Les taons Le Taon des sudètes (Tabanus sudeticus)
Publié le 21 Septembre 2022
Tabanus est une de ces fichues grosses mouches ou taons qui vous piquent par traîtrise quand vous êtes à la campagne ou en forêt.
La piqûre est quelquefois douloureuse. L’irritation persiste souvent longtemps.
Martine et Roland
Nom scientifique : Tabanus sudeticus Zeller,1842,
l’espèce est identifiée précisément à la loupe binoculaire : les yeux , velus ou non, l’abdomen, les antennes, les pièces buccales, les nervures des ailes …
La famille des Tabanidae comprend environ 3500 espèces dont 160 espèces en Europe .
Autre nom commun: Le Taon des chevaux
Origine du nom : du nom latin populaire « Tabonem « dérivant du latin Tabanus désignant le taon. Sudeticus est la forme latinisée de sudètes (région germanophone de la Tchéquie)
Nom Allemand: Pferdebremse
Nom anglais : dark giant horsefly
Classification : Les taons appartiennent à la famille des Tabanidae et à l’ordre très important des Diptères ( du grec di, deux et pteron, ailes).
Ce groupe comprend les insectes aux noms vernaculaires de mouches, syrphes, taons, moustiques. Ils sont le deuxième groupe, après les hyménoptères (abeilles…), le plus impliqué dans la pollinisation. Ils ont un rôle très important dans la dégradation des détritus de toutes sortes puisque certains sont coprophages et nécrophages tandis que leurs larves, détriphages , vivent et se nourrissent dans la boue, les milieux putrides ou l’eau. Ils produisent ainsi de grandes quantités d’humus.
Nombre d’espèces : il existerait 150 000 espèces de mouches ou de diptères dans le monde. Ce sont des insectes qui ont la particularité d’avoir deux ailes membraneuses et deux ailes rudimentaires, les balanciers. Ces balanciers en forme de mini haltères leur permettent de faire des acrobaties en vol et du surplace à la manière des hélicoptères. Quelques diptères parasites sont devenus aptères car ayant perdu leurs ailles.
Certains taons sont connus pour être les insectes les plus rapides au monde. La littérature mentionne 145 km/h pour le taon, Hybomitra hinei. Difficile à croire, n’est-ce pas ? Il figure pourtant dans le livre des records de l’Université de Floride édition 2017.
Famille des Tabanidae
Pour revenir à cette famille de taons, on en dénombre 3000 à 4500 espèces différentes selon les sources dont 160 en Europe.
Ils sont caractérisés par un corps massif bien plus gros que celui d’une mouche : 10 à 30 mm, des ailes puissantes, écartées de l’abdomen. Leurs yeux sont souvent très gros par rapport au corps, jointifs chez les mâles et séparés chez les femelles (=dichoptique). Les antennes courtes ( ils font partie du sous ordre des Brachycères) sont de forme très variable en général de 3 articles, souvent en forme de corne, sans arista latérale contrairement aux syrphes. L’arista est la petite soie bien visible sur les antennes des syrphes.
Observation : le 15 juillet à Mittersheim (57)
Dimensions: 19,5 à 24,5 mm de long
Durée d’observation: mai à septembre
Description générale des taons: insecte avec une tête courte, peu velu sauf le thorax, qui est robuste, large, noir ou gris. Les yeux sont surdimensionnés, de plusieurs couleurs ou irisés. A noter que la taille des innombrables facettes de l’œil, appelées ommatidies est de dimension différente selon leur situation. Les facettes sont plus grandes dans la partie centrale de l’œil.
Les antennes n’ont que 3 articles et sont petites. Leurs pattes se terminent par 2 griffes et 2 lobes-ventouses ou pulvilli sur les côtés. Ils leur permettent de s’accrocher presque partout et dans n’importe quelle position.
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Leurs ailes ombrées de gris dépassent le corps de l’insecte et une nervure dite costale trace le pourtour de l’aile. Mais surtout, c’est la divergence des deux nervures (R4 et R5) qui permet de les distinguer sur le terrain d’autres diptères. Voir schéma.
Les femelles ont besoin d ‘un repas de sang pour pondre leurs œufs et sont donc hématophages au contraire des mâles. Les pièces buccales des deux sexes ne sont pour cette raison pas identiques.
Tabanus sudeticus :Grande espèce, brun- gris, mésonotum ( partie dorsale du thorax ) brun olive à bandes peu marquées. Abdomen brun-noir portant des triangles pâles. Yeux non velus, bruns noir, sans bandes. C’est un des plus grands taons de notre pays. Il préfère les pâturages et bois clairsemés. Lors de la piqûre, les glandes salivaires injectent de la tabanine, un anticoagulant.
