La Piéride du Navet, le Papillon blanc veiné de vert
Publié le 21 Novembre 2021
Voici un des papillons les plus communs et sans doute déjà vu surtout au début du printemps. Il est aussi l’un des derniers visibles en fin d‘année. Il fait partie d’un petit groupe de papillons d’aspect voisin et qui sont fanas d’un type de plantes
et dont la biologie est passionnante.
Roland
Nom scientifique : Pieris napi (Linnaeus, 1758)
Origine du nom: « pieris » en latin fait référence à la mythologie grecque (comme la plupart des noms de papillons): Les piérides étaient les 9 filles, très bonnes chanteuses, du roi de Macédoine, Piéros et de son épouse Évippe.
et « napi, signifiant navet , en lien avec l’appétence des chenilles de ce papillon pour les Brassicacées. Voir aussi l’article, très intéressant, sur la zoonymie de ce nom de Jean-Yves Cordier.
Nom allemand : Rapsweißling
Nom anglais : Green-veined White
Observation : 24 septembre à Sarralbe (57)
Classification : fait partie de la famille des Piérides, famille qui comprend 100 espèces différentes de par le monde !.
Points communs : papillons clairs, blancs, jaunes ou orangés avec des taches ou marbrures, en particulier sur les ailes postérieures du mâle.
Le contour des ailes est régulier, sans feston aux extrémités comme dans d’autres familles. Le mâle se distincte souvent de la femelle ( dimorphisme sexuel). Les antennes sont terminées par un anneau aplati.
Le vol est ramé et soutenu. A remarquer que Pieris napi vole plus lentement que les autres Pieris.
De nombreuses espèces sont migratrices sauf le Souci, qui hiberne chez nous.
Les chenilles des piérides sont en majorité phyllophages (mangeuses de feuilles).
Dimensions: les ailes mesurent 18 à 25 mm soit une envergure de 35 à 45 mm
Période d’observation : mars à novembre
Description : la face supérieure des ailes est uniformément blanche avec une tache noire très variable mais toujours asymétrique sur le coin de l’aile antérieure. Un seul petit ocelle décore cette face chez le mâle(ou bien souvent aucune) et deux tâches sombres plus distinctes chez la femelle.
La face inférieure de ses ailes a une particularité saisonnière. La première génération qui apparait au printemps possède des nervures soulignées de gris vert. Les lépidoptéristes parlent de suffusion gris-vert. La seconde génération est plus grande et plus pâle. Les 3 ème et 4 ème générations peuvent ressembler à l’une ou l’autre.
Biologie et activité
Le papillon vole autour des plantes sur lesquelles il va déposer ses œufs. Le mâle émet une phéromone sexuelle pour attirer les femelles. Pour ce papillon, elle est perceptible par un humain puisque le composant principal est le citral que l’on retrouve dans l’huile essentielle de l’écorce de citron. Au moment de l’accouplement, le mâle accompagne son sperme d’un autre composé chimique, le salicylate de méthyle . Ce dernier va agir comme un composant anti-flirt. La femelle fécondée libérera de petites quantités de ce composant qui vont dissuader tous les autres mâles de lui faire la cour. Ils sont très sensibles au niveau de concentration de salicylate de méthyle. Ceci garantit en fait la paternité des œufs au mâle qui a fécondé la femelle, ce qui est loin d’être une généralité dans la nature.
Autre fait notable. De manière très générale, dans la nature, un animal mâle produit du sperme peu coûteux en énergie. La femelle au contraire doit concevoir des ovules qui lui pompent toutes ses réserves. Ici le mâle de la Piéride du navet en donnant son sperme donne aussi des matières nutritives qui peuvent représenter 15 % de son poids corporel. La femelle utilise ce cadeau nuptial pour produire ses œufs et rallonger son espérance de vie. Ceci explique qu’une femelle peut s’accoupler plusieurs fois en cours de saison. Elle est donc polyandre. Dans les régions du nord les femelles sont plutôt monoandres mais il en existe aussi dans le sud, ce qui équilibrerait l’évolution des populations. Ce caractère de mono ou polyandrie serait héréditaire.
Habitat: milieux ouverts, prairies humides et fleuries, lisières, maxi 1800 m d’altitude en France mais 3500 m en Afrique du Nord. Présent partout.
Reproduction: Après son accouplement, la femelle pond ses œufs jaune-verdâtre sur des Brassicacées comme l’Alliaire officinale, la Cardamine des prés. Vous n’avez rien à craindre de cette espèce pour vos navets, elle ne pond que sur les plantes sauvages.
Elle les pond sur les boutons floraux des plantes hôtes.
Les œufs vont éclore en 8 à 10 jours et devenir des chenilles vertes avec des verrues noires et des poils blanchâtres, après plusieurs mues.
Particularité : il a été prouvé qu’une partie des œufs n’évolue pas vers l’imago mais reste au stade nymphal jusqu’à l’année suivante assurant ainsi la dissémination de l’espèce.
La chenille va dévorer le bourgeon floral puis manger les siliques de la plante contrairement à la plupart des autres papillons dont les chenilles mangent les feuilles. A noter que les chenilles sont peu détectables tant elles ressemblent aux plantes qu’elles dévorent : on dit dans ce cas que leur coloration est homochromique.
La nymphose se fait après 2 à 4 semaines ce qui explique le nombre important de générations par an. Le papillon hiberne sous forme nymphale. Cela lui permettra d’être un des premiers papillons à prendre son envol.
Confusion : le débutant confond facilement les espèces de piérides globalement proches.
Pour le Piéride du navet, il existe de nombreuses sous espèces stables selon les régions.
Nourriture des adultes : le nectar de fleurs diverses
Prédateurs: oiseaux, chauve souris
Protection : papillon non protégé mais qui se raréfie. Sa plante hôte principale, la Cardamine des prés, vit dans les milieux humides
qui disparaissent à grande vitesse suite aux drainages des terres et à la disparition des zones inondables et humides par l’extension de l’habitat.
Poésie: revoir la mythologie grecque (les Piérides) pour bien profiter de cette poésie que nous offre Christophe.
Sont-ce là des fées,
Ou des Muses
Qui s'amusent.
Métamorphosées.
Neuf à Parnasse,
Filles d'Émanthie,
Les muses défient,
En une joute pugnace,
D'une douce mélopée.
Et voici venir les Satyres,
Que les Épigées attirent,
Nymphes arbitraires,
De ce duel musical.
Silence sur le mont.
Seul le vol d'un papillon,
Résonne encore.
Enfin ! Au son du cor de Diane,
La musique,
En une orgie symphonique,
Retentit en toute Macédoine.
Les muses l'emportent,
Mauvaises perdantes,
Les neuf s'emportent.
Apollon les change alors en pies,
Et nomme les Muses du nom des neuf,
Christophe Zins
Photos, texte, bibliographie Martine Devondel et Roland Gissinger (Anab)
Détermination des papillons, Martine
Poésie: Christophe Zins
Articles de référence et bibliographie :
Livres
Très joli et instructif livre : Guide complet des papillons de jour de Lorraine et d’ Alsace –JY Nogret /S Vitzthum édition Serpenoise
Papillons de France, Tristan Lafranchis