Le Millepertuis hérissé, Millepertuis hirsute ou Millepertuis pubescent (Hypericum hirsutum).
Publié le 22 Décembre 2024
Voici la « plante-réponse-au-quiz de jeudi dernier. Nous nous donnons rendez-vous au mois de janvier pour le détail des réponses et un nouveau quiz.
Les millepertuis sont des plantes assez connues. Saviez-vous qu’il existe des espèces forestières comme ce Millepertuis hérissé ?
Roland
Nom scientifique : Hypericum hirsutum L., 1753
Origine du nom: du grec « hypo», sous et « ereiké », la presque bruyère, en référence avec sa croissance dans et avec la bruyère. Son nom d’espèce vient du latin« hirsutum », hirsute, velu.
.Nom commun allemand/ dialecte : Behaarte Johanniskraut auch Rauhaariges Harthe
Nom anglais : hairy St John's-wort.
Date de l’observation: le 25 juin à Sarre-Union
Famille de plantes : celle des Hypericacées . Elle contient 7 genres déclinés en 630 espèces, aussi bien des herbes que des arbres, et sont présentes sur tous les continents. A lui seul le genre Hypericum se décline en 516 espèces dont 20 dans notre pays !
Ce genre est caractérisé par la présence de très petites glandes à huiles présentes dans le limbe des feuilles, mais aussi dans ses fleurs. Les glandes transparentes ou noires peuvent apparaitre comme des trous dans les feuilles pour celui qui ne les regarde pas attentivement. Cet aspect « troué » leur a donné comme nom commun Millepertuis ou Herbe aux mille trous.
Autres caractères communs aux espèces de cette famille des Hypericacées, des fleurs en symétrie axiale d’ordre 5, des sépales et pétales libres, des feuilles opposées et sans stipules.
A noter que le classement généalogique de ces fleurs est en refonte. Depuis 2016, les Hypericacées seraient englobées dans la famille des Clusiaceae., un ensemble plus large. Leur spécificité commune est d’être des plantes sécrétrices de résine. L’affiliation aux Clusiaceae est déjà actée sur certains sites comme Wikipédia, INPI. Bizarrement, ce n’est pas encore actualisé sur des sites de référence comme « catalog of life », INPN, Kew garden et d’autres. Sans doute les experts ne sont-ils pas tous d’accord entre eux à ce jour?
Catégorie: plante velue, ramifiée dans le haut, vivace à souche ligneuse.
Hauteur: de 40 à 80 cm
Tiges et racines: la tige est ronde, densément velue de poils ras, sans lignes saillantes.
Feuilles: jusqu’à 1 cm de large et 1 à 6 cm de long, opposées de forme elliptique à linéaires, sans pétiole. Les feuilles sont ponctuées de glandes transparentes à l’intérieur du limbe, mais pas de glandes noires en périphérie, contrairement à d’autres millepertuis.
Floraison: de juin à août.
Le Millepertuis hérissé, Millepertuis hirsute ou Millepertuis pubescent (Hypericum hirsutum). et sa répartition selonl'INPN
Fleurs: en grappes pyramidales de couleur jaune clair, distincte du jaune d’or des millepertuis habituels. Les pétales (8 à 10 mm) et les sépales sont ponctués à leur périphérie de glandes noires très visibles (voir photos) et de cils glanduleux. Les fleurs ont un diamètre de 2 à 2,6 cm, et chaque pétale mesure jusqu’à 13 mm de long.
A noter que les pétales sont découpés en petites dents irrégulières sur un seul côté.
Les étamines sont groupées en trois faisceaux de 24 à 30 longues étamines de 7 à 10 mm.
Les pétales sont environ trois à quatre fois plus grands que les sépales (3-4 mm) qui sont lancéolés et subégaux.
Pollinisation : par les insectes ou par autofécondation
Fruits: graines noires de 1 mm contenues dans une capsule en forme d’œuf de 4 à 7 mm. Leur dispersion est faite par le vent.