Nourriture:
Les proies recherchées par les taons sont les bovins, chevaux, moutons, cervidés et… les humains, par opportunisme. Les femelles après avoir choisi une victime se posent délicatement sur elle aidées par leurs pattes amortisseuses.
Grâce à leurs pièces buccales dont 6 lames bien affûtées et leur salive anticoagulante, elles vont, non pas sucer le sang, comme le font les moustiques mais mordre leur victime pour faire couler le sang et le pomper ensuite en l’aspirant comme une éponge. Ils sont dits « telmophages ». La morsure est immédiatement douloureuse.
Piqûre Comme les victimes de ces morsures ne peuvent pas réagir selon la localisation (nuque, bas des pattes, l’arrière train), les taons ne se retirent pas immédiatement après leur piqûre. Ceci permet aux humains victimes eux aussi mais qui peuvent accéder à leur nuque, genou... , de les tuer d’un coup de main rageur. Vous constaterez que l’évolution n’a pas sélectionné de morsure indolore puisqu’ils ne peuvent pas être chassés, par les animaux, leurs victimes habituelles. Les tabanidés en plus de mordre leurs victimes vont dans certains pays, leur transmettre des agents pathogènes : virus, bactéries mais aussi des protozoaires comme des trypanosomes (maladie du sommeil) et des vers dans les régions tropicales. Les détails sont assez horribles et nous vous les épargnerons.
Les piqûres de taon peuvent déclencher aussi de violentes allergies par exemple des difficultés respiratoires. Les traces de piqûres peuvent devenir très larges et douloureuses pendant quelques jours.
Stratégies d’attaque :
Selon les espèces, certains taons ne s’attaquent qu’à la face postérieure des jambes ou des genoux comme les genres Tabaus et Atylotus. Les Hybomitra attaquent les animaux entre les jambes, d’autres à la nuque comme les Chrysops, d’autres à l’arrière train des animaux.
Comme dirait notre ami Gilles nous avons affaire à des gangs de piqueurs spécialisés.
Ils sont attirés par le gaz carbonique émis par les mammifères et leurs congénères.
Préférences florales des mâles : Les apiacées comme la Carotte sauvage, la Grande berce mais aussi les menthes sauvages, le miellat des arbres, les mâles ne consomment que du nectar.
Reproduction: les mâles se regroupent en essaim d’une dizaine d’individus ou plus. En début ou fin de journée, ils interceptent les femelles et la copulation débute dans les airs avant de se terminer à terre.
Les mâles ne survivent pas à la reproduction et meurent peu après. Leur durée de vie est nettement inférieure à celle des femelles (plusieurs semaines)
Cycle biologique et activité:
Les femelles, 4 à 5 jours, après leur repas de sang sont prêtes à pondre. Elles déposent 25 à 100 œufs souvent sur des végétaux proches d’eaux stagnantes riches en éléments nutritifs mais aussi sur des pierres. Il existe en fait 4 types écologiques de larves de taons, du plus humide (eau) au plus sec (sols arides). Le développement des larves issues des œufs se fait en 6 à 11 stades successifs. Ce sont en majorité des prédateurs de petits insectes, larves, vers, gastéropodes. Le cycle dure plusieurs mois à quelques années selon le climat local. En France le cycle dure un an et ne produit donc qu’une seule génération. Les insectes adultes vivent 2 à 4 semaines. Les larves sont longues et cylindriques et possèdent 12 segments. Autour de chaque segment des anneaux de petits tubercules (bourrelets reptatoires ) leur permettent de se mouvoir dans l’eau ou la vase. Les larves peuvent survivre longtemps sans nourriture, plusieurs années pour celles des pays du Nord.
Habitat: Les taons sont des insectes diurnes des saisons chaudes qui évitent les zones d’ombre. En général, ils ne rentrent pas dans les maisons. Ils suivent plutôt les animaux domestiques, bétail, chevaux en particulier et affectionnent les régions boisées. De nombreuses espèces ont des préférences marquées pour certains milieux. Les Chrysops et Hymomitra maculata vivent près des marais, Tabanus autumnalis préfère les fossés remplis d ‘eau.
Prédateurs et dangers: chauve- souris, oiseaux et les pesticides de l’agriculture intensive. Les pesticides tuent les insectes directement ou indirectement.
Des petites guêpes ou d’autres mouches du type tachinaire parasitent les œufs des taons.
Statut de protection : espèce non protégée par la loi mais importante au niveau pollinisation. Les chevaux ne peuvent être protégés efficacement des taons qu’avec des couvertures. Les pièges utilisés à ce jour ne sont pas sélectifs. Ils piègent surtout les autres espèces !
Texte Martine Devondel (Anab) et Roland Gissinger (Anab) -Photos Roland
Annotations photos et détermination des insectes sur les photos, Martine
Webographie :
Clé des tabanidae de France
Les taons traduction
Inventaire des Tabanidae de la Manche (2010)