L’arbre du mois : le Noyer commun, le Noyer royal (Juglans regia)
Publié le 2 Avril 2025
Le noyer est un arbre familier de nos contrées. Il accompagne tous les villages, jardins, vergers et vigne. Mais, avez-vous déjà vu ses fleurs ? C’est le moment d’ouvrir l’œil car il a fleuri dans le midi ou va fleurir ces prochaines semaines chez vous.
Roland
Nom scientifique : Juglans regia L., 1753
Origine du nom : vient d’une contraction des mots latins «jovis» , Jupiter, et « glans », « le gland », donc le gland, le fruit de Jupiter pour bien marquer l’intérêt alimentaire et gastronomique de ce fruit au contraire du « gland des chênes » sans intérêt pour les humains. « regia » signifie royal pour renforcer la place grandiose de ce fruit.
Autres noms communs (INPN) : Noyer, Noyer anglais, calottier, écalonnier, gojeutierl[
Nom en dialecte Nussbaum, et en allemand : Wallnussbaum oder Echte Walnuss
Nom anglais : common walnut or Persian walnut.
Date de l’observation: le 2 avril à Bust (Bas-Rhin 67)
Famille de plantes : il fait partie de la famille des Juglandadeae, une petite famille d’une soixantaine d’espèces. Elles sont toutes situées dans la zone tempérée.
Arbres ou arbustes à feuilles caduques riches en tanins, ce sont des espèces monoïques. Les fleurs mâles sont disposées en chatons pendants, tandis que les fleurs femelles sont plus ou moins regroupées.
Le noyer commun est le seul représentant historique de cette famille dans notre pays. Ces dernières années des plants du Noyer noir d’Amérique, Juglans nigra, apparaissent dans les jardins mais aussi dans les haies de nos campagnes. C’est un arbre magnifique, mais dont les noix doivent être coupées à la hache pour être ouvertes.
Hauteur: de 20 à 25 mètres (30 m en peuplement dense) avec un tronc de plus de 1 m de diamètre (comme celui de Saint Didier en Côte d’or).
Son houppier est sphérique.
Longévité : plus de 150 ans, mais sa croissance en hauteur s’arrête vers 60 à 80 ans.
Tronc : son écorce est gris clair et lisse quand il est jeune et crevassée grise quand il est plus vieux.
Feuillage: ses feuilles sont découpées en 5 à 9 folioles. Leur longueur varie de 6 à 15 cm, pour 2 à 6 cm de large. La foliole terminale est la plus longue.
Les folioles sont lancéolés, non dentés, verts sur les deux côtés, velus sur les nervures du dessous. Au débourrage les feuilles sont brun rose. Le pétiole est long et glabre. Les feuilles dégagent une forte odeur quand on les froisse.
Floraison: de mi avril à mai
Fleurs: les fleurs sont sans pétales et regroupées en chatons.
Les fleurs mâles forment sur les rameaux de l’année précédente des chatons pendants de couleur verte de 6 à 12 cm. Les chatons femelles ont 2 à 5 fleurs vertes et sont sur les rameaux de l’année. Les fleurs femelles de 10 à 15 mm sont constituées par la soudure de deux carpelles prolongés par un style court et terminé par deux stigmates plumeux.
Les feuilles apparaissent en même temps que les fleurs.
Pollinisation
La pollinisation des fleurs du noyer est assurée par le vent comme pour la plupart des arbres à fleurs disposées sur des chatons. Les fleurs mâles apparaissent plusieurs semaines avant les fleurs femelles (protandres). Le noyer peut s’autopolliniser.
Confusion possible : non
Habitat: C’est un arbre de lumière qui aime les sols profonds, argileux et bien drainés, calcaires ou acides. Il est bien acclimaté aux altitudes de 700-1000 m. Son aire de culture est l’Europe, le Moyen-Orient, toute l’Asie mais seulement sur une mince bande passant par l’ Afghanistan, le Nord de l’Inde et le Sud de la Chine. Il a été introduit sur d’autres continents.
Il existait des forêts naturelles de noyers au Kirghizstan et en Ouzbékistan.
Histoire du noyer :
On pensait jusqu’à ces dernières années que le noyer avait disparu pendant les glaciations et en particulier lors de la dernière voici -125 000 ans. Les historiens pensaient que le noyer avait recolonisé l’Europe depuis le Moyen Orient, à la fin de la dernière glaciation voici -11 000 ans. Il n’en est rien. Le noyer a survécu pendant cette période dans des refuges glaciaires sur différents sites et en particulier dans les Balkans.
Pour étayer cette hypothèse, ils ont cherché (et trouvé) des grains de pollen de noyer ou des coques de noix (par exemple dans des tourbières). Les sédiments de nombreux sites contenant ces traces de noyer ont été datés avec précision notamment grâce à la méthode au radiocarbone (isotope 14 du carbone) ainsi que par la stratigraphie.
