Programme de restauration écologique du Rhin
Publié le 24 Janvier 2025
Le programme “Rhinaissance 2.0” a pour objet de planifier la restauration écologique du Rhin sur le secteur de Rhinau - ici le Taubergiessen du côté du Herrenkopfbrücke.
paru sur l'Alsace le 16/1/2025 . Transmis par Bernard. Merci Bernard.
« La commune de Rhinau a été démarchée il y a quelques années par des autorités allemandes, qui sont venues nous dire qu’elles avaient une étude pour renaturer le Taubergiessen et le Vieux Rhin. Mais nous n’avions jamais été sollicités », raconte Marianne Horny-Gonier, maire du village frontalier depuis 2020 et conseillère régionale du Grand Est. Or, Rhinau est propriétaire, depuis le XVIe siècle, de quelque 1000 hectares sur la rive allemande du Rhin, soit plus de la moitié de ce qui est devenu la réserve naturelle du Taubergiessen, aujourd’hui classée Natura 2000 et reconnue “zone humide d’importance internationale” par la convention de Ramsar.
Coconstruction transfrontalière
Après cette première tentative “unilatérale”, la problématique de la restauration écologique du secteur (incluant l’île de Rhinau), qui souffre des aménagements successifs du fleuve, a été reprise de façon résolument transfrontalière. « En 2019, poursuit Marianne Horny-Gonier, le ministre de l’Environnement du Bade-Wurtemberg, Franz Untersteller, était à Rhinau pour la Journée mondiale des zones humides. Il a admis que les communes propriétaires - Rhinau côté français, Kappel-Grafenhausen, Rheinhausen, Rust côté allemand - devaient être associées. Il a proposé de repartir de zéro. »
Désormais bien établie, cette démarche de coconstruction franco-allemande a abouti en 2022 à une première étude, baptisée “Rhinaissance”, financée par la région Grand Est, le Regierungspräsidum de Fribourg-en-Brisgau et le fonds européen de coopération transfrontalière Interreg. En 2023, ce dernier a décidé d’accorder 3,1 millions d’euros supplémentaires pour une deuxième phase, “Rhinaissance 2.0”, dont le budget total s’élève à 5,2 millions. La Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal) Grand Est participe à hauteur de 1,25 million, le Land du Bade-Wurtemberg à hauteur de 0,68 million. La région Grand Est coordonne.
Rétablir la continuité piscicole
La Dreal est chargée de la maîtrise d’ouvrage du volet le plus concret – et le plus coûteux (4,4 millions d’euros) - de Rhinaissance 2.0 : la réalisation, pour « rétablir la continuité piscicole », de deux nouvelles passes à poissons, en lieu et place des actuelles. Elles sont présentes sur les seuils fixes (dits “agricoles”) aménagés dans les années 1960 pour maintenir le niveau de la nappe phréatique, mais leur efficacité s’avère limitée et d’importants progrès ont été faits en la matière.
Le choix de la conception sera arrêté d’ici fin mai, la Dreal aura recours à l’expertise d’EDF, qui a multiplié ce type d’aménagement sur ses sites de production hydroélectrique. Les travaux devraient s’étaler de mai à décembre 2026, date butoir du financement. Il faudra optimiser la durée et la période d’intervention, en tenant compte à la fois de la faune locale et des risques de crue.
Face à l’île de Rhinau, aujourd’hui classée Natura 2000 et reconnue “zone humide d’importance internationale” par la convention de Ramsar
Préparer une troisième phase
L’autre volet de Rhinaissance 2.0 prévoit des études de faisabilité plus approfondies sur les mesures retenues lors de la phase précédente, le “scénario de restauration écologique pionnier : abaissement du chemin de halage pour permettre une reconnexion entre le fleuve et la plaine alluviale voisine, recul et renaturation des berges artificialisées… Des sondages sur la composition et le comportement des sols viennent de démarrer, une modélisation des impacts des mesures doit être réalisée, des retours d’expériences en provenance d’autres régions vont être analysés.
« Il s’agit de démontrer que ce que nous réaliserons améliorera bel et bien la biodiversité », résume Volker Späth, désormais retraité de l’Institut d’écologie paysagère et de la protection de la nature de Bühl, mais qui continue de s’occuper du projet. Une planification détaillée des mesures doit être présentée fin 2026, l’idée étant d’obtenir leur financement au titre du prochain programme Interreg.
« Il y a urgence, ces aménagements ne sont pas un luxe, mais une nécessité », estime Nadja Lutzwiller, cheffe de projet chez Ingérop, groupe français spécialisé dans l’ingénierie et le conseil en mobilité durable, transition énergétique et cadre de vie.
Une biodiversité à rétablir
« La biodiversité a beaucoup diminué quand le Rhin a été rectifié puis canalisé, explique Marianne Horny-Gonier, la maire de Rhinau. Au fil du temps, on en perçoit davantage les aspects négatifs. » Chargé de mission environnement à la région Grand Est, Christian Blum décrit « de fortes contraintes » s’exerçant sur le Vieux Rhin, avec l’absence de continuité piscicole, le développement des algues, la diminution de l’oxygène et un réchauffement des eaux sur les festons pendant les périodes de forte chaleur.
Rhinaissance 2.0 doit notamment offrir « des possibilités de zones refuges pour la faune piscicole en développant une dynamique des milieux alluviaux ». Marianne Horny-Gonier évoque également des zones qui joueront le rôle de “climatiseurs” face aux effets du réchauffement climatiqu