La Rhagie sycophante, Rhagie délatrice,
Publié le 27 Octobre 2021
Roland
Nom scientifique : Rhagium sycophanta (Schrank, 1781)
Etymologie : «rhagion» désignait un coléoptère. Son nom d’espèce latinisé « sycophanta», signifie « délateur, calomniateur ». Pourquoi ? Merci aux zoonymistes de leurs lumières.
Nom allemand: Eichen-Zangenbock
Nom anglais: Rhagium sycophanta
Classification et famille : Rhagium sycophanta fait partie de l’ordre des Coléoptères, l’un des plus riches sur Terre : 400 000 espèces décrites sur 1 500 000 probables. Les coléoptères sont, rappelez-vous, des insectes à métamorphose complète qui possèdent deux paires d’ailes, l’une coriace, non nervurée et l’autre membraneuse. Ils sont partout et ont colonisé tous les milieux sauf la mer.
Cette Rhagie sycophante, appartient à la famille des Cérambycidés (35 000 espèces). La racine, cerambyx correspond au nom grec du Capricorne, insecte à grandes cornes ou Longicorne. La plupart sont en effet des coléoptères à longues antennes. La taille de ces antennes dépasse souvent le corps mais pas ici chez notre rhagie. Les Cérambycidés se reconnaissent à la particularité de leurs pattes : les tibias antérieurs et intermédiaires présentent une paire de forts éperons terminaux et leur tarse est composé de 4 articles visibles au lieu des 5 habituels. Le cinquième très petit, n’est pas visible à l’œil nu.
Leur larve est charnue et blanche avec une tête orangée faite de tissus durs, sclérifiés dont les pièces buccales noires s’avèrent plus dures encore. Cette propriété leur permet de se nourrir de végétaux et de bois et dans certains cas, de bois dur d’aubier ou même de bois sec (charpente…).
Date de l’observation: le 26 mai à Hinsingen (67) minuscule village à la frontière Alsace-Moselle
Dimensions : 13 à 30 mm de long pour 5 à 9 mm de large
La forme de ce longicorne est allongée. Sa couleur est brune ponctuée avec des grosses taches noires sans reflet. Le corps est couvert d’une fine pilosité jaune orangée. Son pronotum (dos du premier segment thoracique) est marqué d’une grande épine latérale. Les élytres présentent une bosse entre le scutellum et l’épaule. Les antennes sont brunes constituées de 11 gros anneaux articulés. Elles ne dépassent pas la longueur des élytres comme chez d’autres cerambycidés. Les yeux sont assez gros et proéminents. En arrière une suture transverse marque le cou.
Les pattes sont noires et longues, terminées par 4 articles très courts, larges et épais, les tarses. Elles lui permettent de se déplacer avec agilité.
Nourriture : l’insecte à l’état de larve, consomme du bois mort. Il est dit saproxylophage. Il se cantonne en périphérie du tronc sous l’écorce plus tendre que l’intérieur de l’arbre (aubier) des chênes surtout mais aussi du châtaignier, du hêtre, de l’aulne. Adulte, on le retrouve sur les fleurs comme les ombellifères où il se nourrit de pollen et de nectar. Les adultes ne vivent pas plus de une à trois semaines. Cette brève période est surtout consacrée à la reproduction.
Reproduction : elle a lieu d’avril à juillet où les adultes se trouvent sur les souches coupées de chêne. Les femelles peuvent se trouver aussi sur des aubépines et le sureau.
La femelle pond ses œufs au printemps sur des souches d’arbres morts( les chênes en particulier) ou de bois coupés, dans une fissure ou un trou d’écorce. Les œufs éclosent habituellement deux à trois semaines plus tard. Les petites larves issues des œufs vont se nourrir de bois mort et se transformer en gros vers blancs. Le stade larvaire dure en moyenne un an. La nymphose se déroule généralement au printemps. Comme d'autres espèces de cérambycidés elle confectionne ce qu’on appelle une loge nymphale. Le stade nymphal dure lui quelques semaines. Les adultes apparaissent avant ou durant l’hiver et hibernent dans la loge nymphale, dans les galeries larvaires ou sous l’écorce. L’éclosion des adultes (de mai à juillet) est fortement dépendante des conditions atmosphériques, particulièrement de l’humidité. A l’aide de leurs puissantes mandibules, ils creusent dans le bois qui les sépare du monde extérieur un trou d’envol généralement ovale.
Confusion : il existe un cousin, Rhagium mordax d’allure très proche qui possède une grosse tache noire au milieu des élytres et ne présente pas de bosse entre le scutellum et les épaules.
Habitat : assez commune dans les grandes forêts de plaine, plus rare dans le midi et dans toute l’Europe jusqu’en Sibérie.
Protection
Pas de protection spéciale ou légale pour ce coléoptère.
Intérêt biologique :
Une étude suisse (1) a montré que les forêts avec des chablis (arbres renversés) comportent deux fois plus d’insectes que les forêts intactes, sans chablis et 4 fois plus d’abeilles, de guêpes sauvages et de punaises. C’est pourquoi laisser des arbres morts dont un certain nombre de gros calibre dans les parcelles boisées est une nécessité pour maintenir et développer la biodiversité. Elles abritent en particulier les espèces en danger de disparition comme cette Rhagie sycophante menacée dans certains pays. Au contraire, une forêt sans chablis et de monoculture va favoriser quelques espèces dont les redoutés scolytes qui dévastent des forêts entières de résineux.
Prédateurs : oiseaux, chauve-souris.
Photos, texte, bibliographie Martine Devondel et Roland Gissinger (Anab)
Confirmation identification : Martine
Bibliographie
Livres jolis et très instructifs:
Petites bêtes des forêts de Lorraine et d’ Alsace JY Nogret /S Vitzthum édition Serpenoise
Insectes remarquables de Lorraine et d’ Alsace –JY Nogret /S Vitzthum édition Serpenoise
1/ Insectes favorisés par les tempêtes en forêt