L’Euphorbe petit cyprès '(Euphorbia cyparissias)
Publié le 13 Juillet 2022
Vous pouvez trouver en ce moment cette plante verte en fleurs. En la regardant de près vous trouverez qu’elle porte bien son nom.
Roland
Nom scientifique : Euphorbia cyparissias L., 1753
Origine du nom: du grec « Euphorbia » qui était le nom du médecin du roi de Mauritanie, Juba voici plus de 2000 ans, vers - 40 av. J.C. et de « cyparissias» , petit cyprès, car son allure rappelle un peu celle d‘un cyprès.
Autres noms communs : Euphorbe faux cyprès, Petite ésule.
Nom commun allemand/ dialecte : Zypressen-Wolfsmilch
Nom anglais : cypress spurge
Date de l’observation: le 16 juin à Siersthal (57)
Famille de plantes : celle des Euphorbiacées qui contient plus de 8000 espèces réparties dans 300 genres, aussi bien des herbes que des arbres (comme l’arbre sablier Hura crepitans , sujet d’un quiz sur notre blog) et même des plantes succulentes semblables aux cactus. La majorité d’entre elles sont des plantes de climats très secs ou xérophytes. Elles sont très présentes sous les tropiques en zone Inde Malaisie mais aussi un peu sur tous les continents sauf les zones très froides.
Les Euphorbiacées les plus intéressantes au niveau économique sont :
- pour l’industrie, l’Hévéa producteur de latex et à la base du caoutchouc naturel
- pour l’alimentation, le manioc (Manihot esculenta) qui est une des plantes les plus consommées au monde.
Son latex est riche en toxiques proches du cyanure. Il doit obligatoirement subir un traitement de lavage et cuisson pour être consommé.
En France continentale nous n’avons que deux genres, Mercurialis et Euphorbia. Ce dernier genre est très riche en espèces avec plus de 2160 représentants au niveau mondial.
Le caractère commun le plus évident des euphorbiacées est la présence d’un liquide blanc rarement jaune, toxique, appelé latex. Il est contenu dans les tiges et troncs.
Les plantes sont très variables et leur fleur complexe est aussi très changeante.
Catégorie: plante glabre, vert bleuâtre, vivace à nombreuses tiges ligneuses à la base et avec une inflorescence complexe et touffue à l’extrémité
Les parties blessées laissent couler un latex blanc qui coagule rapidement.
Hauteur: de 15 à 50 cm
Tiges et racines: tige ronde, ramifiée à feuilles opposées, et aux rameaux très feuillés
Feuilles: linéaires de 1,5 à 4 cm pour seulement 1 à 2 mm de large. Des rameaux très feuillés situés sous l’inflorescence donnent un aspect de petit arbre à cette herbe.
Floraison: d’avril à septembre
Couleur des fleurs: une ombelle de 6 à 20 rayons porte les fleurs. A la base des rayons se trouvent de petites feuilles ou bractées de forme triangulaire et jaune clair qui deviendront rouges à maturité.
La couleur dominante des fleurs est jaune verdâtre. Les fleurs de cette Euphorbe diffèrent nettement des fleurs classiques dont les sépales, pétales, étamines et pistils sont bien visibles. Ici, la fleur est constituée par une coupe formée de 5 pièces foliaires soudées, c’est le cyathum. A l’intérieur, 4 disques alternent avec 5 groupes d’étamines. Sur cette euphorbe, les disques jaunes, qui sont des glandes nectarifères, ont deux cornes aux extrémités. Cette forme est dite en croissant. Enfin, bien plus visible, au centre, le pistil émerge du cyathum avec un renflement provoqué par l’ovaire. Il est constitué de 3 carpelles soudés contenant les ovules et prolongé par 3 stigmates.
Tout cela est bien compliqué, le mieux est de prendre une bonne loupe (X10) et le temps de regarder tous ces éléments un par un sur une fleur de cette espèce.
Pollinisation: par les insectes, abeilles en particulier
Fruits: capsules glabres de 3 à 4 mm, couvertes de très fin tubercules. Les graines sont rondes et brunes.
Leur dissémination est favorisée par l’éjection des graines jusqu’à plusieurs mètres hors de la capsule quand elle est mûre et sèche. Elle est surtout myrmécochore (assurée par les fourmis).
Habitat: Cette plante est calcicole et aime les sols pauvres, comme les prés, prairies, friches, bords des routes, dunes, éboulis jusqu’ à 2400 m.
Protection : cette plante assez commune a été évaluée en statut VU, vulnérable en région Nord-Pas-de-Calais.
Hors de sa région d’origine, l’Eurasie, la plante peut être invasive comme aux États-Unis. Au Colorado et dans d’autres états, où elle avait été introduite pour décorer les jardins, elle est déclarée « peste végétale » tant elle s’étend au détriment des plantes locales, surtout d’ailleurs par ses racines.
Parasite :
Cette Euphorbe petit-cyprès est souvent victime de champignons parasites. La Rouille du pois, Uromyces pisi transforme l’aspect de petit arbre de notre euphorbe en une fade herbe avec de minuscules feuilles linéaires sans aucune fleur visible. L’extrémité de la plante produit alors un nectar et un produit attractif pour certains insectes qui facile la dissémination des spores. En observant ces plantes, on constate que la face inférieure des feuilles est couverte de spores oranges (attention, un quiz sur ce sujet évité cette semaine mais à prévoir). A noter que les hôtes principaux de cette rouille sont les plantes de la famille du pois, les fabacées.
Utilité alimentaire: aucune car cette plante est toxique. Le latex est la sève laiteuse de l’Euphorbe petit-cyprès. Il contient 15% de résine, caoutchouc, amidon et autres composants. Il est extrêmement piquant et amer. Il s’agit sans doute d’une défense de la plante pour éviter d’être broutée par des animaux herbivores. Certains insectes quand ils sont au stade chenille s’en nourrissent comme le Sphinx de l’euphorbe, Hyles euphorbia.
Transportée dans des pays sans ses prédateurs naturels comme ce sphinx, délaissée par les ovins et autres brouteurs cette euphorbe devient invasive.
Utilisation médicinale et vétérinaire:
Cette euphorbe était utilisée autrefois pour ses effets purgatifs, laxatifs, pour des maux de dents, les verrues,… mais sa toxicité rend son utilisation très délicate
Son latex est très irritant pour la peau et les muqueuses. Ses bractées portent à maturité de très petits poils particulièrement irritants. Ils sont à éviter à tout prix car ils peuvent rester sous la peau pendant des années. Il est recommandé de ne pas toucher cette plante à mains nues mais avec des gants.
Comme toujours, et avant toute utilisation, il faut consulter un médecin pour être averti des éventuels effets indésirables ainsi que des interactions possibles avec les médicaments classiques.
Les composants du latex ont de véritables propriétés thérapeutiques. Elles restent mal connues mais des effets ont été observés sur les cancers et les virus. Des activités de répulsif et insecticide ont aussi été trouvées.
Le latex contient des sesquiterpenoïdes en particulier du cariophyllene oxyde, des composants volatils comme des monoterpènes (béta-cyclodextrine). Les vétérinaires ont testé ce latex contre des parasites comme les acariens et tiques chez les animaux domestiques. Des tests d’application approfondis avec différents dosages ont été conduits tant les réactions sur la peau sont fortes.
Texte et photos : Roland Gissinger (ANAB) relecture Bernard Weinzaepflen
Sources bibliographiques voir index biodiversité
Recherches sur les activités thérapeutiques d’Euphorbia cyparissias (juin 2008) en anglais
Activité d’extraits d’Euphorbia cyparissias sur les tiques (juillet 2010)