Les “policiers de l’environnement” en ont assez d’être pris pour cible

Publié le 21 Février 2025

Les agents de l’Office français de la biodiversité condamnent la stigmatisation dont ils font l’objet.

Les agents de l’Office français de la biodiversité condamnent la stigmatisation dont ils font l’objet.

paru sur l'Alsace le 11 février 2025 signalé par Bernard. merci Bernard.

« Choqués, « en colère », « touchés » : les mots se bousculent dans la bouche de deux agents de l’Office français de la biodiversité (OFB), rencontrés sur le site de Rosheim. Face aux nombreuses « mises en cause » et « contre-vérités » exprimées depuis le déclenchement de la crise agricole, les deux inspecteurs de l’environnement font une mise au point sur leurs missions.

La critique n’est pas nouvelle. Déjà du temps de l’Agence française pour la biodiversité et de l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques - les ancêtres de l’Office français de la biodiversité - « les tensions existaient. En 2024, c’est la dimension nouvelle de la contestation qui nous a surpris », témoigne Erwan Hornier, chef de l’unité territoriale Bas-Rhin sud de l’OFB, basée à Rosheim.

Pour mémoire, lors des grandes manifestations de janvier 2024, les syndicats agricoles majoritaires avaient dénoncé la mission de contrôle exercée par la police de l’environnement. « Pour certains, l’OFB est vu comme un problème, décrypte Erwan Hornier. Notre établissement public et le Mercosur ont même été mis sur le même plan, comme si l’OFB était aussi responsable des difficultés de l’agriculture , davantage liées au contexte international et à la concurrence déloyale. Nous sommes des boucs émissaires. »

Les agents de l’OFB, associés aux représentants d’autres forces de l’ordre assurent des opérations de police de l’environnement jusque sur les rives du Rhin

Les agents de l’OFB, associés aux représentants d’autres forces de l’ordre assurent des opérations de police de l’environnement jusque sur les rives du Rhin

 On ne débarque pas comme ça, sans raison, chez un agriculteur »

« Cloués au pilori », les agents de l’OFB condamnent la « stigmatisation » dont ils font l’objet. Si aucun fonctionnaire de l’UT sud n’a reçu de menaces verbales ou physiques depuis la montée de fièvre de l’an dernier, « la pression est toujours là », selon le responsable du site de Rosheim. Pour preuve, le mouvement national de grève du 31 janvier - « spontané et très suivi » - qui « résulte d’une grande colère ». « On en a un peu marre d’être les paillassons », lâche Gilles Nonnenmacher, technicien et inspecteur de l’environnement à l’OFB.

Cette colère se nourrit, selon les deux agents, de plusieurs « contre-vérités ». Notamment concernant les inspections. « Certains ont donné l’impression que l’on effectuait énormément de contrôles d’exploitations agricoles. Forcément, les agriculteurs travaillent avec la nature donc ils sont plus exposés. Mais ces contrôles représentent moins de 10 % de l’activité police (au niveau national). Et dans le Bas-Rhin, ils se passent bien. »

Ces inspections, insistent les fonctionnaires, obéissent à des règles. Soit il s’agit d’opérations de police administrative organisées au niveau préfectoral ; soit cela fait suite à une constatation d’infraction, en lien avec le tribunal judiciaire. « On ne débarque pas comme ça, sans raison, chez un agriculteur », confirme le chef de l’UT sud.

Les agents de l’État lors d’un contrôle de chasseurs opéré par l’Office français de la biodiversité lors d’une action de chasse dans le massif forestier du Kastenwald

Les agents de l’État lors d’un contrôle de chasseurs opéré par l’Office français de la biodiversité lors d’une action de chasse dans le massif forestier du Kastenwald

« Est-ce qu’on reproche aux gendarmes de faire leur métier ? »

Autre mise au point : le port de l’arme. « Ce n’est pas un privilège que l’on nous accorde, rappelle Gilles Nonnenmacher. On n’a pas toujours affaire à des enfants de chœur (notamment dans les cas de trafics d’espèces protégées ), on ne sait jamais comment une personne peut réagir et on peut contrôler des gens eux-mêmes armés. Cela touche à notre propre sécurité. »

Enfin, dernière source d’agacement : l’attitude de l’État. Un soutien « qui a tardé à venir » et des déclarations « contradictoires » ont semé le trouble. Tout particulièrement celle du Premier ministre François Bayrou qui, mardi 14 janvier, avait qualifié de « faute » certaines inspections auprès des agriculteurs. « Notre cadre de travail est défini par l’État. On applique juste la loi de la République ! », lance le responsable bas-rhinois. « Est-ce qu’on reproche aux gendarmes de faire leur métier ? » prolonge Gilles Nonnenmacher.

