Cas de flux de boue ou sécrétion de mucus chez un arbre.
Publié le 5 Mars 2023
Les rencontres avec un objet naturel inconnu suscitent l’étonnement et la curiosité. Il en est ainsi de ces productions gélatineuses sur certains arbres. Dans l’imaginaire collectif elles ont parfois été attribuées à des êtres extraordinaires. S’agit-il d’une manifestation du végétal? S’agit-il d’une “attaque” de champignons, de myxomycètes, d’algues… ?
Dans le cas présent, la masse gluante orangée couvre la section oblique d’un arbuste (diamètre : 4 cm). L’emplacement en bord de rivière, la forme de la section en sifflet et la présence d’autres coupes dans ce secteur, nous apprennent qu’il s’agit d’une marque de castor qui a exporté la cime après section. D’habitude, ces sections végétales dessèchent et le bas du tronc émet de nouveaux rameaux. Ici, l’écorce est restée mouillée, de la sève a continué de couler et la plaie est recouverte par une masse gélatineuse de 1 à 2 mm d’épaisseur. Hormis quelques renflements et débris noyés dans la masse, aucun organe particulier n’est visible.
Pour nous assurer de la véritable composition, jetons un coup d'œil à une préparation microscopique d’un échantillon prélevé sur la souche*.
Au fort grossissement, un type de structure est particulièrement abondant dans la préparation sous forme d’éléments arqués et cloisonnés (visibles en A). Ces éléments (notés M en B) peuvent être observés en liaison anatomique avec des filaments(F). Ils constituent le thalle d'un champignon filamenteux, les éléments arqués étant des organes (macroconidies) (re)producteurs de cellules destinées à disséminer l'espèce.
Le champignon est un Fusarium, groupe de champignons ascomycètes largement présents dans notre environnement. Vraisemblablement nous avons affaire ici à la forme asexuée ( = anamorphe Fusarium graminearum) de l'espèce Gibberella zeae. C'est un pathogène responsable des infections de céréales (fusariose de l'épi de maïs par exemple) et sécréteur de mycotoxines.
Par ailleurs, d’autres éléments sont également présents
algue microscopique entourée d’une gangue mucilagineuse.- Photo de microscopie X1000 Gilles Weiskircher (Anab)
Microscope (fort grossissement) Cet amas cellulaire rouge correspond à une algue microscopique entourée d’une gangue mucilagineuse. D’autres algues filamenteuses et unicellulaires sont également présentes. A noter sur la droite, les filaments (hyphes) du champignon.
*Merci à Gilles W. de l’Anab pour son diagnostic microscopique et les photos transmises.
Ces organismes se développent sur le site de l’épanchement de sève qui constitue un milieu nutritif. Ils contribuent aux transformations visibles de ce qu’on désigne sous le nom de flux de sève ou flux de boue. (en allemand : Schleimfluss, Milchfluss / en anglais : Slime flux). Bien que les processus soient encore imparfaitement connus, les premiers responsables de la production de gelée et du changement de coloration seraient souvent des bactéries.
Sur le pourtour d’une ancienne souche. Le flux peut revêtir des colorations spectaculaires, blanches, rouges, brunes, grises et produire une odeur nauséabonde.
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Autre cas de figure
Dans le cas présent, la masse gluante orangée couvre la section oblique d’un arbuste (diamètre : 4 cm). L’emplacement en bord de rivière, la forme de la section en sifflet et la présence d’autres coupes dans ce secteur, nous apprennent qu’il s’agit d’une marque de castor qui a exporté la cime après section. D’habitude, ces sections végétales dessèchent et le bas du tronc émet de nouveaux rameaux. Ici, l’écorce est restée mouillée, de la sève a continué de couler et la plaie est recouverte par une masse gélatineuse de 1 à 2 mm d’épaisseur. Hormis quelques renflements et débris noyés dans la masse, aucun organe particulier n’est visible.
Pour nous assurer de la véritable composition, jetons un coup d'œil à une préparation microscopique d’un échantillon prélevé sur la souche*.
Sur l’écorce de ce chêne, une trainée noirâtre signale l’écoulement d’un ancien flux de sève qui a affecté le développement des lichens. Sur son passage, on note la présence de plages orangées, siège d’une colonisation aérienne.
Cette formation sans blessure apparente est aussi connue sous le nom de maladie du bois humide
La plupart du temps, il s'agit d'une infection bactérienne (ou fongique) favorisée par une lésion de l'écorce : piqûre d'insecte, coups de bec, griffures ou facteurs abiotiques : gel, chaleur, sécheresse... La manière dont ces facteurs interagissent n'est pas encore totalement élucidée. Lorsqu'un foyer bactérien se développe dans le bois, celui-ci noircit, se ramollit, gonfle sous l'effet des gaz issus des processus fermentaires. La pression augmente, l’écorce se fissure et la sève suinte à l'extérieur. Là, elle peut être colonisée par d'autres organismes (bactéries, champignons, levures).
Texte et photos d'arbres : Etienne Feuchter (Anab)
Photos de microscopie et identifications: Gilles Weiskircher (Anab)
Source: Waldwissen net /
Remarque
Certains groupes de plantes ont développé des sécrétions spécifiques pour refouler les microorganismes intrus ou les herbivores : résine des Conifères, gomme chez les fruitiers à noyau et agrumes, latex. Ces sécrétions peuvent donner lieu à des figures singulières (résinose, gommose).