Sur une feuille épisode 2 : les galles à Neuroterus
Publié le 8 Mai 2021
Date et lieu de l’observation: 12 septembre 2020 à Woustviller, orée d’une forêt de feuillus sur feuille de chêne pédonculé (Quercus robur)
À qui sait les observer, les feuilles des plantes ont souvent une histoire à nous raconter, des observations à nous livrer. À travers plusieurs épisodes je vais vous emmener à la découverte de plusieurs curiosités naturalisées sur des feuilles d’arbres et vous propose de changer votre regard sur la feuille.
Après un champignon au cycle étonnant sur une feuille d’érable, partons à la rencontre d’un groupe de minuscules guêpes responsables de galles sur une feuille de chêne, des guêpes du genre Neuroterus.
galles sur une feuille de chêne provoquées par des guêpes du genre Neuroterus.- Photo Gilles Weiskircher (Anab)
C’est une surprenante palette de formes surprenantes qui apparaissent sur cette feuille de chêne et, en y regardant de plus près, ce sont trois galles différentes qu’on peut distinguer.
Une galle, appelée scientifiquement une cécidie, est une excroissance tumorale structurée produite sur les tiges, feuilles, racines ou fruits et qui se développe autour d’un parasite de la plante. Ce parasite peut être un animal, un champignon, une bactérie, etc. La galle est principalement induite par la piqûre d’un insecte lorsqu’il pond un œuf dans la plante. La galle joue un double rôle pour l’organisme qui se développe en elle : un rôle de protection mais aussi un rôle nutritionnel. La galle est un en fait un parasitisme très évolué, en général peu défavorable pour la plante. L’étude des galles est tout un domaine des sciences naturelles qu’on nomme la cécidologie. On ne confondra pas la galle avec la domatie, qui est une structure végétale adaptée pour accueillir des insectes.
Pour être rigoureux, il faut désigner par galle l’enveloppe créée par le végétal en réponse à l’action d’un insecte inducteur de galle ou gallicole, plus précisément la larve de cet insecte, qui après son développement, finira par sortir de la galle en perçant un trou.
Pour les galles dont on fait l’objet cet article, l’insecte gallicole est donc une minuscule guêpe de 4 à 5 mm et appartenant à la famille des cynipidés. Celles associées aux chênes ont un cycle de vie complexe comme on va le découvrir après.
Les galles en lentilles
Elles sont dues à Neuroterus quercusbaccarum. En automne, les galles tombent avec les feuilles et va émerger en mars de minuscules guêpes asexuées. Ces guêpes vont pondre ensuite des œufs sur les bourgeons des chênes (des œufs issus d’une parthogenèse, sans reproduction asexuée) pour donner en avril des guêpes sexuées qui iront pondre sur les feuilles des chênes pour redonner des galles en lentilles.
galle en lentille à Neuroterus quercusbaccarum , loupe binoculaire x15- Photo Gilles Weiskircher (Anab)
Les galles en bouton
Elles sont dues à Neuroterus numismalis. Comme pour la galle précédente, le cycle fait intervenir deux générations de guêpes, asexuées et sexuées.
Les galles à contour lobé
Elles sont dues à Neuroterus albipes forme reflexus. Comme pour la galle précédente, le cycle fait intervenir deux générations de guêpes, asexuées et sexuées.
galle à contour lobé de Neuroterus albipes forme reflexus, loupe binoculaire x15- Photo Gilles Weiskircher (Anab)
En conclusion
Structures peu étudiées par les naturalistes, les galles ont pourtant toute une histoire à nous raconter, une biologie fascinante à nous livrer. Sur une insignifiante feuille de chênes, 3 espèces différentes de guêpe ont perpétuées un cycle de reproduction qui inlassablement égrène les saisons et offre à son observateur les pages d’un livre où les interactions entre les plantes et les végétaux ne finissent pas de nous surprendre.
Texte, photos sauf mention, et bibliographie : Gilles Weiskircher (Anab)
Un grand merci à Jean-Claude Lincker pour ses photos et corrections
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