Liberté d’expression. Appel aux gouvernements européens (JMP)
Publié le 5 Octobre 2022
Vous qui avez qui l’insigne honneur de gouverner les peuples qui engendrèrent la civilisation planétaire, prêtez à vos écologistes une écoute attentive... Car la part de vérité qu’ils détiennent vous permettra de redresser une situation qui ne cesse de se dégrader : celle de la Terre et de ceux qui l’habitent.
Européens, enfants de la Grèce et fils d’Israël, nous sommes les héritiers de la sagesse et de la foi. Rome nous apprit à déployer nos forces au service de l’ordre et de l’organisation. Puis ces courants venus du Sud entrèrent en contact, sur les rives du Rhin et du Danube, avec les peuples d’Europe du Nord ; leurs mythes, leurs légendes nés dans les forêts profondes nimbées de brume, si étrangères au ciel lumineux de l’Italie et de la Grèce, s’incorporèrent aussi à notre patrimoine.
De ces sources aux eaux mêlées naquit l’Europe et, avec elle, la civilisation occidentale ; la seule à s’être propagée à la planète entière : le même costume deux-pièces, la même cravate, les mêmes jeans se portent à Paris et à Tokyo, à Moscou et à Rio. Partout les pendules s’accordent au méridien de Greenwich, et le calendrier grégorien règle toujours les relations internationales. Quelques zones de différence subsistent toutefois : Indiens ou Esquimaux, Aborigènes, Boschimans ou Hottentots… ; ils forment aux hautes altitudes, dans les déserts, quelques îlots relictuels, visiblement voués à une prompte assimilation ou à une inéluctable destruction. Car l’avancée de la civilisation planétaire est inexorable. Elle conquiert le monde, éliminant sans faiblesse toute poche de résistance, toute enclave réfractaire. Le nivellement est général, la standardisation universelle : sur tous les aéroports du monde, les mêmes camions citerne Shell ou Esso biberonnent les mêmes avions, tandis que les passagers en transit sirotent le même Coca Cola et mangent les mêmes hamburgers. Quant aux armes, pour notre plus grande honte, elles sont partout et ce sont les mêmes partout !
Depuis la Renaissance et durant les derniers siècles, la civilisation planétaire s’impose sans conteste et sans complexe. Héritière de Rome qui nous laissa le goût de la conquête et de la colonisation, pour la première fois dans l’histoire du monde, une civilisation – la nôtre- a dépassé les limites de son berceau puis de ses empires pour prétendre à l’universel. Elle est aujourd’hui à son apogée. Mais la roche Tarpéienne est proche du Capitole, et les précédents célèbres évoqués plus haut rappellent que les apogées peuvent annoncer des fins prochaines.
De fait, qu’elle est vieille, cette civilisation ! De la sagesse des Grecs et de la foi des juifs, elle a perdu l’une et l’autre. Le fleuve coule encore mais la source est tarie ! Car à s’obstiner comme elle le fait depuis deux siècles, à nier ses racines, elle a fini par perdre son âme, vendue aux dieux de l’économie, de la technologie et de l’argent. A voir dans quel état de désolation ce matérialisme insolent a précipité la moitié des peuples de ce monde, les plus pauvres, les moins armés pour assimiler ses règles et ses principes, il apparaît qu’il est grand temps de changer. Et d’en refaire une autre au plus vite. Mais laquelle et comment ?
Kleine Scheidegg et le Breithorn (Suisse) -Saline des Trenc -Mallorca (Espagne)- Santorin (Grèce)- Photos Bernard et Claire.
A parcourir les étapes de ce tour du monde, le risque n’est pas mince de sombrer dans un noir pessimisme ; car nul ne conteste les graves maladies contractées par la planète en développement. En revanche, les avis divergent sur ses chances de guérison. Pour certains le point de non-retour est atteint ; trivialement « c’est foutu » ! Pour d’autres, les possibilités de régénération de la nature sont telles qu’elle saura réguler les perturbations perpétrées par l’inconséquence des hommes, quitte à leur faire payer très cher : « ça n’est pas foutu, mais ça va cogner » ! Pour d’autres enfin, le progrès n’est point seulement économique et technologique, il est aussi culturel et spirituel : par conséquent, quel que soit le poids des habitudes, les pressions des lobbies, la puissance des intérêts, un renversement complet de la situation est possible, même à court terme. Il suffit de la croire possible et de le vouloir vraiment : autrement dit « c’est jouable, et si on met le paquet on va gagner ! »
Cette troisième hypothèse est la seule à être digne de la tradition occidentale qui porte en elle, dans ses sources et ses racines, les remèdes aux maux et aux déviances qu’elle a engendrés. Or ceux-ci tiennent, pour l’essentiel, à son incapacité de maîtriser le progrès, de réguler ses avancés technologiques et scientifiques, de les soumettre à la critique de l’éthique et des valeurs universelles héritées de ses origines.
Plaidoyer de Jean-Marie Pelt (Le tour du monde d'un écologiste- Fayard 1990)
Texte proposé par Bernard Weinzaepflen (Anab) et mise en forme par Céline. Photos Bernard et Claire. Webographie proposée par Sylvie
https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Marie_Pel
Plage de Balos -Crète- Roque nublo Gran Canaria e Saline des Trenc -Mallorca (Espagne) -Photos Bernard et Claire.