Loi Climat : les jeunes militants toujours sur le terrain malgré le stop de la préfecture
Publié le 16 Avril 2021
Paru sur Reporterre le 9/4/2021
Des jeunes militants écologistes qui avaient entamé un dialogue sur la loi Climat avec les députés devant l’Assemblée nationale ont été verbalisés mercredi 7 avril pour « manifestation illégale ». Loin de se décourager, ils ont fait appel à leur créativité pour poursuivre leur mobilisation. Reporterre a suivi leurs pérégrinations.
Paris, reportage
Des jeunes réunis devant les plus grandes instances législatives françaises pour discuter de la fabrique de la loi. L’image est belle, et on en oublierait presque le micmac qui entoure les rassemblements quotidiens de militants écologistes à Paris pour discuter du manque d’ambition de la loi Climat.
« On a décidé de venir tous les jours devant l’Assemblée lors des séances plénières et de proposer aux députés de discuter et de témoigner de ce qui se passe avec nous », résumait simplement à Reporterre Julie Pasquet, 23 ans, présidente de Together for Earth et vice-présidente du Refedd [1].
Las, depuis le 6 avril, cette mini-agora a été décrétée illégale par le préfet de police de Paris.
« En tant que citoyens et citoyennes, nous avons une voix et nous sommes persuadés que la démocratie ne se réduit pas à l’Hémicycle. Elle se vit aussi dans l’espace public, avec les citoyens, expliquait Julie Pasquet.
Depuis le 29 mars, date de la première séance plénière pour l’examen de la loi Climat, une quinzaine de députés, d’adjoints ou encore d’élus de la mairie de Paris sont venus échanger avec eux sur des sujets divers, allant de la rénovation énergétique à l’usage des engrais azotés ou l’affichage publicitaire. Au total, entre 100 et 150 personnes se sont relayées la première semaine place du Président-Édouard-Herriot, à proximité de l’Assemblée nationale.
« Nous venons demander aux députés un effort pour nous assurer un avenir vivable »
« Nous n’avons jamais eu autant de dialogue avec les élus que depuis que nous avons commencé cette action », remarquait Hugo Viel, 22 ans, militant écologiste qui travaille sur la loi Climat pour le mouvement Maintenant ou jamais.
D’où leur déception face à la décision du préfet. Alors que la demande à la préfecture avait été acceptée, le préfet de police de Paris Didier Lallement a en effet levé l’autorisation en raison de la crise sanitaire. « Cela fait un an que nous sommes enfermés par solidarité envers les plus âgés. Nous venons à notre tour demander aux députés un effort pour nous assurer un avenir vivable. Et en réponse, on nous explique qu’on ne peut pas être écouté et que nous n’avons pas le droit d’être là », déplore Hugo Viel, l’un des initiateurs de la mobilisation. De quoi plomber la dynamique créée par les jeunes, qui doivent dire adieu au temps d’écoute qu’ils réussissaient à glaner aux députés lors de leur sortie entre deux séances.
Pas découragés, les militants, dont Camille Étienne, Hugo Viel, Lou Garcia, Stacy Algrain, n’ont pas baissé les bras. Pour contourner l’interdiction, ils ont dès le lendemain, le 7 avril, décidé d’enfiler leur tenue de sport et de s’arrêter derrière l’Assemblée, à quelques pas près de la station Invalides. Plusieurs députés ont joué le jeu et les ont rejoint, allant jusqu’à faire quelques minutes de gainages pour montrer leur bonne foi. « La police nous a très rapidement encerclés, et nous avons tous été verbalisés de 135 euros pour manifestation illégale, témoigne Julie, présente ce jour-là. Nous avons déposé un référé au tribunal administratif, car il est anticonstitutionnel d’interdire une manifestation. Il y a un vrai enjeu derrière de liberté d’expression et de liberté de manifester : libertés qui nous ont été enlevées. »
Avant de revenir près de l’Assemblée nationale, c’est en face du Sénat que se sont retrouvés, jeudi 8 avril, une vingtaine de jeunes. Sur la petite place en face du monument, les parlementaires s’étaient répartis en groupes de six — mesures sanitaires obligent — pour répondre aux interrogations des jeunes militants. « Nous savons qu’il y a une attente très forte de la part des citoyens. C’est pourquoi la pression qu’exercent ces jeunes est importante. En tant que sénateur, je considère que cela fait partie de ma mission d’entretenir ce lien. Ces échanges enrichissent mon travail parlementaire », assurait Guillaume Gontard, sénateur de l’Isère et président du groupe écologiste Solidarité & Territoires.
Epilogue
Franceinfo le 13 avril à 18h50
La justice donne tort au préfet de police de Paris,
qui avait interdit par arrêté les manifestations
quotidiennes de militants écologistes à proximité de
l'Assemblée nationale, pendant l'examen du projet de
loi "climat et résilience".
Aux yeux du juge des référés, le motif sanitaire
invoqué n'était pas suffisant, ces rassemblements
en plein air se passant sur une vaste place avec
"au maximum une vingtaine de personnes.
Pourquoi maintenir des fonctionnaires plus
que zélés à ce type de poste?
Ce sont des méthodes de pays arriérés.