En Alsace, il était de tradition de planter des noyers dans les vignes. Cette plantation s’est accélérée vers le XVIII siècle quand le vin se vendait mal. Les noyers étaient si nombreux à Rouffach, que des vignerons se sont plaints au conseiller du Roy, Monseigneur Pineau. C’était le 28 janvier 1754 , ils ont demandé l’arrachage des noyers « Depuis plusieurs années l’on s’aperçoit que les propriétaires des vignes s’avisent d’y planter des noyers, de façon que le nombre des arbres de cette espèce s’est tellement accru que les vignes paroissent estre plus des forêts que des vignes. »
Fruit : c’est une drupe verte. Un tégument vert et épais, le brou, entoure une coque ligneuse formée de deux demi-coques. La coque (3 à 6 cm) a un relief très ridé. Elle abrite la graine ou amande à 4 lobes très sinueux. Un noyer ne produit des noix qu’après une bonne dizaine d’années.
Écologie : les feuilles, et surtout le brou du noyer, contiennent un constituant phénolique, la juglone. Cette substance colore les mains des ramasseurs ,comme tout le monde peut le constater. La juglone possède un pouvoir antigerminatif contre de de nombreuses plantes. Les plantes précoces à bulbe sont moins sensibles car leur développement se fait au printemps quand la teneur juglone est la moins élevée et quand la lumière est présente car l’arbre n’est pas encore feuillé.
Les noix sont mûres quand elles se détachent de l’enveloppe externe. Un bon noyer produit ses premières noix à l’âge de 16 ans (10 kg/an). L’optimum de production pour un arbre se situe entre 35 et 80 ans. Il peut produire en moyenne chaque année 55 kg dans un bon emplacement et seulement 13 kg dans un mauvais. Les productions de noix sont alternantes. Un très bon noyer peut même produire jusqu’à 150 kg de noix.
Un bon séchage des noix à l’air sec est impératif pour assurer leur conservation et éviter le développement de moisissures.
Statut : arbre cultivé sans statut de protection. Il existe des centaines de variétés, certaines propres à un seul pays.
Remarquez qu’il existe à présent des moyens juridiques pour protéger un arbre remarquable comme un beau noyer. Il faut l’inscrire sur un document d’urbanisme ou sur un acte notarié lié à la propriété de la parcelle sur laquelle se trouve l’arbre.
Légende : une croyance alsacienne énonce qu'une « femme qui veut garder son mari doit conserver dans son soulier gauche une feuille de Nussbaum (en alsacien, le noyer) cueillie la nuit de la Saint-Jean.
On raconte aussi que dormir sous un noyer en été c’est prendre un gros risque d’attraper une maladie pulmonaire.
Bois : son bois indigène, et prisé pour sa qualité exceptionnelle, est très apprécié des ébénistes et menuisiers. Son veinage contrasté, sa couleur claire, son grain fin permettent des usages très variés : meubles, sculpture, coutellerie de luxe, pièces de jeu d’échecs, instruments de musique.
Il est moyennement résistant. Sa masse volumique varie de 550 à 700 kg/m³ tandis que celle du chêne avoisine les 1000 kg/m³ et celle de l’ébène atteint environ1100 kg/m³.
La base du tronc présente des dessins spéciaux en prolongement avec les racines. C’est la loupe. Elle est très recherchée pour son aspect esthétique
et utilisée pour décorer montres, voitures ou appartements hauts de gamme.
Le brou de noix est fabriqué avec l’enveloppe verte de la noix. Il sert de teinture, pour le bois, les tissus et les cheveux, depuis la nuit des temps.
Médecine : les feuilles et les noix de cet arbre sont riches en vertus médicinales. Voir la fiche complète sur wikiphyto- le paragraphe ci-dessous est copié de wikiphyto, un site sérieux et de référence.
Composition :
Feuilles : Tanins du type ellagique, Naphtoquinones, Flavonoïdes, Acides phénols, Huile essentielle Acide ascorbique
Noix : acides gras essentiels, de 42 à 60% : le très important Acide alpha linolénique (oméga 3) = 7 à 12 %, acide linoléique oméga 6 = 50 %, acide oléique oméga-9 = 15-23%
Propriétés des feuilles :
- Astringentes et cicatrisantes par les tanins
- L’hydrojuglone s’oxyde en juglone ou 5-hydroxy-naphtoquinone aux propriétés antiseptiques
-Les feuilles sont légèrement hypoglycémiantes et antidiabétiques, augmentent la détoxication hépatique
- La juglone est antitumorale sur les tumeurs ascitiques d’Ehrlich et cytotoxique sur certaines cellules de cancer du poumon
- Antimicrobien, Antioxydant, anti-tumoral par piégeage des radicaux libres (tanins)
Propriétés des noix et de l’huile de noix :
- La noix est remarquablement antioxydante, , anti-athéromateuse et stimulante des ostéoblastes
- Une portion de 30 grammes de noix réduit le cholestérol total et LDL
- La consommation de noix pourrait réduire le risque de maladie cardiovasculaire en augmentant la production endogène d’homoarginine
-- L'huile de noix est hypocholestérolémiante, hypotriglycéridémiante, anti-inflammatoire, anti-agrégante plaquettaire
- Inhibition de la toxicité de l'aflatoxine
Du fait quasi systématique, de l’absence de preuves scientifiques des effets médicaux des plantes ou de résultats incomplets, il est déconseillé, de manière générale, de les utiliser sans un avis médical expert, pour soigner une maladie précise.
Texte et photos Roland Gissinger (Anab) Relecture Bernard Weinzaepflen (ANAB)
Sources bibliographiques voir index biodiversité