Enquête mycologique, épisode 78, Cortinaire purpurescent Cortinarius subpurpurascens

Publié le 18 Février 2023

Identifier un champignon n’est pas chose aisée au premier abord et c’est pourtant une démarche essentielle pour éviter toute fâcheuse méprise qui peut devenir fatale si on consomme un champignon toxique ou mortel. L’enquêteur de la brigade d’identification des champignons apprécie tout particulièrement d’arpenter les forêts pour recenser tous les gangs fongiques qui s’y trouvent. Et c’est un gang redoutable qui attend l’enquêteur.

 

Scène du crime

 

Nous sommes le 13 octobre 2022, dans la forêt de Zetting (Moselle) , sous hêtres, sur terrain calcaire.

Cortinaire purpurescent. Cortinarius subpurpurascens Photo Gilles Weiskircher (Anab)

Cortinaire purpurescent. Cortinarius subpurpurascens Photo Gilles Weiskircher (Anab)

Arme du crime

 

Le champignon pousse au sol, sans débris agglomérés à la base du pied. Il s’agit vraisemblablement d’un champignon mycorhizien.

 

Profil du suspect

 

La morphologie du champignon est classique, pied et chapeau. Les lames sont non-libres Il n’y a pas de voile général (verrue ou volve) mais on distingue un voile partiel, sous forme de filaments qui partent du dessous du chapeau jusqu’au pied. Les filaments, plaqués sur le pied, sont de couleur rouille. Il s’agit là d’une observation essentielle pour la détermination. Présence de cortine, avec une couleur rouille (qui est due aux spores de couleur rouille qui se sont déposées dessus), on est dans le genre Cortinarius.

Cortine de Cortinaire purpurescent. Cortinarius subpurpurascens Photos Gilles Weiskircher (Anab)
Cortine de Cortinaire purpurescent. Cortinarius subpurpurascens Photos Gilles Weiskircher (Anab)

Cortine de Cortinaire purpurescent. Cortinarius subpurpurascens Photos Gilles Weiskircher (Anab)

En présence d’un cortinaire, il est indispensable de faire au minimum les observations suivantes :

- viscosité du pied et du chapeau : uniquement le chapeau est visqueux ici, de couleur brun lilas

- base du pied : légèrement bulbeux et marginé

- odeur : de miel

- lames : violacées au toucher

 

Le pied se teinte de violet lors de la manipulation.

 

On a assez d’élément pour identifier le cortinaire purpurescent, Cortinarius subpurpurascens (Batsch) Kickx. C’est un cortinaire fréquent, qui pousse en troupe, sous conifères ou feuillus selon les auteurs. Ce cortinaire est assez typique, mais c’est loin d’être le cas de tous les cortinaires.

 

Sporée :

 

Elle est rouille, ce qui confirme bien un cortinaire.

Sporée rouille de Cortinaire purpurescent. Cortinarius subpurpurascens Photo Gilles Weiskircher (Anab)

Sporée rouille de Cortinaire purpurescent. Cortinarius subpurpurascens Photo Gilles Weiskircher (Anab)

Examen par la police scientifique.

 

Les spores sont elliptiques, verruqueuses

Spores. Microscopie x1000 de Cortinaire purpurescent. Cortinarius subpurpurascens Photo Gilles Weiskircher (Anab)

Spores. Microscopie x1000 de Cortinaire purpurescent. Cortinarius subpurpurascens Photo Gilles Weiskircher (Anab)

Statut selon l’INPN : LC (Préoccupation mineure) sur la liste rouge des champignons supérieurs en Alsace. Espèce déterminante de l’inventaire ZNIEFF.

 

Comestibilité : Non comestible

 

La conclusion de l’enquêteur

 

Les cortinaires, avec plus de 1000 espèces en Europe, peuvent être l’affaire d’une vie. Des enquêteurs spécialisés, les cortinariologues, les étudient. Avec leur couleur de lame rouille, on ne les confond généralement pas avec un autre genre, d’autant que beaucoup laissent sur le pied des filaments rouille appelés justement cortine. Pour les reconnaître, il faut disposer de plusieurs spécimens à différents stades, surtout pour observer sur les jeunes spécimens le voile général qui recouvre le pied et qui disparaît ensuite (ce voile peut être de couleur bleue par exemple). Les cortinaires sont des champignons mycorhiziens magnifiques mais qui ne se laissent pas aborder facilement. En priorité il faut observer si le chapeau et/ou le pied sont visqueux, s’il y a un bulbe à la base du pied, la couleur du voile sur un jeune spécimen et après commence une minutieuse étude par la police scientifique.

 

Pour aller plus loin.

 

Champignons, ce qu’il faut savoir en mycologie. Guillaume Eyssartier, éditions Belin, 2018

 

Texte, photos, et bibliographie : Gilles Weiskircher (Anab)

 

Rédigé par ANAB

Publié dans #champignons

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R
Merci Gilles de cet article intéressant et qui saura j'espère aussi éveiller la vocation de futurs cortinologues (1000 espèces cela donne le vertige)
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