Enquête mycologique, épisode 101, Inocybe du Jura Inocybe jurana
Publié le 26 Août 2023
Identifier un champignon n’est pas chose aisée au premier abord et c’est pourtant une démarche essentielle pour éviter toute fâcheuse méprise qui peut devenir fatale si on consomme un champignon toxique ou mortel. L’enquêteur de la brigade d’identification des champignons apprécie tout particulièrement d’arpenter les forêts pour recenser tous les gangs fongiques qui s’y trouvent.
Scène du crime
Nous sommes le 16 août 2023, dans la forêt de Sarre-Union, une charmaie hêtraie acidiphile, au bord d’un chemin forestier
Arme du crime
Le champignon pousse au sol et la base de son pied n’agglomère pas de débris organiques. Il s’agit donc vraisemblablement d’un champignon mycorhizien.
Profil du suspect
La morphologie du champignon est classique, avec un pied et un chapeau. Il possède des lames, non libres et adnées. Le fibrilleux est fibrilleux à vergeté, brun vineux sombre.
Le pied ne présente pas de bulbe marginé. L’odeur est plutôt forte, de type spermatique fruitée.
Avec son chapeau en forme de cloche, l’enquêteur soupçonne immédiatement un membre du gang des inocybes.
Un mot sur les inocybes
Les membres de ce gang présente souvent une odeur distincte dite spermatique, la couleur de sporée est brun tabac et le chapeau est fibrilleux (inocybe d’ailleurs signifie littéralement chapeau fibreux). C’est un groupe avec lequel il faut être prudent, surtout quand on le collecte. Il faut éviter de trop manipuler le pied car il présente des structures microscopiques souvent déterminantes et il faut aussi observer s’il y a un bulbe à la base du pied. En résumé, un inocybe se manipule avec délicatesse et, sauf exception, il faudrait souvent passer par le microscope pour affiner la détermination. Celui-ci ne fera pas exception.
Donc, en présence d’un inocybe, il faut définir l’odeur, le revêtement du chapeau et s’il y a un bulbe. Ce sont les premières observations à faire sur le terrain.
Examen par la police scientifique
Les spores sont lisses
Les cheilocystides sont présentes, mais elles ne sont pas métuloïdes (à paroi épaisse et des cristaux au sommet)
Ces observations nous permettent d’identifier le spécimen comme l’ inocybe du Jura Inocybe jurana (Patouillard) Saccardo.
Statut selon l’INPN : Classé en Préoccupation Mineure (LC) sur la Liste rouge des champignons menacés d’Alsace
Comestibilité : Toxique
La conclusion de l’enquêteur
Un inocybe, ce n’est jamais une mince affaire. Il reste un genre encore aujourd’hui mal connu des mycologues et peu de mycologues s’y frottent vu la complexité de ce groupe. D’identification difficile, certains restent faciles à déterminer sur le terrain avec un peu d’expérience.
Texte, photos, et bibliographie : Gilles Weiskircher (Anab)