Nouvelles listes rouges des espèces menacées : la régression de la faune confirmée en Alsace

Publié le 25 Novembre 2024

paru sur l'Alsace le 5/11/2024. Signalé par Bernard. Merci Bernard.
 

Les hirondelles feront-elles toujours le printemps ? Elles décroissent à tire d’aile. Figurant un bilan régulier de l’évolution de la biodiversité dans le Grand Est, les listes rouges des espèces menacées viennent d’être en partie réactualisées. Elles confirment la régression de la faune, en dépit de quelques bonnes nouvelles comme le retour de la cigogne noire.

Un baromètre décennal. Les listes rouges de la biodiversité sont cet indicateur de l’évolution de la biodiversité qui classe les espèces faunistiques, floristiques et fongiques en fonction de leur risque d’extinction à l’échelle d’un territoire. En l’occurrence l’Alsace et plus largement le Grand Est, nouveau cadre de cette analyse globale qui est en cours de publication, dix ans après la précédente (pour l’Alsace seule) et vingt ans après la première enquête. Chaque classe fait l’objet d’une liste rouge spécifique : les oiseaux nicheurs, les reptiles, les mollusques, les odonates, etc. Plusieurs d’entre elles sont encore en cours, comme les mammifères.

Douze millions d’observations

Savez-vous inventorier le vivant ? Cet inventaire, d’où doivent découler les politiques d’aménagement du territoire, repose sur un trésor : douze millions d’observations naturalistes pour la seule faune, un million de nouvelles données chaque année, qui reposent sur les épaules de plusieurs milliers d’observateurs et quelques années de synthèse. « Ces observations concernent 7 000 espèces et permettent de comparer toujours plus finement les occurrences avec les données des décennies précédentes », révèle Yves Muller, président de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) et aussi de l’Office des données naturalistes (Odonat), l’association régionale qui organise et compile la collecte de ces données en s’appuyant sur une méthodologie éprouvée à l’échelle internationale.

Pour les oiseaux nicheurs, 46 % des espèces menacées

Un quart à un tiers d’espèces concernées. « Ces observations nous disent, année après année, la régression continue des espèces communes   », résume Yves Muller. À l’instar des oiseaux nicheurs, dont 199 espèces ont été évaluées : 46 % d’entre elles sont menacées, une moyenne similaire à ce qui est observé sur la planète, avec la disparition de 600 millions d’oiseaux depuis 1980. Et ce, en dépit des éventuelles mesures prises en leur faveur. Les autres listes rouges arrêtées oscillent entre un quart et un tiers d’espèces menacées. Les causes de ce déclin généralisé, qui ne vaut pas pour certaines espèces opportunistes, se limitent à quelques mots : perte de l’habitat et de la nourriture. L’accélération du déclin des insectes en explique une part, les biocides une autre. La surfréquentation des milieux naturels aussi, qui est considérée comme l’un des facteurs d’aggravation de l’état du faucon pèlerin, dont la population, pourtant en hausse pendant des années, a soudain chuté à partir de 2015 pour revenir à son niveau antérieur.

Toutes les mesures destinées à enrayer ce déclin sont-elles insuffisantes ? « Même dans les réserves naturelles allemandes du Palatinat, les populations d’oiseaux des champs ont chuté de 60 % en quarante ans, déplore Yves Muller. Côté français, avec la suppression de 20 000 km de haies par an, il n’y a pas de quoi s’étonner du résultat… »

Le butor étoilé, du danger critique d’extinction à l’extinction

Connus, protégés, mais très menacés. De fait, ce n’était pas une surprise. La biodiversité s’effiloche un peu plus chaque décennie, une espèce après l’autre. Les récentes mesures de renforcement du grand tétras dans les Hautes Vosges soulignent son effacement. Pour sa cousine, la gélinotte des bois, peut-on encore parler de sursis lorsque seuls quelques individus épars et tremblotants parsèment encore les reliefs ? Le courlis cendré, hôte emblématique des rieds, n’en mène pas large. Avec moins de dix couples recensés contre 300 dans les années 1960, il n’est presque plus qu’un souvenir. Ce qui peut laisser d’autant plus perplexe que de l’autre côté du Rhin, l’espère progresse. Dans un grand nombre de communes, des mains enthousiastes ont conçu des hôtels à hirondelles au profit des hirondelles des fenêtres, mais les hirondelles rustiques , qui ne les utilisent pas, ont un statut plus précaire. Hôte des forêts alluviales, la grenouille des champs, est en danger critique d’extinction et n’occupe plus que deux poches le long du Rhin. Ou encore le cochevis huppé, naguère florissant, qui doit notamment sa survie aux prairies d’un aéroport : il était classé en danger en 2015, il est aujourd’hui en danger critique d’extinction. Tout comme l’était le butor étoilé en 2015. Cet oiseau ne vole plus dans les airs désormais, dans notre région. En tout, 14 % des espèces d’oiseaux nicheurs sont éteintes, pour cette seule liste, comme le hibou des marais ou la bécassine des marais.

