Enquête mycologique, épisode 103, Nyctalis porteur-d’étoiles Asterophora lycoperdoides
Publié le 9 Septembre 2023
Identifier un champignon n’est pas chose aisée au premier abord et c’est pourtant une démarche essentielle pour éviter toute fâcheuse méprise qui peut devenir fatale si on consomme un champignon toxique ou mortel. L’enquêteur de la brigade d’identification des champignons apprécie tout particulièrement d’arpenter les forêts pour recenser tous les gangs fongiques qui s’y trouvent.
Scène du crime
Nous sommes 1er septembre 2023, dans la forêt de Sarre-Union, une charmaie hêtraie acidiphile. L’enquêteur va de nouveau croiser un suspect qu’il n’a jamais rencontré. Il fait de nouveau chaud, sec. Trouver un champignon semble compromis et pourtant, c’est une belle rencontre que va faire l’enquêteur, sur un champignon complètement pourri
On reconnaît déjà la masse informe noire qui est une russule. Il n’est plus possible de l’identifier, sauf à faire appel à un médecin légiste. Sur ce champignon pourri pourtant poussent des champignons.
Arme du crime
Le champignon pousse sur une russule pourrie Il s’agit donc d’un champignon saprophyte.
Profil du suspect
La morphologie du champignon est classique, avec un pied et un chapeau. Il est minuscule, à peine 3 cm de hauteur. Les lames sont adnées. L’odeur est très farineuse. On observer une abondante poudre brune sur le chapeau
Pas de voile général ou partiel, ni d’ornement.
Avec tous ces éléments, on peut identifier ces spécimens comme le Nyctalis porteur-d’étoiles Asterophora lycoperdoides (Bull.) Ditmar. Néanmoins, il existe un sosie, le Nyctalis parasite, qui n’a pas cette poudre brune sur le chapeau.
Examen part la police scientifique
Il est intéressant d’observer cette poudre brune au microscope.
Chlamydospores. Microscopie x1000 de Nyctalis porteur-d’étoiles Asterophora lycoperdoides : Photo Gilles Weiskircher (Anab)
Ces magnifiques spores sont en forme d’étoiles et permettent de comprendre le nom porteur d’étoiles. Mais ici ce sont des spores particulières. Elles ne sont pas issues d’une reproduction sexuée (donc émises par des basides) mais proviennent d’une reproduction végétative. On les appelle des chlamydospores. Ce nom barbare désigne des spores de multiplication végétative (par clonage pour simplifier), avec une paroi épaisse. Cette paroi épaisse leur permet de subsister d’une année sur l’autre sur le sol. Une technique astucieuse pour se multiplier vite et résister aux intempéries. Néanmoins, c’est une reproduction par clonage, donc qui ne génère pas de diversité génétique. On ne gagne généralement pas sur tous les tableaux.
Statut selon l’INPN : Classé en Préoccupation Mineure (LC) sur la Liste rouge des champignons menacés d’Alsace.
Comestibilité : indigeste
La conclusion de l’enquêteur
Ce nyctalis est peu commun. Avec son habitat singulier et son chapeau tout poudré, il est très facile à reconnaître.
Texte, photos, et bibliographie : Gilles Weiskircher (Anab)