Plutée à couleur de cerf, et, on vous dit enfin, tout, sur le sexe chez les champignons !!

Publié le 16 Septembre 2017

Plutée à couleur de cerf (Pluteus cervinus) Photos Gilles Weiskircher Anab
Plutée à couleur de cerf (Pluteus cervinus) Photos Gilles Weiskircher Anab

Plutée à couleur de cerf (Pluteus cervinus) Photos Gilles Weiskircher Anab

Nom scientifique : Pluteus cervinus(Sch. : Fr.) Kummer 1871

 
Nous avons déjà eu l’occasion de discuter des plutées dans l’article consacré au Plutée couleur de lion (Pluteus leoninus) Les plutées sont des champignons à lames  libres et à sporée rose.


Date de l’observation:  4 juillet à Oermingen


Division des Basidiomycota, Famille des plutéacées

 

Chair : Blanchâtre, jaune sous la cuticule, mince, odeur légèrement raphanoïde (de radis)

Sporée : rose

Habitat:
Sur branches mortes tombées, sur fragments de bois ou sur souches pourries, dans les forêts de feuillus ou dans les forêts mixtes de feuillus et de conifères,  à partir du milieu de l'été et jusqu'à l'automne


Consommation:  sans intérêt

 

Le Plutée couleur de cerf est un champignon saprophyte, bien ancré profondément dans les souches ou branches en décomposition bien avancée, favorisant sa transformation en humus.

On ne rappellera pas assez le rôle essentiel et fondamental des champignons comme décomposeurs et recycleurs de la matière organique. Le champignon passe l’essentiel de sa vie dans le sol sous forme de mycélium, des filaments diffus et ramifiées qui lui permettent de coloniser tout le sous-sol et la matière organique pour mieux la décomposer. Lorsque certaines conditions sont réunies, le mycélium va produire des structures de « fructification » nommées par le mycologue des « sporophores » (ou carpophores) et par le grand public et surtout les gastronomes « le champignon ».

Plutée à couleur de cerf (Pluteus cervinus) Photos Gilles Weiskircher  Anab
Plutée à couleur de cerf (Pluteus cervinus) Photos Gilles Weiskircher  Anab

Plutée à couleur de cerf (Pluteus cervinus) Photos Gilles Weiskircher Anab

Le champignon que vous cueillez est en fait un organe de dissémination des spores, permettant la reproduction sexuée du champignon. Pour avoir un ordre de grandeur, le sporophore ne représente que 1 % du poids de l’organisme. Sous vos pieds, des milliers de kilomètres de mycélium serpentent dans le sol.

 

On a déjà beaucoup parler de la façon dont se nourrissent les champignons. Mais comment se reproduisent-ils ?

 

Parler de la reproduction des champignons est un exercice difficile. La reproduction peut être asexuée et/ou sexuée avec un brassage des gènes. Pour schématiser et selon le mycète, les cellules de dissémination peuvent être produites par bourgeonnement d’une cellule mère (on parle de conidie) ou par cloisonnement interne d’une cellule mère (on parle de spore).
Une conidie est toujours issue d’une reproduction asexuée tandis qu’une spore peut être issue d’une reproduction asexuée ou sexuée.

 

La sexualité des champignons n’est sans commune mesure avec ce qu’on peut observer chez les animaux et donc ne sera pas propice à réveiller d’éventuelles pensées coquines. On ne parle pas de sexe chez les champignons mais plutôt de compatibilité. Pour schématiser, deux mycéliums de la même espèce, issus chacun d’une spore (le mycélium primaire), et présentant les mêmes gènes de compatibilité pourront fusionner. Cette fusion des mycéliums va donner un mycélium dit secondaire mais ne s’accompagnera pas immédiatement d’une mise en commun des noyaux. Le mycélium secondaire peut persister des années jusqu’à ce que les conditions soient réunies pour former un champignon. 
La fusion des noyaux, c’est-à-dire la fécondation, (caryogamie) s’effectuera au niveau du sporophore dans le tissu fertile (situé dans les lames, plis, etc.). Après cette fusion, la méiose va brasser les gènes et de nouvelles spores vont être émises. Le cycle est bouclé.

 

Ce cycle est schématique et la réalité est plus complexe. Certaines espèces de champignon peuvent présenter jusqu’à 3 et plus de gènes de comptabilité. On est donc loin d’une dichotomie entre mâle et femelle. Ces notions n’existent pas chez les champignons. Tandis que chez les animaux, les complémentaires s’attirent, c’est plutôt l’inverse chez les champignons.

 

La situation se complique car il existe chez les champignons un phénomène de parasexualité nommé phénomène de Buller. Pour schématiser, on se rappelle que le mycélium secondaire contient deux noyaux issus de 2 spores qui ont précédemment fusionné par le mycélium qui en a germé.
Dans le phénomène de Buller, un des deux noyaux du mycélium secondaire peut être évincé par un noyau issu d’un mycélium primaire. Ce phénomène pose la notion complexe d’individu. Dans ce cas de figure, la notion d’individu indivisible n’existe plus et on parlera davantage de génète. Cette notion a également été évoquée chez les arbres par le botaniste Francis Hallé.

 

Les champignons sont également capables d’autofécondation (apogamie). Dans ce cas, le noyau d’un mycélium primaire peut se diviser par mitose pour aboutir à un mycélium à deux noyaux, semblable à un mycélium secondaire. Ce phénomène est courant chez les mycènes et les hygrocybes.

 

Enfin, on peut observer chez certains champignons une division asynchrone des noyaux lors de la méiose, désynchronisation engendrée par le froid. Dans certains cas, les spores émises posséderont déjà deux noyaux au lieu d’un et donc n’auront pas besoin d’un autre mycélium primaire pour se reproduire.

 

Les mécanismes présentés ici concernent les champignons basidiomycètes, une classe de champignons supérieurs caractérisés par la présence de basides, cellules qui génèrent les spores. Cette classe ne représente qu’une très infime partie de tous les champignons et la grande majorité des champignons ne produisent pas de structures visibles, ni n’ont de sexualité.

 

En conclusion, la reproduction des mycètes est un vaste sujet et toute comparaison avec le règne animal est vaine. Le champignon déclenchera sa reproduction sexuée lors d’un stress, d’un choc thermique. Ceci se conçoit aisément lorsqu’on garde à l’esprit que la sexualité est un mécanisme de reproduction coûteux en énergie par rapport à la reproduction asexuée, entraînant un brassage génétique, donc générant de la diversité, bien utile à l’espèce pour perdurer ou s’implanter dans un environnement inhospitalier ou changeant. Dans le domaine de la reproduction, les champignons ne manquent pas d’imagination, présentent une très grande diversité,  une des clefs également de leur succès évolutif.


Source : http://mycorance.free.fr/valchamp/champi196.htm



Texte, photos, et bibliographie : Gilles Weiskircher (Anab)

Rédigé par ANAB

Publié dans #champignons

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