Enquête mycologique, épisode 20, Clavulina cinerea
Publié le 21 Août 2021
Identifier un champignon n’est pas chose aisée au premier abord et c’est pourtant une démarche essentielle pour éviter toute fâcheuse méprise qui peut devenir fatale si on consomme un champignon toxique ou mortel.
Le milieu du mois d’août est très chaud. C’est un temps idéal pour l’enquêteur d’aller se rafraîchir en forêt
Scène du crime
Nous sommes le 14 août 2021, dans la forêt de feuillus du Jungwald à Sarreinsming. C’est lors de l’observation d’une tranchée, mettant en évidence une belle strate argilo-limoneuse, que l’enquêteur tombe nez à nez sur des champignons poussant sur le sol
Arme du crime
Le champignon pousse au sol et on est ici en présence d’un champignon mycorhizien, dont le mycélium réalise une association avec les racines des arbres mais il peut aussi être saprotrophe. Pour ces champignons, c’est très difficile de caractériser leur façon de se nourrir et ça reste sujet à débat.
Profil du suspect
La morphologie du champignon est dite ici en forme de corail. Les champignons désignés ainsi sont de façon générale « les clavaires ». C’est très difficile de les identifier et, à de rares exceptions près, l’usage du microscope est inévitable. C’est un groupe qui donne des sueurs même aux mycologues confirmés. Et même encore, le microscope ne permet pas quelquefois de conclure. Ils peuvent avoir tous les modes de vie, aussi bien mycorhizien que saprophyte. Le pied est ici ocre à la base, élément d’identification important.
Néanmoins, quelques autres observations sont à effectuer :
- la consistance de la chair : cireuse, coriace, visqueuse, etc. La chair est ici coriace
- la présence de ramifications au bout des branches : le champignon présente des ramifications au bout des branches avec une extrémité sombre
- le biotope
- l’odeur : elle est ici insignifiante.
Couleur de la sporée
Elle est essentielle pour avancer dans la détermination de ce groupe. Elle est blanche.
L’examen par la police scientifique
Les basides sont ici très caractéristiques, en forme de corne de taureau et surtout bisporiques, donc avec deux stérigmates. Ce sont des particularités du genre Clavulina.
Les spores sont guttulées, subglobuleuses ovoïdes, et non amyloïdes.
Spores de Clavulina cinerea (Clavaire cendrée) - Microscopie x1000 - Photo Gilles Weiskircher (Anab)
La conclusion de l’enquêteur
Tous ces éléments concourent à désigner Clavulina cinerea, la clavaire cendrée. La détermination de cette espèce est délicate car une autre espèce de Clavulina, C. cristata, lui ressemble comme deux gouttes d’eau lorsqu’elle est parasitée par le champignon Spadiciodes clavarium. Même le microscope dans ce cas de figure n’est d’aucun secours. Néanmoins, cinerea conserve son pied ochracé, même parasité.
Vous l’aurez compris, déterminer une clavaire est un parcours du combattant.
Texte, photos, et bibliographie : Gilles Weiskircher (Anab)
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