Le camouflage ou l’art d’éviter de se faire manger
Publié le 19 Février 2023
Ce thème est particulièrement intéressant à étudier car il rend compte de l’extraordinaire diversité et ingéniosité de la nature.
Je suppose qu’il existe des livres et sans doute des milliers d’articles dans des revues spécialisées et sur internet qui en détaillent les différentes variations.
Avec cet article, je voudrais vous donner envie d’en savoir plus pour que vous recherchiez toutes ces imitations qui existent dans la nature et que vous vous interrogiez sur le chemin évolutif parcouru par ces espèces à travers des millions d’années.
1/ Connaissez-vous la différence entre camouflage et mimétisme.
ce n’est pas évident et ces termes sont souvent confondus dans les livres et les articles de vulgarisation.
Pas de quoi être complexé si vous mélangez les deux et ce sera aussi mon cas peut -être à un moment ou à un autre.
Le Camouflage : c’est une imitation par une espèce afin de se dissimuler. Il peut être réalisé au niveau visuel par la couleur, la forme, la texture
mais aussi le son ou de l’odeur.
L’espèce se dissimule pour échapper à ses prédateurs, en se fondant dans le paysage visuel, le « paysage » sonore ou le « paysage » olfactif.
Exemple simple : une sauterelle imite une feuille verte ou brune pour ne pas être vue et donc pour avoir moins de chance d’être capturée par un prédateur (oiseau).
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Un neurobiologiste strasbourgeois de l’INCI, Institut des neurosciences cognitives et intégratives, Sylvain Hugel, est un entomologiste passionné.
Il a contribué à faire reconnaitre l’art du camouflage chez une sauterelle, Permotettigonia gallica, incluse dans des sédiments de plus de 270 millions d’années .
Comment est-ce possible ?
D’abord il a été obligé de dater ces sédiments.
Ensuite , Sylvain Hugel a mesuré et comparé des dimensions comme la largeur, la longueur, leur rapport, et d’autres dimensions de centaines d’échantillons de sauterelles de sa propre collection,
d’échantillons du Musée zoologique de Strasbourg, et d’autres du Muséum National d’Histoire Naturelle de Paris.
Il a réussi à classer les échantillons en deux catégories, ceux qui étaient camouflés et les autres.
Cette sauterelle a été classée dans les camouflées.
IL arrive dans la nature que nombre de sauterelles camouflées le sont si bien qu’elles ne peuvent plus utiliser leurs ailes devenues aussi grandes que des feuilles.
L’art parfait du camouflage a rendu leur fonction vol inopérante.
Le Mimétisme : l’opération est plus complexe. Elle nécessite trois partenaires.
Le modèle est l’espèce de référence qui est imitée.
Le mime est bien sûr celui qui imité le modèle référent.
Le dupé . C’est celui qui est pénalisé par l’imitation. Il s’agit en général d’un prédateur qui ne remarque pas que le mime n’est pas le modèle.
Il a été démontré que pour qu'un mimétisme soit efficace, l’évolution de ces trois espèces doit être parallèle.
Plus le prédateur exercera sa pression sur le modèle et plus le mime essayera de ressembler au modèle.
Exemple simple : une mouche imite l’aspect visuel bandes jaunes alternées de bandes noires d’une guêpe pour éviter sa prédation par les oiseaux.
Ci-dessous, exemple de mimétisme, copie d'une guêpe par un Syrphe (Chrysotoxum cautum sp arcuatum)
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Les oiseaux chassent les mouches mais une mauvaise expérience de piqûre fait qu’ils évitent les guêpes
à part quelques espèces spécialisées comme le Guêpier justement.
Dans cet article nous abordons les espèces camouflées, qui se dissimulent et pas les mimétiques proprement dites.
Nous reviendrons sur les espèces mimétiques dans d’autres articles.
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Cherchez le quiz dans l'image ci-dessous:
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Chez les insectes des dizaines de milliers et plus d’insectes ont développé des facultés à se camoufler.
Vous savez qu’il existe dans le monde un million (au moins) d’espèces d’insectes dans les différents groupes ou ordres des insectes.
La plupart contiennent des espèces camouflées. Il n'est pas possible de donner un exemple de chaque. Ordre. Ci-dessus, un grillon et deux criquets (non identifiés) de Guyane
- les orthoptères, sauterelles, criquets et grillons
Ils copient soit une couleur vert feuille, une couleur brun feuille, l’aspect des écorces, ou le fond de leur lieu de vie : sables, mélange de feuilles et terre, du sable comme ci-dessous l’Œdipe bleu, Oedipa caerulescens
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- les coléoptères. De nombreux longicornes se fondent sur les écorces au point qu’ils sont difficiles à apercevoir comme cette Rhagie sycophante, Rhagium sycophanta
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L’iridescence des coléoptères est un camouflage. Ce n’est pas seulement un signe visuel pour les partenaires. Les insectes iridescents sont moins visibles que ceux qui ne le sont pas.
