Dactylorhize sureau, Orchis sureau, Dactylorhize à feuilles larges (Dactylorhiza sambucina)

Publié le 18 Mai 2025

Dactylorhize sureau, Orchis sureau, Dactylorhize à feuilles larges (Dactylorhiza sambucina)
Dactylorhize sureau, Orchis sureau, Dactylorhize à feuilles larges (Dactylorhiza sambucina)
Dactylorhize sureau, Orchis sureau, Dactylorhize à feuilles larges (Dactylorhiza sambucina)

Dactylorhize sureau, Orchis sureau, Dactylorhize à feuilles larges (Dactylorhiza sambucina)

Cette petite orchidée de montagne est précoce.  Elle se distingue par la présence simultanée d’individus de deux, et même trois couleurs très différentes.
Roland


Nom scientifique : Dactylorhiza sambucina (L.) Soó, 1962

Origine du nom: « dactylorhiza»  vient du grec « dactulos » doigt  et de « rhiza » qui signifie «racine» ; donc « racines en forme de doigts ».
Son nom d’espèce « sambucus », fait référence à une légère odeur de sureau chez certains plants.


Nom commun dialecte/ allemand: Holunder-Knabenkraut

Nom anglais : elder-flowered orchid,

Date de l’observation: le 2 mai  lors de la sortie ANAB au Grand Ballon  (Haut-Rhin 68).  La photo de montagne a été prise au Col des Champs, point de passage du département des  Alpes-de-Haute-Provence à celui Alpes-Maritimes .


Famille de plantes : les Orchidées, dont fait partie le phalaenopsis, l'orchidée des grandes surface et jardineries, ainsi que la vanille exotique et le très rare sabot de Vénus. Les plantes de la famille des Orchidées sont très évoluées d’après les scientifiques. Elles s’installent dans tous les milieux, des plus secs aux plus humides. Il en existe près de 30 000 espèces. Elles sont menacées car peu résistantes à la pollution et sont quelquefois pillées.

Une des particularités des orchidées est leur vie en symbiose avec un champignon.
Elles ont besoin de trouver dans le sol un champignon spécifique avec lequel elles s’associent. Il leur est indispensable pour faire germer leurs graines. Car celles-ci sont microscopiques et presque dépourvues des réserves contrairement à la plupart des graines des autres plantes. C’est au fur et à mesure du développement de leur symbiose avec les champignons qu’elles ont perdu la faculté de développer des graines avec réserves. De ce fait, elles ont un besoin impératif du mycélium émis par ce champignon « compagnon ». Ce fin filament puise les nutriments minéraux dans le sol pour sa croissance et les partage avec l’orchidée.
Grâce à ses apports, la graine va pouvoir germer et développer ses premières racines et feuilles.  Le champignon mycorhizien est très sensible aux changements d’acidité des sols provoqués par des apports de lisier et d’engrais chimiques ainsi qu’aux pesticides.
Pour cette raison les orchidées sont très sensibles à la pollution par les fongicides, herbicides et aux surcharges en azote et engrais même à faible dose.

Les orchidées de notre région sont en voie de disparition. Leurs milieux naturels, coteaux secs et zones humides disparaissent. Les pratiques d’agriculture intensive avec engrais et fumures et les fauchages trop précoces (avant juillet et août) empêchent la production de graines, et épuisent les tubercules


Aspect général: plante vivace aux vives couleurs jaune ou rouge.

Hauteur: 10 à 30 cm

Tiges et racines: la tige est verte, unique, robuste et creuse. Elle porte de nombreuses fleurs formant un épi. Sa racine est formée de lobes tubérisés (2 à 6 cm) en forme de doigts de patte d’oiseau. Une part alimente la tige tandis que l’autre grossit durant la belle saison et accumule des réserves. Au début de l’année suivante ce tubercule assurera la croissance des feuilles et de la tige.

