Qu'est ce que ces NGT ( « New Genomic Techniques ») ?

Publié le 26 Avril 2024

champ de colza

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paru sur franceinfo la Terre au carré du 25mars2024

Qu'est ce que ces NGT ( « New Genomic Techniques ») ? De « nouveaux OGM » ? Le Parlement européen a voté le 7 février dernier, un texte favorable à un encadrement plus strict de ces plantes NGT. L'Anses, les ONG et quelques scientifiques sont inquiets, d'autres chercheurs y sont plutôt favorables.

Depuis la dérégulation des NGT (NGT pour « New Genomic Techniques ») adoptée le mercredi 7 février par les élus européens, scientifiques, ONG et défenseurs de l'environnement ferraillent autour de ces "nouveaux OGM" appelés ainsi par ses détracteurs.

À la différence des OGM (organismes génétiquement modifiés) qui sont obtenus par transgénèse c'est-à-dire l'introduction d'un ou plusieurs gènes d'une autre espèce, les plantes issues des NGT sont obtenues grâce à la technique de la "mutagenèse dirigée" ou de la "cisgenèse". Il s'agit d 'inactiver un gène, de transférer un ou des gènes issus d'une même espèce et cela à l'aide des ciseaux moléculaires (CRISPR-Cas9).

Les NGT sont de deux catégories

  • Il y a les plantes issues des nouvelles techniques génomiques, pour peu que leur génome n’ait subi qu’au plus vingt modifications, ce sont les NGT-1.
  • Les NGT ayant subi un plus grand nombre de changements demeureraient, eux, soumis aux mêmes contraintes que les OGM classiques, ce sont les NGT-2.

Le texte adopté distingue donc ces deux catégories de NGT de variétés issues de Nouvelles techniques génomiques, mais l’une, la NGT 1, serait exemptée des règles s’appliquant aux OGM telles que l'évaluation. Mais avant que le texte législatif ne soit définitivement accepté, il reste le Conseil de L'UE et ses Etats-membres qui décideront du consensus final autour de ce sujet très sensible.

Pour ou contre les NGT ?

La bataille contre les OGM a commencé depuis fort longtemps et se poursuit avec les NGT. « Tout est OGM" souligne François Parcy, directeur de recherche en biologie végétale au CNRS et spécialiste de la génétique moléculaire des fleurs et signataire de la Tribune dans le Monde pour défendre les NGT. Pourtant une expertise de l'Anses informe des risques et des impacts de ces nouvelles techniques génomiques (NTG) et appelle à une réglementation adaptée et préconise une surveillance étroite des plantes concernées.

L’Anses plaide pour une évaluation des risques pour la santé et l’environnement de ces nouvelles plantes, au cas par cas, et la mise en place d’un plan de suivi après chaque mise sur le marché , tant sur les impacts environnementaux de ces « nouveaux OGM » que sur leurs effets socio-économiques. L'ONG Pollinis, elle, soulève le problème de la contamination ainsi que l'impact de ces plantes NGT sur les polinisateurs. L’accroissement possible de la concentration du marché des semences, l’impossible coexistence avec l’agriculture biologique, ou encore les attentes de transparence de la part des consommateurs, constituent autant d’enjeux essentiels pour le futur de l’agriculture en Europe.

Le NGT, des OGM ?

Oui, selon Vanessa Mermet, directrice des campagnes de l'ONG Pollinis (association de protection des pollinisateurs, et pour une agriculture respectueuse de la biodiversité) et membre du Comité de Dialogue "Biotechnologies, environnement et santé" de l'ANSES qui explique : « La Cour de Justice européenne a décidé en 2018 que c'était des OGM, des plantes génétiquement modifiées en utilisant d'autres types de techniques que la transgénèse. Le cadre réglementaire qui encadre les OGM actuellement en Europe s'applique et doit aussi s'appliquer aux NGT. Cette technologie est déjà utilisée au Japon à des fins thérapeutiques, ou gustatives. Il y a pour l’instant peu d’application. On ne comprend donc pas très bien la précipitation à vouloir déréguler. »

Des plantes insecticides sans évaluation

Vanessa Mermet explique que la résolution du 7 février dernier reviendrait à considérer ces plantes NGT, comme des plantes conventionnelles : « Les parlementaires européens ont grosso modo adopté la proposition faite par la Commission européenne qui concernerait 94 % des plantes. Cela revient à exempter d'évaluation des risques sur la santé, et sur l’environnement, avant de permettre leur mise sur le marché. Mettre en place des plantes insecticides sans prévoir d'évaluer leur impact sur l'environnement direct agricole, est assez dangereux. »

Les NGT, quel(s) avantage(s) ?

Pour le directeur de recherche CNRS en biologie végétale, spécialiste de la génétique moléculaire du développement des fleurs au Laboratoire de physiologie cellulaire et végétale à Grenoble, François Parcy : « pour juger de la promesse, il faut se pencher un peu sur le passé et toute l'histoire de la domestication des plantes pour les adapter aux besoins des êtres humains. Les NGT consistent à combiner des mutations et ça, on le fait depuis 10 000 ans. Ces modifications se sont accélérées, et elles sont de plus en plus ciblées. Les NGT offrent des opportunités en matière de défense des plantes face aux virus, aux bactéries, aux champignons en utilisant moins de pesticides. »

Les NGT, sans danger ?

Pour Frédéric Jacquemart, docteur en biologie, administrateur de FNE (France Nature et Environnement) et membre du Conseil d'administration et du Comité de Dialogue "Biotechnologies, environnement et santé" de l'ANSES ces NGT posent d'énormes problèmes : « Nous oublions que nous vivons dans des systèmes complexes avec une organisation. Si nous sommes là, c'est parce que cette organisation permet la cohésion des éléments du système. Et le moindre des choses serait de se préoccuper des conditions qui permettent le maintien de cette cohésion. La vitesse d'évolution d'un système fait partie des paramètres essentiels de cette organisation. Cela ne veut pas dire qu'on ne puisse pas accélérer l'évolution. Tout est une question de quantité. Prendre un gramme ou prendre une tonne sur la tête. Ce n'est pas le même phénomène en plus fort. C'est complètement autre. Les biotechnologies, ne sont pas les seules technologies à accélérer une évolution à la fois de la société et des écosystèmes. Ce sont deux systèmes complexes qui sont parfaitement intriqués et interdépendants.»

La suite est à écouter...

Avec :

  • Vanessa Mermet, directrice des campagnes de l'ONG Pollinis (association de protection des pollinisateurs, et pour une agriculture respectueuse de la biodiversité) et membre du Comité de Dialogue "Biotechnologies, environnement et santé" de l'ANSES
  • Frédéric Jacquemart, docteur en biologie, administrateur de FNE (France Nature et Environnement) et membre du Conseil d'administration et du Comité de Dialogue "Biotechnologies, environnement et santé" de l'ANSES.
  • François Parcy, directeur de recherche CNRS en biologie végétale, spécialiste de la génétique moléculaire du développement des fleurs au Laboratoire de physiologie cellulaire et végétale à Grenoble et Médaille d'argent 2022 du CNRS. Son livre « Les clés du champ « « chez Belin fin avril

Rédigé par ANAB

Publié dans #Consommation

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