En particulier sur Sternocera aequisignata, d’un joli vert iridescent comme ce coléoptère. Un chercheur britannique Karin Kjersmo, Université de Bristol (UK) a fait des expériences de détection. Les oiseaux ont attaqué 60% des ailes de ce coléoptère réparties sur les feuilles d’un arbre contre 85% d’ailes de même forme mais de couleur brillante, passive, brun, violet, noir, vert. Des humains mis à l’épreuve ont repéré seulement 20% des ailes iridescentes posées sur les feuilles contre 80% des autres ailes.
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- les lépidoptères, les imagos ou papillons se confondent pour certains à des feuilles et leurs chenilles à des morceaux de bois ou des feuilles.
Le Citron Gonepteryx rhamni, ressemble à une feuille. La chenille du Grand sphinx de la vigne Deilephila elpenor ressemble à un bout de bois.(photo JC Weissend)
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- les mécoptères comme les mantes religieuses , ressemblent à des feuilles vertes ou brunes, ici une mante de Guyane non identifiée et la Mante religieuse(Mantis religiosa)
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- les phasmidés ci-dessous sont de très grands imitateurs . Ils prennent un aspect de mousse extraordinaire comme Antongilia lacinata, (photo de Chien Clee) de bois ou de brindilles de bois vert, de bois brun ou encore de feuilles (Phyllium spp.)
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les hémiptères et les membracides voir notre article sur ce sujet et ci-dessous en particulier ont des formes très variées. Ils imitent les bourgeons, feuilles, écorces pour ne pas se faire avaler par des prédateurs (espèce de Guyane non identifiée taille réelle 4 à 5 mm).
Ci-dessous phasme en brindille de Guyane, 10cm.
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2/ Groupes d’animaux camouflés
- les batraciens et les reptiles.
- les geckos et caméléons sont connus pour se fondre dans le paysage et adopter la couleur des feuilles ou de l’écorce de l’arbre où ils se trouvent.
Des nanocristaux, des cristaux microscopiques sous leur peau leur permettent de changer de couleur selon leur humeur, séduction, attaque, agressivité. Il a été démontré que ces changements de couleur leur permettaient de mieux communiquer et étaient antérieurs à leur utilisation pour le camouflage. Certaines espèces utilisent bien sûr cette faculté pour les deux usages.
- certains poissons imitent parfaitement le fond du ruisseau et sont alors presque invisibles
les grenouilles se confondent facilement avec le substrat. Ce Crapaud feuille, Rhinella margaritifera, de Guyane possède une raie sur le dos qui imite la nervure centrale d’une feuille.
Une autre non identifiée se confond sur le sol avec les feuilles.
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- les pieuvres et les seiches sont aussi des maitres du camouflage. Elles ont à la surface de la peau des millions de cellules sous contrôle hormonal qui utilisent la lumière. Les leucophores donnent une couleur blanche. Les iridiophores réfléchissent la lumière. Leurs chromatophores contiennent des pigments. Ils sont commandés par l’action des influx nerveux depuis le cerveau et leur permettent de changer de couleur rapidement en se contractant ou en modifiant la concentration.
3/ Groupes de plantes camouflées
Le camouflage concerne aussi les plantes. Certaines ressemblent à des pierres comme certains cactus et évitent le broutage..
Plus proches de nous certaine plantes de la famille des labiées imitent les feuilles des orties. Il est possible peur permettent de passer comme dangereuses comme des orties par certains insectes et donc d’être mangées.
- une liane caméléon, Boquila trifoliolata est capable de copier l’apparence des feuilles de la plante qui lui sert de support. Les scientifiques ne savent pas à ce jour comment elle réussit à imiter ces feuilles.
-- les mammifères sont passés maîtres dans l’art du camouflage.
Les animaux de nos forêts, chevreuils, cerfs, renards, loups, lynx, sangliers, fouine, écureuils, …sont tous des animaux dont le pelage imite celui des bois et de la terre.
Les carnivores d’Afrique portent des pelages bruns ou constellés de taches qui les rendent peu visibles e t masquent leur silhouette.
Les zébrures du zèbre avaient un temps été un artifice de camouflage vis-à-vis des gros carnivores. Des études ont montré que leur vision n’est pas influencée par les rayures surtout dans la pénombre. L’avantage évolutif des rayures du zèbre serait soit la régulation de température ou l’évitement des insectes piqueurs par un effet de polarisation.
Conclusion:
si vous imaginez qu'il existe des dizaines milliers de bestioles camouflées vous aurez vu ici qu'un tout petit aperçu de ce que peut faire la Nature.
Texte et photos (sauf mention) Roland Gissinger (Anab)
Bibliographie
https://fr.wikipedia.org/wiki/Mim%C3%A9tisme
Aux origines du mimétisme
Mimétisme- généralités par l‘OPIE Midi Pyrénées
Mimétisme chimique- Alain Lenoir nombreuses références 30oct 2022
Le mimétisme a au moins 270 millions d’années
Iridescence des coléoptères