Confusion : peu probable avec les autres millepertuis car le Millepertuis hirsute est le seul qui soit velu dans notre pays.
Habitat: ce Millepertuis hirsute préfère les sols bien drainés, neutres et riches en nutriments, notamment en azote. Il est fréquent et présent sur les bords des chemins, les lisières, les clairières forestières, les prés ombragés partout en France . Il est rare sur terrains acides, Bretagne, Ouest et absent de Corse.
Il est présent en Europe, au nord jusqu’en Finlande et à l’est jusqu’en Sibérie occidentale, à des altitudes pouvant atteindre 1800 m. En revanche, il est absent de certaines régions méditerranéennes.
Protection : cette plante est commune mais reste peu fréquente. Elle pousse un peu partout mais rarement en grandes populations. Elle n'a aucune protection légale.
Mythologie : Dans la mythologie teutonne, cette plante était associée au dieu du soleil Baldur et célébrée lors du solstice d’été, le 21 juin.
Par suite de la christianisation, cette plante a été dédiée à Saint Jean Baptiste d’où son nom en allemand et dialecte.
Usage culinaire : ne pas utiliser
Usage médicinal : le Millepertuis perforé, Hypericum perforatum est utilisé en médecine traditionnelle depuis 2400 ans au moins (chez les grecs).
Un de ses nombreux noms était « chasse diable » car il faisait fuir les « esprits tourmenteurs ». Redécouverte au XIXᵉ siècle pour ses vertus médicinales, cette plante est aujourd’hui largement utilisée, notamment en Allemagne, pour traiter la dépression.
Le Millepertuits hirsute présenté ici contient la même huile de couleur rouge dont la couleur provient de l’hypéricine. Elle est riche en acides oléiques et oméga 6 et guérit les brûlures au 1er degré et les plaies cutanées.
A noter que le site de référence Wikiphyto donne des indications thérapeutiques pour le Millepertuis perforé, Hypericum perforatum mais aucune pour notre plante du jour.
Cette injustice est en train d’être réparée. Un article publié voici quelques semaines (1) expose les recherches et tests faits sur 3 millepertuis peu connus dont ce Millepertuis hirsute. Blajack a trouvé que ce millepertuis avait une teneur plus élevée en quercetine et rutine et en composés phénoliques que le Millepertuis perforé. Ces substances sont en théorie et en tests in vitro de puissants piégeurs de radicaux libres, ces ions à l’origine de la plupart des cancers.
Ils réduisent aussi les ions ferriques, signe de leur potentiel antioxydant et inhibent certains enzymes comme la monoamine oxydase A (enzyme qui dégrade la dopamine dans le cerveau).
Il faut tout de même se questionner sur l’efficacité de ces composants et ne pas en attendre des miracles. Selon de récentes études, ils sont détruits en grande partie dans notre système digestif. Aucune étude d’ampleur n’a pu démontrer leur efficacité après digestion.
Toxicité : oui, il existe un danger à l’utiliser. Les composants de la plante interagissent avec d’autres médicaments dont les antidépresseurs.
La plante est toxique en raison de la présence de glucosides comme l’hypéricine qui est photo-sensibilisante, mais elle possède des propriétés anti-inflammatoires, cicatrisantes et apaisantes pour les douleurs articulaires.
La plante est mortelle à 1% dans le fourrage, pour les chevaux, les jeunes bovins et ovins. Les animaux sont atteints de plages d’irritation cutanée liées à la lumière. L’auto-grattage et le dessèchement de la peau peuvent entrainer la mort de l’animal.
Texte et photos Roland Gissinger (Anab) relecture Bernard Weinzaepflen (Anab)
Sources bibliographiques voir index biodiversité
1/ Chemical Composition and Biological Activity of Hypericum Species- H. hirsutum, H. barbatum, H. rochelii- Jovan Baljak- oct 2024
2/ Hairy St. John’s-wort (Hypericum hirsutum L.) in the Toronto Area, New to North America Michael Oldham jul 2011