Enquête mycologique, épisode 82, Mycène rose. Mycena rosea
Publié le 25 Mars 2023
Identifier un champignon n’est pas chose aisée au premier abord et c’est pourtant une démarche essentielle pour éviter toute fâcheuse méprise qui peut devenir fatale si on consomme un champignon toxique ou mortel. L’enquêteur de la brigade d’identification des champignons apprécie tout particulièrement d’arpenter les forêts pour recenser tous les gangs fongiques qui s’y trouvent. Et c’est un gang redoutable qui attend l’enquêteur.
Scène du crime
Nous sommes le 13 octobre 2022, à Zetting, en forêt acidiphile type charmaie-hêtraie
Arme du crime
Le champignon pousse au sol, avec des débris agglomérés à la base du pied. Il s’agit vraisemblablement d’un champignon saprophyte.
Profil du suspect
La morphologie du champignon est classique, pied et chapeau. Le champignon a des lames, adnées ascendantes. C’est un petit champignon, de 3 à 5 cm de hauteur. Le chapeau est conique.
Passons maintenant à l’examen des voiles :
- pas de voile général sous forme de volve à la base du pied ou sous forme de flocons sur le chapeau
- pas de voile général sous forme d’anneau ou de cortine.
Le pied, à la base, est garni de poils blancs.
Deux observations sont essentielles ici : la belle couleur rose et surtout l’odeur de radis/pomme de terre. On parle d’odeur raphanoïde.
À ce stade, on peut identifier formellement le spécimen comme le mycène rose, Mycena rosea Gramberg (1912). Avec cette odeur et cette couleur, impossible de se tromper
Un mot sur les mycènes
Les mycènes sont un groupe difficile et nécessitent souvent souvent un examen microscopique.
Le botaniste et philosophe Théophraste, au IIIe siècle av. J.-C. classait les champignons à chapeau et à pied comme des « mykès » De ce mot dérive le mot Mycena, qui désigne tous les champignons à chapeau et pied. Le nom du genre a été tiré du grec mykès, champignon, avec un suffixe diminutif. Il signifie donc simplement petit champignon.
Ce sont effectivement des champignons de taille modeste, fragiles, quoique souvent assez hauts sur un pied grêle et parfois courbé. De couleurs très variées, ils sont fréquemment en forme de "chapeau chinois", campanulé, au moins dans leur jeunesse. Certaines espèces exsudent un latex ou présentent une odeur originale.
Sporée :
Elle est blanche, comme tous les mycènes
Examen par la police scientifique.
Les spores sont elliptiques. Comme chez la grande majorité des mycènes, elles sont amyloïdes, c’est-à-dire qu’elles prennent une teinte gris bleu dans le réactif de Melzer.
Les cheilocystides sont globuleuses.
Statut selon l’INPN : LC (Préoccupation mineure) sur la liste rouge des champignons menacés d’Alsace. Espèce déterminante de l’inventaire ZNIEFF.
Comestibilité : Toxique. À ne pas confondre avec un laccaire. Ce dernier ne présente pas cette odeur de radis
La conclusion de l’enquêteur
Ce champignon est très fréquent dans nos forêts, sous feuillus ou résineux. En mycologie, il est très important de sentir les spécimens. L’odeur est un élément important dans la détermination.
Pour aller plus loin.
Champignons, ce qu’il faut savoir en mycologie. Guillaume Eyssartier, éditions Belin, 2018
Texte, photos, et bibliographie : Gilles Weiskircher (Anab)