Feuilles: de couleur vert brillant, non tachetées, lancéolées. Les 3 à 7 feuilles sont de forme obovale et disposées en alternance sur la tige. Elles mesurent 6 à 12 cm de long pour 1 à 2,5 cm de large. Des feuilles plus petites, dénommées bractées, sont présentes dans l’inflorescence. Elles sont plus grandes que les fleurs.

Dactylorhize sureau, Orchis sureau, Dactylorhize à feuilles larges (Dactylorhiza sambucina)
Dactylorhize sureau, Orchis sureau, Dactylorhize à feuilles larges (Dactylorhiza sambucina)
Dactylorhize sureau, Orchis sureau, Dactylorhize à feuilles larges (Dactylorhiza sambucina)
Dactylorhize sureau, Orchis sureau, Dactylorhize à feuilles larges (Dactylorhiza sambucina)
Dactylorhize sureau, Orchis sureau, Dactylorhize à feuilles larges (Dactylorhiza sambucina)
Dactylorhize sureau, Orchis sureau, Dactylorhize à feuilles larges (Dactylorhiza sambucina)
Dactylorhize sureau, Orchis sureau, Dactylorhize à feuilles larges (Dactylorhiza sambucina)
Dactylorhize sureau, Orchis sureau, Dactylorhize à feuilles larges (Dactylorhiza sambucina)

Dactylorhize sureau, Orchis sureau, Dactylorhize à feuilles larges (Dactylorhiza sambucina)

Floraison: de mi  avril  à juin.  La floraison débute plus tôt dans les régions méditerranéennes. Les fleurs peuvent avorter avec le gel et être compromises
 l’ année suivant une sécheresse. Les chercheurs ont trouvé qu’il fallait un minimum de feuilles pour avoir une floraison (3 à 4). Ceci parait normal puisqu’il faut des éléments nutritifs pour les fleurs. Les plantes à 5 feuilles fleurissent plus régulièrement. En moyenne 20% d’entre elles ne produisent pas de fleurs pendant plusieurs années.


Fleurs: les 10 à 40  fleurs, mesurent 4 à 10  mm. Elles forment  une inflorescence dense en épi, allongé, de 5 à 10 cm de long.
Les plants possèdent des fleurs soit de couleur pourpre à gorge orangée et d’autres complètement  jaunes clair avec une gorge, ponctuée de rouge. Le rapport des deux couleurs est variable sans que l’on sache ce qui influe. Des individus entièrement orangés existent mais rares (1.1 à 2.4% selon les endroits d’après Kropf 3).
La fleur est composée de pétales et sépales difficiles à distinguer. Ici, on parle de tépales. Les 2 tépales latéraux sont dressés, et le tépale arrière est très proche. Le tépale du bas allongé et dénommé labelle est ponctué de rouge. L’arrière de la fleur est en forme d’éperon conique et descendant.

Au dessus du labelle se trouvent les organes reproducteurs, pollinies et pistil, et à l’arrière un éperon de 5 à 8 mm, dirigé vers le bas.
Le labelle est profondément divisé en 3, la division du milieu est elle-même bifide. Il est pendant, allongé et mesure 10 à 15 mm.


Pourquoi deux couleurs jaune et rouge aussi différentes pour une même fleur ? (les spécialistes parlent de « morphes »)
Est-ce un avantage évolutif ? Un lien avec le sol ? Avec les pollinisateurs ?
Les causes de ces différences de couleur n’ont pas encore été clairement déterminées.
Les chercheurs se sont cassé les dents pour connaitre les raisons de la répartition des plants jaunes/rouges.
Gigord (3) n’a trouvé aucun lien avec la nature du sol (pH, calcium), l’altitude ou la densité de la population.
Par contre dans son étude faite dans les Cévennes il a démontré que la fécondité des morphes jaunes était inversement proportionnelle à leur fréquence : si le % de plants jaunes augmente leur fécondité diminue. Il suppose que tout se passe comme si les insectes pollinisateurs rétablissaient l’équilibre des couleurs. Ceci n’a pas pu être prouvé par d’autres spécialistes dans d’autres stations naturelles de cette orchidée.

