Regards sur des forêts de fond de vallée au fil des saisons (5)
Publié le 15 Juin 2025
Le pré-été s’est installé précocement avec l’entrée en floraison de l’aubépine (déjà signalée dans un article précédent), du robinier, puis du sureau dès la mi-mai et les premières fleurs de tilleul, début juin. La forêt alluviale et la ripisylve que nous avions parcourues au printemps, offrent à présent un couvert dense où règne une quasi-obscurité. Les lisières et petites clairières permettent encore quelques découvertes en laissant de côté quelques poacées et oseilles (rumex)…
Les trois représentants énoncé plus haut (robinier, sureau noir et tilleul) ont ceci de remarquable, nous pouvons sentir leur parfum avant de les voir. D’ailleurs, leurs fleurs font l’objet de préparations diverses en cuisine.
Jeune robinier faux-acacia. Cette espèce devenue familière présente une tendance invasive. Originaire d’Amérique du nord, il a été introduit en France sous le règne de Henri IV. Son bois connaît de nombreux usages. C’est également une plante mellifère et fixatrice d’azote (Fabacées) grâce à la symbiose avec une bactérie du genre Rhizobium.
Le sureau noir est une espèce qui supporte l’inondation passagère. Il profite des sols enrichis en composés azotés fournis par la symbiose qui existe entre l’aulne et la bactérie Frankia alni.
Sur cette photo, le noisetier présent devant le tilleul est recouvert par une vigne vierge grimpante (Parthenocissus) autre invasive des ripisylves, originaire d’Amérique du nord.
Les fleurs de ces arbres sont verdâtres ou blanches, réunies en grappes, corymbes ou cymes.. Voici comment les parfums sont décrits sur le net.
le robinier possède des fragrances de fleur d’oranger,
la fleur de sureau présente un parfum de litchi et de rose avec des notes d’agrumes ou de fruits,
le tilleul offre des notes subtiles, douces qui rappellent le miel.
Poursuivons l’exploration…
L’herbe aux goutteux ou podagre (Apiaceae fleurit dans ces endroits ombragés. Elle est accompagnée ici de la ronce bleuâtre (turion incliné au premier plan). Chaque enfant aura goûté au moins une fois un de ces fruits bleus et pruineux, fades ou acides.
Et puisqu’on est dans les ronces, en voici une autre, dont le fruit est comestible, cette fois …. Cette ligneuse lianoïde dont les aiguillons servent autant à s’accrocher qu’à se défendre, sert ici de support à une autre liane, la clématite à floraison plus tardive.
Ici, la devise pourrait être : ne touchez pas ! Et pour cause, nous avons affaire à l’ortie, une nitrophile qui occupe parfois de vastes étendues dans la forêt alluviale. Au slogan précédent on pourrait rajouter : ne respirez plus ! Les fleurs d’ortie visibles sous forme de grappes grêles lâchent un pollen anémophile allergisant. Elle sert ici de tuteur à une tige de gaillet gratteron aux feuilles verticillées et aux minuscules fleurs blanches donnant les fruits bien connus qui s’accrochent partout.
Ce ne sont pas les fruits du gaillet. Alors, quelle est cette inconnue ? L’espèce a déjà été rencontrée à plusieurs reprises au printemps… Sinon, pour connaître son nom, il faudra se reporter en bas de page.
On a (presque) failli l’oublier… L’iris jaune, l’une des rares fleurs colorées à cette époque, affectionne les prairies humides et aulnaies marécageuses. Elle orne les blasons sous le nom de lys.
Notre promenade naturaliste se termine ici. Dans la forêt alluviale devenue trop sombre, nous avons rencontré bon nombre de lianes (sans oublier le houblon) qui se hissent vers la lumière en profitant de leurs voisins.
Mais avant de tourner la page, il faut se rappeler que l’an dernier, à la mi-mai, ce secteur a connu une crue qui est restée dans les mémoires. Un épisode pluvieux intense a provoqué dans un temps très court, des cumuls de pluie équivalents à un à deux mois de précipitations, à l’origine de crues importantes.
Vue aérienne sur une portion de la vallée, le 19 mai 2024 (document aimablement fourni par Nicole R.). Le document montre le tracé de la rivière souligné par le ruban d’arbres de la ripisylve. A certains endroits, celle-ci s’élargit au profit de la forêt alluviale. La majorité du lit majeur a été envahi par les eaux, causant des dégâts aux habitations situées dans cette zone, ainsi qu’une perte de fourrage au niveau des prairies de fond de vallée.
A l’endroit où la vallée se reserre, la crue a coupé la départementale, rendant nécessaire un détour par un chemin étroit pour accéder aux zones sinistrées. (Cliché fourni par Nicole R.).
Un témoin de cette crue, photographié au printemps 2025. L’objet non identifié a été apporté par les eaux et montre l’ampleur de l’événement.
Autre témoin de ce type d’événement, les embâcles ou accumulations de matériaux apportés par l’eau. Ils façonnent le cours de la rivière mais peuvent également causer des problèmes sur les installations.
*Réponse : photo d’une ombelle de Allium ursinum en fruits.
Textes, photos, recherches, et bibliographie Étienne Feuchter (Anab)
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