Déplacements stupéfiants d'espèces: un outil en ligne met en évidence le défi d'améliorer leur protection
Publié le 16 Mai 2025
Article paru sur theguardian déniché par Sylvie-Traduit par Sylvie et Bernard. Merci à eux.
Au large de la côte est de la Floride, les tortues caouannes femelles nagent sur plus de 1 000 km vers le nord, longeant le bord du plateau continental pour rejoindre leurs zones d'alimentation.
Les baleines à bosse traversent la baie de Moreton, au large de la côte de Brisbane en Australie, en route vers des zones d’alimentation situées autour des îles Balleny, à plus de 4 000 km au large de l’Antarctique - où les albatros hurleurs tournent au-dessus d'elles. Elles parcourent 1 000 km par jour.
Aux Pays-Bas, les sternes arctiques quittent leurs colonies de reproduction pour entreprendre l’une des plus longues migrations du monde aviaire : un aller-retour de 90 000 km vers l’est de l’Antarctique.
Il est difficile pour l'Homo sapiens, cette « espèce lente » et attachée à la terre ferme, de concevoir les distances parcourues par ces espèces, des dangers que représentent la haute mer et les frontières tracées par les humains.
Mais les données de ces voyages, et de centaines d'autres, ont été rassemblées pour la première fois dans un nouvel outil informatique qui révèle les déplacements de plus de 100 espèces migratrices à travers les océans de la planète.
« Ce sont des voyages absolument stupéfiants, et ils sont bien plus fréquents qu’on ne le pense. Toutes sortes d’espèces font cela », explique Daniel Dunn, Professeur Associé et Directeur du Centre pour la biodiversité et la science de la conservation de l’Université du Queensland (Australie).
« Certains de ces oiseaux dépensent moins d’énergie en volant qu’en restant au sol. Ils peuvent dormir en plein vol, en mettant apparemment une moitié de leur cerveau en veille pendant que l’autre reste alerte. »
Près de la moitié des espèces qui migrent par l’océan seraient en déclin — ce qui pose un défi unique et complexe aux défenseurs de la nature. Comment un pays peut-il aider à sauver une espèce qui se nourrit ou se reproduit sur son territoire, si cette même espèce est menacée dès qu’elle en sort ?
Une étude, par exemple, a révélé que neuf espèces menacées d’oiseaux de rivage migrateurs, qui visitent l’Australie chaque année, sont chassées durant leur trajet.
Dunn et ses collègues travaillent sur ce problème : ils ont passé en revue plus de 1 000 études sur les déplacements des espèces migratrices et ont intégré les meilleures données dans un système public en ligne appelé Mico (Connectivité migratoire dans l’océan).
Ce système, décrit dans un article publié dans la revue scientifique Nature Communications, est la première tentative visant à donner aux décideurs une idée claire des itinéraires empruntés par les espèces, de leurs connexions, et de ce qu’il faut faire pour les protéger.
La Docteur Lily Bentley, écologue marine spécialisée dans les espèces migratrices et auteure principale de l’article, explique que le système Mico est également utile pour mettre en évidence ce que l’on ne sait pas encore à propos de ces espèces.
Ce système ne présente pas une carte complète de tous les animaux migrateurs, mais c'est la première tentative de synthétiser toutes les études ayant suivi ces espèces.
Par exemple, Mico montre la vaste répartition mondiale des baleines bleues —les habitats des plus grands animaux de la planète. Mais l’outil montre aussi qu’il n’existe pratiquement aucune étude de suivi sur ces baleines sur tout le pourtour du continent africain.