Un article récent (M. Kropf 2023) résume 18 ans d’études de 10 populations autrichiennes de cet Orchis sureau pour tenter de trouver des réponses.
Comment varient les % des 2 morphes : tant le nombre d’individus que les % de chacune de deux couleurs varient. Notez sur les graphes la grosse réduction des populations avec le changement climatique et sans doute des impacts de l’intensification agricole.

Site à dominance alternée, jaune puis rouge, puis jaune, puis ...
Observations annuelles des morphes rouges et jaunes de l’Orchis sureau sur le site de Waldviertel à dominante jaune


Il a constaté une stabilité des individus de même couleur sur 18 ans sur la plupart des sites. La majorité a 60% de morphes jaunes.
Il existe des stations en France et en Italie à dominance jaune et d’autres en Tchéquie à dominance rouge. Quelques petites stations oscillent dans le temps entre une dominance des jaunes et celles des rouges.
Kropf malgré ces 18 années de comptage n’a pas réussi mettre en évidence des critères de variations et de prédominance de couleur. Il a constaté des fluctuations de proportions des 2 couleurs mais aussi de la floraison des orchidées. Certaines années 4% seulement des individus étaient fleuris et la suivante 74%. Ceci à l’évidence provient des conditions climatiques, la quantité et fréquence de la pluie en particulier. Comme l’Orchis sureau est une plante précoce, la température peut jouer sur la pollinisation par les bourdons et donc sur la réussite des fécondations. Les bourdons ne peuvent voler et donc polliniser les fleurs si les températures sont trop basses.


Pollinisation :
Les étamines sont soudées en deux petites boules jaunes, les pollinies. Elles vont être mûres avant l’ouverture de la fleur. Les insectes sont attirés par la forme de la fleur et son odeur. Le pollen féconde rarement les parties femelles de sa propre fleur (autogamie). Il féconde les parties femelles d’autres plantes arrivées à maturité. Ce système dit « allogamie » est le plus répandu chez les plantes. Il a l’avantage de croiser les gènes et éviter la dégénérescence des espèces.
Les insectes en particulier les bourdons assurent le transport du pollen vers d’autres fleurs. Bombus bohemicus, B. hortorum, B. hypnorum, B. lapidarius, B. lucorum, B. muscorum, B. pascuorum, B. ruderarius, B. ruderatus, B. sylvarum, B. soroeensis selon (3). L’Orchis sureau ne produit pas de nectar mais des substances aromatiques en faible quantité. Les bourdons avec ce mélange de couleurs les confondent peut-être avec d’autres plantes ?


Prouesse des orchidées :
Les orchidées sont souvent des tricheuses . Plus de 30% d’entre elles sont des tricheuses selon des études de 2006 (Jersakova)  et 2011  (Kleynen). Paulus en 2005 affirmait que c’est le cas chez  plus de 81% des orchidées!
Elles attirent les insectes en les leurrant avec l’odeur de la fleur préférée, de possibilité de nidification ou d’odeur de son partenaire mais sans aucune réponse, nectar ou pollen. Les savants parlent de « deceiptive pollination » en anglais ou  pollinisation arnaque, pollinisation par duperie, en français.
Conclusion : cette émission de volatils est une adaptation à la pollinisation. Les chercheurs parlent d’une exaptation ce qui signifie que la production de ces volatils a précédé leur captage spécifique par les antennes des insectes et par suite la pollinisation.



Confusion : elle a un aspect bien typé qui rend difficile une confusion.

Fruits : c’est une gousse. Après fécondation elle va se remplir avec de nombreuses et minuscules graines de moins de 0.5 mm sans réserves de germination. Chaque gousse peut contenir plusieurs dizaines de milliers de graines. Au final, entre trouver le filament du bon champignon, le bon sol, et la bonne exposition, seule une graine sur un million germera et donnera une plante viable.

