtres multicellulaires dont les plantes, qui ont aussi des potentiels électriques similaires à ceux du règne animal, seuls les animaux présentent une activité neuronale. Cette activité est responsable des fonctions cognitives telles que la pensée ou la capacité à avoir l’expérience subjective de la souffrance (Pereira & Alves, 2019). Il est clair qu’il existe des mécanismes communs à tout le vivant.
La souffrance des plantes, aussi hypothétique qu’inexistante.
Il n’y a tout simplement aucune étude scientifique qui trouve la moindre trace de douleur chez les plantes ni même des études qui le suggéreraient.
Il n‘y a aucun doute, les cellules réagissent à des signaux associés à une blessure, mais être sensible à une blessure ne prouve en rien qu’il y ait une souffrance qui en découle. Par exemple, Antoine Larrieu a observé lors d’une étude sur la réponse des plantes aux agressions en 2014 qu’il suffisait «de déposer un broyat de plante sur une feuille pour déclencher une réponse à la blessure. Cela permet notamment à la plante de se préparer à d’éventuels dommages supplémentaires».
Conclusion
L’idée que les plantes seraient des êtres moins intelligents et moins évolués que les animaux est totalement obsolète aujourd’hui. Tous les êtres vivants qui habitent aujourd'hui la Terre, que ce soit des plantes, des champignons, des animaux ou des bactéries, ont atteint l'apogée de leur processus évolutif sans quoi ils se seraient éteints.