Elle dépollue les sols et l’eau grâce à… des plantes !
Le 20 août 2022, sur ANAB Association Nature Alsace Bossue

paru sur le site du CNRS le 19/7/2022

Elle vient de recevoir le prix de l’inventeur européen de l’année ! Claude Grison, directrice du laboratoire ChimEco, a développé des méthodes pour décontaminer les sols et l’eau grâce à des plantes. Mieux encore : les métaux ainsi récupérés servent de catalyseurs « écolos » pour la synthèse de médicaments ou de produits cosmétiques. Gros plan sur sa méthode avec la Jussie d’eau, plante exotique envahissante qui prolifère dans le sud de la France.

Originaire d’Amérique du Sud et introduite au jardin des plantes de Montpellier au XIXe siècle, la Jussie d’eau s’est si bien acclimatée à nos régions qu’elle a envahi les canaux du Rhône. Même constat dans toutes les zones humides du Sud de la France... Avec l’aide d’une société spécialisée, Claude Grison et son équipe en récoltent environ dix tonnes par an.

Sur cette photo, on voit bien le système racinaire de la Jussie d’eau qui prolifère dans les canaux et les rivières. C’est lui qui permet à la plante de capter naturellement une grande quantité d’éléments métalliques présents dans l’eau et de les stocker, grâce à un phénomène physico-chimique appelé biosorption

Retour au laboratoire. Après plusieurs jours de séchage, Serge de Lussy, technicien à BioInspir, broie la Jussie d’eau en une poudre de fines particules. L’intégralité de la plante sera utilisée dans divers procédés de chimie verte, une chimie plus soucieuse de l’environnement, notamment axée sur des méthodes de synthèse et des solvants moins polluants.

Ici par exemple, Armelle Garcia, ingénieure à ChimEco, remplit une colonne filtrante avec la précieuse poudre de Jussie d’eau. Le but est de fabriquer un filtre végétal de biosorption utilisant les propriétés naturelles de la plante pour retenir les métaux et autres polluants.

Le filtre, totalement biosourcé, est ensuite installé par l’équipe de Claude Grison à proximité de l’Orbiel, une rivière polluée de l’Aude. L’eau captée passe à l’intérieur des colonnes filtrantes et la poudre de Jussie d’eau se charge en divers métaux comme le zinc, l’arsenic ou le fer.

Après usage, les filtres gorgés de métaux sont rapportés au laboratoire. Cet appareil (un spectroscope d’émission atomique par plasma micro-ondes) permet d’en mesurer les quantités absorbées. Mais pas question que les filtres deviennent eux-mêmes des déchets, expédiés dans des sites de confinement déjà saturés. Claude Grison tient à leur donner une seconde utilité...

L’innovation majeure est là : les filtres végétaux sont ensuite transformés en «écocatalyseurs». Ils sont «éco(logiques)» car non issus d’activités minières au fort impact environnemental. Et ce sont des «catalyseurs» car ils permettront d’accélérer les réactions chimiques nécessaires à la synthèse de nouvelles molécules. C’est ce que fait cette chercheuse de ChimEco, grâce à un réacteur micro-ondes.

Au final, la Jussie d’eau cesse d’envahir les zones humides. Elle sert de filtre végétal pour dépolluer les eaux contaminées. Et ces filtres sont recyclés en écocatalyseurs pour l’industrie du parfum ou du médicament. Triple carton !

La start-up fondée par Claude Grison, BioInspir, produit aussi les premiers solvants 100 % biosourcés, totalement biodégradables. Fabien CA RRÉ / Yann GA DAUD / Bio Inspir / CNRS Photothèque

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