Habitat : c’est une plante de pleine lumière qui pousse en montagne sur pelouses peu calcaires ou granitiques. Typiquement, ces pelouse sont sèches, maigres, pierreuses. Ce sont des broussailles , friches, prairies naturelles, landes à genêts ou à myrtilliers, bois clairs jusqu’à 2400 m.
Elle est quasi absente des zones de plaine. On la trouve dans toute l’Europe occidentale jusqu’au sud de la Scandinavie.
Elle est absente des îles anglo normandes et de la zone méditerranéenne sud.


Protection : il faut éviter à tout prix son ramassage et sa destruction qui sont par ailleurs rigoureusement interdits par la loi. Plante protégée par la loi dans notre région (l’Alsace) et en Bourgogne (où elle a disparu !). Elle a aussi disparu des régions Pays-de-Loire, Centre, Ile-de-France et Champagne-Ardenne. Elle est  classée CR, en danger critique d’extinction en Limousin, EN en danger en Corse et Alsace
Ravageurs : les cervidés, les sangliers et les limaces sont les principaux ravageurs de cette orchidée. À cela s’ajoute la pression exercée par les promeneurs (quelquefois ravageurs eux-aussi) , souvent inconscients de la rareté de cette plante.

Utilisation médicinale : Utilité alimentaire:
Aucune des croyances anciennes leur attribuant des vertus aphrodisiaques n'est avérée. Ces croyances ont contribué à une cueillette excessive et provoqué leur raréfaction. La richesse en polysaccharides de ses bulbes a accentue sa raréfaction par le déterrage  et la vente dans les pays du Moyen Orient où il a la dénomination de « salep »  


Photos, texte Roland Gissinger (Anab)  Relecture : Bernard Weinzaepflen (Anab)

Nom taxon franç

Nom scientifique ab

Céphalanthère pâle, Céphalanthère à grandes fleurs, Helléborine blanche

Cephalanthera damasonium

Épipactide rouge sombre, Épipactis rouge sombre, Épipactis brun rouge, Épipactis pourpre noirâtre, Helléborine rouge

Epipactis atrorubens

Epipactis des marais

Epipactis palustris

Gymnadène à long éperon, Gymnadénie moucheron, Orchis moucheron, Orchis moustique

Gymnadenia conopsea

Listère ovale, Grande Listère

Neottia ovata

Néotinée brûlée, Orchis brûlé

Neotinea ustulata

Néottie nid d'oiseau, Herbe aux vers

Neottia nidus-avis

Ophrys abeille

Ophrys apifera

Ophrys bourdon, Ophrys frelon

Ophrys fuciflora

Ophrys élevé

Ophrys fuciflora subsp. elatior

Orchis bouc, Himantoglosse à odeur de bouc

Himantoglossum hircinum

Orchis bouffon

Anacamptis morio

Orchis de Fuchs, Dactylorhize de Fuchs, Orchis tacheté des bois, Orchis de Meyer, Orchis des bois 

Dactylorhiza fuchsii

Orchis de mai, Dactylorhize de mai

Dactylorhiza majalis

Orchis mâle, Herbe à la couleuvre

Orchis mascula

Orchis militaire, Casque militaire, Orchis casqué

Orchis militaris

Orchis pourpre, Grivollée

Orchis purpurea

Orchis pyramidal, Anacamptis en pyramide

Anacamptis pyramidalis

Orchis sureau, Dactylorhize sureau, Dactylorhize à feuilles larges

Dactylorhiza sambucina

 

DOMTOM  français

Spathoglottis plicata Blume, 1825

Spathoglottis plicata

 

Rédigé par ANAB

Publié dans #Fleurs jaunes, #Fleurs rouges

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T
Merci pour cette article complet, très instructif, et les superbes photos. <br /> Le tableau récapitulatif m'a permis d'identifier avec certitude (plus ou moins ) les orchis sur lesquels nous sommes tombés lors d'une récente randonnée.
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A
Merci Toll de ton appréciation et belles découvertes de tes orchidees locales<br /> Roland