L’OFB rappelle aussi les bons usages dans les espaces naturels sensibles

L’OFB rappelle aussi les bons usages dans les espaces naturels sensibles

Cette remise en cause a au moins le mérite, veut positiver Erwan Hornier, de mettre en lumière l’action de l’OFB, de rappeler sa « plus-value » - « technicité, connaissance naturaliste et du territoire » - et d’interroger notre ambition collective en termes de défense de l’environnement. « À force d’attaquer l’OFB, on attaque la biodiversité. Est-ce que défendre l’eau , l’air, le sol est accessoire ou vital ? Est-ce que la mission de l’OFB est utile ? C’est à la société de répondre. »

Parmi les soutiens contre “l’OFB-bashing” qui ont été apportés localement à l’OFB figure celui de la Fédération départementale de pêche du Haut-Rhin. Dans un courrier adressé à l’antenne colmarienne de l’OFB, son président Jean-Claude Zwickert rappelle combien l’OFB assume « son rôle de rempart contre l’érosion de la diversité […] face aux pratiques illégales qui la dégradent […] alors qu’elle est la base même de la vie […], alors que des critiques injustifiées visent des réglementations qui ont mis des années à progresser et qui font leurs preuves ».

Rédigé par ANAB

Publié dans #Actu-conf-films-expo

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T
Je fais l'amalgame des commentaires de Jpl, Christian et Bernard, et tout est dit sur ce domaine, et bien d'autres.<br /> Les grands décideurs décident.<br /> Tout en bas de l'échelle il y a ceux qui sont chargés de mettre en pratique ces décisions. L'infanterie en quelque sorte: les agents de l'OFB, les profs, les soignants, des maires et des magistrats aussi, tout un monde qui risque les incivilités et les agressions. <br /> Y a-t-il, quelque part, un système de communication entre le haut et le bas? On en doute.<br /> Les grands décideurs, eux, sont bien à l'abri. Leur seule crainte, leur seule motivation? les élections.
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J
Bien d’accord
A
Merci Toll. Constat peu réjouissant mais réaliste<br /> Roland
B
L'OFB est sacrifié sur l'autel de la paix sociale avec certains agriculteurs.
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A
C'est cela mais c'est aussi renier sa propre parole et la loi!<br /> oland
C
Merci Roland de cet article qui rappelle l'existence de l'OFB et surtout que son action s'inscrit dans le cadre de la loi. Cette loi qui est sensée être connue de tous.<br /> On ressent à la lecture de l'article le problème qu'on peut étendre à l'ensemble du pays, quelque soit le domaine d'activité concerné, je veux dire réciproquement le manque d'information et surtout l'absence entre les acteurs sociaux de tout dialogue, de toute conciliation, voire de respect.<br /> C'est la France, le pays du " Cogito,sum " de Descartes.Ne l'oublions pas!<br /> <br /> Ps Un article sur les missions de l'OFB serait le bien venu.
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A
Merci Christian mais rendons à César ce qui est à César. C'est Bernard qui m'a transmis cet article et qui est souvent à l'origine d'articles republiés sur notre blog. Je transmets donc ton merci.😁😁<br /> <br /> Pour le reste, tu as tout à fait raison. Comment reprocher aux agents de faire leur travail , de faire respecter la loi? Ils ne font pas de zèle tellement on leur exige en continu de ne rien faire contre certains écodélinquants?<br /> Roland
J
La défense de l’environnement est malheureusement très loin de faire l’unanimité et cela au plus haut niveau de l’état, surtout si l’on qualifie de faute les mesures de contrôle elles mêmes originaires des institutions. Notre monde politique est incapable de raisonner avec intelligence dans ce domaine de la protection de la vie sur la planète, les agents de l’OFB ont beaucoup trop d’ennemis…
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A
Merci Jpl. C'est bien cela. Si tu lis le rapport de 2024 des sénateurs sur l'OFB c'est consternant.<br /> Roland