Cigogne blanche et cigogne noire

Quelques bonnes nouvelles quand même ? À chaque fois que les listes rouges sont actualisées, elles apportent leur lot de mauvaises nouvelles. De bonnes aussi, quelquefois, à l’instar de la cigogne blanche , avec 1 600 couples présents aujourd’hui contre neuf en 1974, et plus récemment de la cigogne noire, avec 150 couples recensés contre… zéro il y a cinquante ans. Plusieurs espèces menacées comme l’oie cendrée ou le balbuzard pêcheur voient leur population augmenter. La chevêchette d’Europe sort également la tête de l’eau grâce aux nombreuses installations de nichoirs adaptés, alors que son statut d’espèce glaciaire aurait pu entraver toute dynamique. Preuve que toute initiative visant à restaurer les habitats naturels, de la renaturation de zone humide à la pose de nichoirs, est plus que jamais justifiée.

De jeunes hirondelles rustiques criant famine. Dans le Grand Est, ses effectifs sont en baisse.   Photo Florian Girardi

De jeunes hirondelles rustiques criant famine. Dans le Grand Est, ses effectifs sont en baisse. Photo Florian Girardi

Dans notre région, le sonneur à ventre jaune est quasi menacé.

Dans notre région, le sonneur à ventre jaune est quasi menacé.

La leucorrhine à gros thorax est une espèce classée en danger.   Photo Raynald Moratin

La leucorrhine à gros thorax est une espèce classée en danger. Photo Raynald Moratin

Oiseau emblématique du ried alsacien, le courlis cendré est en danger critique d’extinction, avec moins de cinq couples nicheurs présents en Alsace.   Photo Florian Girardin

Oiseau emblématique du ried alsacien, le courlis cendré est en danger critique d’extinction, avec moins de cinq couples nicheurs présents en Alsace. Photo Florian Girardin

Pour l’heure, la couleuvre verte et jaune ne fait l’objet que d’une préoccupation mineure.  Photo Anaïs Gsell

Pour l’heure, la couleuvre verte et jaune ne fait l’objet que d’une préoccupation mineure. Photo Anaïs Gsell

La cigogne noire effectue un retour remarqué dans le Grand Est.   Photo Florian Girardin

La cigogne noire effectue un retour remarqué dans le Grand Est. Photo Florian Girardin

L’agrion exclamatif, classé vulnérable.   Photo Raynald Moratin

L’agrion exclamatif, classé vulnérable. Photo Raynald Moratin

L’aeschne des joncs, un odonate classé en danger.   Photo Raynald Moratin

L’aeschne des joncs, un odonate classé en danger. Photo Raynald Moratin

Avec le lynx boréal et le minioptère de Schreibers, une chauve-souris, la loutre d’Europe comptait parmi les trois espèces en danger critique d’extinction en Alsace, d’après les listes rouges de 2015.   Photo Hervé Kielwasser

Avec le lynx boréal et le minioptère de Schreibers, une chauve-souris, la loutre d’Europe comptait parmi les trois espèces en danger critique d’extinction en Alsace, d’après les listes rouges de 2015. Photo Hervé Kielwasser

Le butor étoilé s’est éteint dans le Grand Est.   Photo Florian Girardin

Le butor étoilé s’est éteint dans le Grand Est. Photo Florian Girardin

Rédigé par ANAB

Publié dans #Protection animale

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
T
Merci pour cet article, certes peu réjouissant.<br /> <br /> Les photos, elles, sont absolument réjouissantes !
Répondre
A
Merci Toll
C
Certes rien de réjouissant, mais faut-il s'en étonner?<br /> Attendons le prochain baromètre, sans beaucoup d'espoir.
Répondre
A
Je retiens Christian dans ton commentaire, on peut toujours rêver et espérer.<br /> Il ne faut pas retenir le négatif qui paralyse mais voir toutes les actions d'amélioration, toutes les petites étincelles positives et se plonger dans l'action.<br /> <br /> Roland
B
Rien de réjouissant !
Répondre
A
😫